Les sources constitutionnelles du droit administratif
Dissertation : Les sources constitutionnelles du droit administratif. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Jean Carlier • 28 Novembre 2021 • Dissertation • 1 776 Mots (8 Pages) • 1 441 Vues
DISSERTATION
LES SOURCES CONSTITUTIONNELLES DU DROIT ADMINISTRATIF
Accroche : En 1954, le doyen Vedel écrivait qu’il est « bien difficile de marquer la limite qui sépare le droit constitutionnel du droit administratif » et il est vrai que les jurisprudences constitutionnelles et administratives ont eu tendance à converger notamment lorsqu’il s’est agi de reconnaître la portée constitutionnelle de certaines normes, imprégnant dès lors la légalité, lato sensu, de l’action administrative.
Sujet: En conséquence, intéressons-nous à l’étude des sources constitutionnelles du droit administratif.
Définition : L’expression « source du droit » renvoie à l’idée d’un « agencement hiérarchique » des règles de droit (G. Vedel). Selon la hiérarchie kelsenienne, les sources constitutionnelles, constituées par le « bloc de constitutionnalité » (L. Favoreu), seraient ainsi au sommet de cette hiérarchie. Quant au droit administratif en particulier, il peut être défini comme la branche du droit public qui régit l’action administrative, il en est l’instrument naturel dès lors que celle-ci est au service de l’intérêt général. Il s’agit d’un droit prétorien inégalitaire qui place l’Administration sur un pied de supériorité vis-à-vis des administrés.
Problématisation : En dépit du fait qu’il existe donc une « inégalité fondamentale » (M. Hauriou) entre l’Administration et les administrés, l’action de celle-ci ne s’en trouve pas moins soumise au principe de légalité. En effet, l’Administration est dans l’obligation d’agir en conformité avec les fondements du droit sans quoi ses actes seraient illégaux et donc susceptibles d’être annulés par le juge. Historiquement, le droit administratif puisait l’une des ses principales sources de légalité dans la loi, « expression de la volonté générale » (DDHC, art. 6), qui était alors au centre du droit notamment dans le but de protéger l’Administration des empiétements du juge. La Constitution de la Vème République a cependant marqué un tournant dans cette conception du légicentrisme, d’une part, en énumérant limitativement les compétences du législateur (C., art. 34) et, d’autre part, en permettant à un organe constitutionnel de mettre la loi en échec si celle-ci était contraire à la Constitution. Cette dernière fut dès lors considérée par certains auteurs, à l’instar du doyen Vedel, comme une source incontournable de la légalité de l’action administrative en ce qu’elle paraissait être porteuse de l’ensemble des éléments fondamentaux ayant vocation à régir l’action de l’Administration en la protégeant autant que les droits des administrés. Pour autant, face à la montée en puissance des droits internationaux et européens, notamment lorsqu’il s’agit de garantir des droits et libertés fondamentales, face au silence, voire à l’ambiguïté, du corps même de la Constitution sur ces grands principes et, enfin, face à la protection accordée aux décisions du pouvoir exécutif dans les multiples périodes d’état d’urgence des dernières années, le rempart que la Constitution semblait offrir aux administrés vis-à-vis des pouvoirs publics n’est pas exempte de doutes quant à son efficacité devant un juge.
Problématique : Aussi semble-t-il essentiel de se demander comment les sources constitutionnelles, en dépit de leurs inconvénients apparents et d’une concurrence grandissante envers d’autres sources du droit, se sont construites parvenant ainsi à devenir et rester, au détriment de la loi, l’un des fondements essentiels de la légalité de l’action administrative ?
Plan : Contournant le légicentrisme, ce sont les juges administratifs, parfois aidés du pouvoir constituant lui-même, qui ont permis au contrôle juridictionnel de l’action administrative d’exister par le biais des sources constitutionnelles, au demeurant en parallèle de sources concurrentes, (II)
bien que cela n’eût été possible sans qu’au préalable ces mêmes juges fassent montre de l’étendue de leur pouvoir de création et d’interprétation (I).
I – L’appropriation progressive des sources constitutionnelles par le juge administratif
Si peu à peu le juge administratif, aidé par le juge constitutionnel, a levé le voile sur la valeur constitutionnelle d’un certain nombre de normes (A), il n’en demeure pas moins que l’invocabilité de certaines d’entre elles demeure délicate (B).
A – La révélation coordonnée d’un « bloc de constitutionnalité »
→ La Constitution, seule, ne contient pas les éléments fondamentaux du droit administratif : la Constitution de la Vème République a surtout vocation à régir l’organisation institutionnelle de la France et les relations entre les différents pouvoirs publics.
→ Ces principes essentiels (liberté, égalité, continuité du service public, droit de grève...) se situent notamment dans les textes – ou dans l’esprit des textes- mentionnés à l’alinéa 1 du préambule de la Constitution du 4 octobre 1958 (DDHC de 1789, Préambule de la Constitution de 1946, Charte de l’Environnement de 2004).
→ Problème : Quelle était la valeur de ces textes ?
→ C’est une construction jurisprudentielle émanant du juge administratif et du juge constitutionnel qui a permis de poser la valeur constitutionnelle de ces textes mentionnés au préambule (CE, 1960, Société Eky, n°46922 ; décision n° 71-44DC du 16 juillet 1971, Liberté d’association ; CE, 2008, Commune d’Annecy, n°297931).
→ Les juges ont également dégagé des nouveaux principes à l’instar des PFRLR (décision n°80- 119 du 22 juillet 1980, Loi portant validation d’actes administratifs ; décision n°86-224 du 23 janvier 1987 ; décision n°88-244DC du 8 juillet 1989, Loi portant amnistie ; CE, 1996, Koné, n°169219...) qui ont permis de donner valeur constitutionnelle à des principes indispensables à la légalité de l’action administrative.
→ Les sources constitutionnelles ne se sont pas imposées d’elles-même mais sont le résultat d’une construction jurisprudentielle audacieuse (= pouvoir d’interprète des juges).
Transition
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