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Commentaire du texte d'Olivier Beaud relatif aux changements constitutionnels et à la révision de la Constitution

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Par   •  31 Octobre 2015  •  Commentaire de texte  •  2 522 Mots (11 Pages)  •  4 801 Vues

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        « Une constitution est vivante, elle reproduit le cycle biologique. Elle nait, se développe, et meurt ». Cette citation de Gicquel nous offre une vision évolutive de la Constitution qui s’adapte et change. Ceci entre en adéquation avec l’existence d’un article de révision, l’article 89 de la Constitution de la Cinquième République française, qui permet la modification du texte constitutionnel et qui admet ainsi son évolution. Cependant, du fait de la prééminence de la Constitution qui se place au somment de la hiérarchie des lois, sa révision est soumise à une procédure contraignante, plus ou moins difficile à achever. Bien que la Constitution du 4 octobre 1958 ait été modifiée à 24 reprises, il en reste que le texte constitutionnel demeure d’une grande stabilité dans le temps. Comment alors les nécessaires mutations d’un régime politique peuvent-elles être accompagnées par le droit constitutionnel ? C’est la question à laquelle Olivier Beaud, spécialiste du droit constitutionnel, de la Théorie de l’État et de l’Histoire de la pensée juridique, essaye de répondre dans l’article « Les mutations de la Cinquième République, ou comment se modifie une Constitution écrite » paru dans le magazine Pouvoirs. « Le problème est de savoir comment le droit constitutionnel peut rendre de ce problème, complexe, des mutations de la Cinquième République ». L’article a été rédigé en 2001, soit environ un an après une révision constitutionnelle majeure, celle du 2 octobre 2000, qui a instauré le mandat présidentiel de cinq ans, notamment pour éviter les cohabitations devenues fréquentes depuis 1986. Cependant, pour Olivier Beaud, il existerait aussi des « changements informels » de la Constitution (terme emprunté à Jellinek), qui seraient une voie de modification « purement matérielle » et qui résulteraient « d’un déplacement de la réalité de la situation politique ». Il est vrai que les décalages existants entre la théorie constitutionnelle et la pratique politique tendent à démontrer l’existence d’un droit non écrit qui serait selon Olivier Beaud aussi voir plus efficaces que les révisions constitutionnelles. Comment peut-on rendre compte des changements politiques et sociétaux dans la Constitution ? Les changements informels peuvent-ils être réellement considérés comme des modifications de la Constitution ? Nous nous intéresserons d’abord à la procédure de révision (I) qui est une réelle modification constitutionnelle au sens aussi bien matériel que formel. Cependant sa rigidité en limite sa portée. Ensuite nous étudierons les changements constitutionnels comme une interprétation actualisant la Constitution (II). Ils permettent de palier aux contraintes de la procédure de révision mais ne peuvent pas être considérés comme de véritables modifications au sens juridique du terme.  

  1. La procédure de révision

  1. Une réelle modification formelle et matérielle

L’article développe l’idée qu’il existe deux voies de modification de la Constitution. La première est « une révision de la Constitution ». Olivier Beaud nous donne ici une définition de la révision constitutionnelle en deux points, d’une part son coté formel et d’autre part son coté matériel. « Formellement, la révision de la Constitution est une technique juridique par laquelle les pouvoirs publics modifient expressément le texte de la constitution (…) après avoir suivi une procédure spéciale qu’on appelle procédure de révision. Définie matériellement la révision de la Constitution est le résultat de cette procédure dans la mesure où elle décrit l’objet de la modification de la Constitution ». En cela il fait référence à la distinction en droit constitutionnel d’une Constitution formelle et d’une Constitution matérielle. La Constitution matérielle est définie par son contenu, son « objet », et est en rapport avec l’organisation et l’exercice du pouvoir. La Constitution formelle relève de la forme du texte, plus précisément de son mode d’adoption et de révision. Un texte prend une valeur de norme constitutionnelle quand il est plus difficile à modifier qu’une simple règle, du fait d’une procédure spéciale. La Constitution formelle et matérielle ne coïncident pas toujours tout a fait. Par exemple le mode de scrutin est régit par une loi mais comme elle fait parti du fonctionnement des institutions, on la place dans la Constitution matérielle. En France, dans la Constitution de la Cinquième République, la procédure de révision est prévue par l’article 89. C’est un processus constitutionnel, qui est donc légitime. D’ailleurs Olivier Beaud nous fait remarquer implicitement dans son article que la révision constitutionnelle est unanimement acceptée et reconnue par « la doctrine ». Un changement constitutionnel qui a suivi la procédure de révision est authentifié dans la lettre de Constitution écrite. C’est donc une véritable réécriture. Ainsi, il acquiert le statut particulier que possède toute norme constitutionnelle écrite et formelle, une sorte de suprématie qui le rend plus dure à modifier du fait de la procédure particulière. Ce changement est en quelque sorte gravé dans le marbre, il est aussi bien formel que matériel. De ce fait on peut dire qu’une révision de la Constitution qui a suivi la procédure est une véritable modification de la Constitution dans tous ces aspects et en terme de droit. Ces modifications ne peuvent être à priori remises en cause, à part si l’on entame une nouvelle procédure de révision. Un exemple de grand changement politique et sociétal de la Cinquième République qui a été à l’origine d’une révision de la Constitution est le phénomène de la cohabitation. La différence entre la durée du mandat présidentiel, un septennat avant la révision constitutionnelle du 2 octobre 2000, et la durée de la législature (cinq ans) donnait aux électeurs la possibilité de désigner une majorité opposée au chef de l’État à l’Assemblée nationale. Ce phénomène très concentré de 1986 à 2002 tendait à changer les pratiques politiques, le président perdait en effet certaines de ces prérogatives par rapport à une période de majorité présidentielle à l’Assemblée. Une façon d’y remédier a été de faire appelle à la procédure de révision prévu par l’article 89 de la Constitution et d’instaurer le mandat présidentiel de cinq ans.

Olivier Beaud dans son article ne remet absolument pas en cause l’existence et la légitimité de cette voie de modification de la Constitution, seulement il sous-entend les limites et les contraintes qu’elle soulève.

  1. La rigidité de la Constitution comme limite à la procédure de révision

En effet, Olivier Beaud insiste sur la difficulté de mener à terme une révision constitutionnelle. Il nous explique dans le deuxième paragraphe que cette contrainte est due à la rigidité de la Constitution. Une Constitution « est rigide lorsqu’elle est difficile à modifier en raison des conditions procédurales imposées pour sa révision ». Développons un peu plus ce concept de rigidité. La seule procédure ici considérée est déterminée par l’article 89 de la Constitution française de la Cinquième République comprit dans le titre XVI de la Constitution qui s’intitule « De la révision » (bien que l’article 11 ait déjà été utilisé par le Général de Gaulle). Cet article ne peut être utilisé que selon des critères particuliers. Premièrement « aucune procédure ne peut être engagée ni poursuivie lorsqu’il est porté atteinte à l’intégrité du territoire ». De plus, « la forme républicaine du gouvernement ne peut faire l’objet d’aucune révision ». Enfin cette procédure comporte plusieurs étapes et doit obtenir l’accord du président et du gouvernement, l’accord des deux Chambres, et doit être soumis à un référendum ou obtenir l’accord du Congrès. En ce sens notre Constitution est bien rigide car elle possède des conditions procédurales de révision très stricte. C’est donc une procédure difficile à achever qui a d’abord pour but de protéger le régime français et ne pas remettre en cause la République démocratique. La Cinquième République aurait d’ailleurs de ce fait gardé son caractère formel à travers la Constitution du 4 octobre 1958. Il existe de nombreux projets de révision qui n’ont pas aboutis comme le projet de réforme du Conseil supérieur de la Magistrature en 2000 ou déjà en 1973 un projet de quinquennat présidentiel. Cela est très contraignant dans la mesure où des changements politiques ou sociétaux importants doivent faire unanimité entre toutes les autorités compétentes nécessaires pour être reconnus constitutionnellement. De la sorte, des modifications qui prennent autant de temps et qui n’aboutissent pas toujours ne peuvent pas refléter les changements continus de la société. Ainsi selon O. Beaud, la procédure de révision est très souvent délaissée, et certains changements « n’apparaissent pas dans le texte de la Constitution ». Il passe d’ailleurs plutôt rapidement sur cette voie de modification de la Constitution, qu’il semble préférable de laisser tomber face à une autre voie de modification de la Constitution beaucoup moins contraignante. Il en reste que la révision constitutionnelle est d’une validité juridique irréprochable.

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