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Souveraineté nationale et souveraineté populaire

TD : Souveraineté nationale et souveraineté populaire. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  29 Novembre 2023  •  TD  •  1 761 Mots (8 Pages)  •  204 Vues

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INSTITUTIONS POLITIQUES.

FICHE TECHNIQUE.

Souveraineté nationale et souveraineté populaire.

        En s’élevant à 58,4% au second tour, le taux d’abstention aux élections municipales de 2020 marque un record pour ce type de scrutin. Cet absentéisme croissant aux élections traduit le sentiment du peuple d’une perte de souveraineté, l’impression de ne plus avoir un rôle à jouer dans la vie politique du pays. Ainsi la souveraineté, concept complexe qui peut relever de différentes définitions, est un terme émotif qui peut être considéré comme « le caractère suprême d’une puissance pleinement indépendante, et en particulier de la puissance étatique » dans son « sens originaire », selon les travaux de R. CARRE DE MALBERG. L’Etat, en ce qu’il produit et met en pratique ses lois, désigne une entité juridique déterminée par cette notion de souveraineté, contrairement à la colonie, et lie au droit la population, le territoire et l’autorité politique qui le compose. Dans les régimes non démocratiques, tels que la monarchie en France avant 1789, la personne du roi était considérée comme souveraine tout en étant assimilée à l’Etat. Aussi, l’arrivée des régimes démocratiques, qui attribuent la souveraineté au peuple, fait émerger un questionnement sur la conception du peuple, ayant une conséquence directe sur l’exercice de sa souveraineté. En effet, d’un point de vue juridique, est détenteur de la souveraineté celui qui en a été investi par la Constitution. Or, les système politique devant fournir un fondement aux décisions apportées par le droit, les diverses théories de la souveraineté interrogent la légitimité politique. Il s’agit de déterminer d’où vient originairement le droit de commander. D’une part, la théorie de la souveraineté populaire conçoit le peuple comme une addition de citoyens, dont chacun se partagerait de façon égale la souveraineté. D’autre part, la théorie de la souveraineté nationale associe le peuple à une nation, communauté qui unit le peuple à la fois passé, présent et futur (de sorte qu’elle exclue une pratique individualiste de la démocratie directe) et qui, lorsqu’elle détient la souveraineté, l’exerce à travers des représentants qui expriment sa volonté, tel que l’a exprimé SIEYES dans ses travaux. Dès lors, si la souveraineté de l’Etat semble faire l’unanimité, il convient toutefois de se demande où se situe cette souveraineté dans l’Etat ? L’histoire des institutions françaises montre, depuis la Révolution, une prévalence du concept de souveraineté nationale sur celui de souveraineté populaire (I). La Vème République donne l’impression, à l’aune de l’histoire constitutionnelle, d’être parvenue à un équilibre réconciliant les deux souverainetés, qui se révèle néanmoins creux dans l’exercice du pourvoir (II).

  1. Le choix constitutionnel de la souveraineté nationale.

  1. La transmission de l’autorité légitime du monarque à la nation.
  1. La naissance de « l’Etat moderne » à la Renaissance entraîne l’apparition de la notion de souveraineté. En effet, conceptualisé par opposition à une transcendance religieuse de la source du pouvoir, le « Contrat social » de ROUSSEAU justifie l’Etat par un accord entre tous les hommes qui acceptent de renoncer à un peu de leur liberté afin de s’organiser collectivement. De fait, la souveraineté n’est plus la qualité intrinsèque d’une personne délivrée par Dieu mais elle lui a été attribuée. D’un point de vue politique, elle pose la question de la légitimité du pouvoir du roi et fournit un appui pour l’argumentaire des revendications démocratiques.
  2. La souveraineté nationale, si elle n’est pas la première à naître dans les revendications révolutionnaire, elle est cependant la première à apparaître en pratique, relativement au concept de « nation » qui est employé durant la Révolution française de 1789, et n’a pu s’établir que lors de la première assemblée constituante en 1991. Elle y est ainsi préférée à la souveraineté populaire qui ne semblait pas réalisable concrètement. La Constitution du 3 septembre 1991 qui en découle le réaffirme en stipulant que « la souveraineté est une, indivisible, inaliénable et imprescriptible » et qu’elle « appartient à la Nation ». Dès lors, la Nation est considérée comme une entité juridique qui s’exprime à travers des représentants. Ces derniers sont les députés, dont chacun exprime la volonté de la Nation toute entière, et non pas uniquement de ceux qui les ont élus. Dès lors, le mandat exercé ne peut pas être impératif.
  1. La tentative du recours la souveraineté populaire.
  1. A la théorie de la Nation souveraine va s’opposer une autre conception de la souveraineté, défendue par les Montagnards et portée jusqu’à la Constitution française du 24 juin 1793 qui énonce que « la souveraineté réside dans le peuple » et que « aucune portion du peuple ne peut exercer la puissance du peuple tout entier ». En liant le peuple aux élus par un mandat impératif, les citoyens exercent désormais un droit souverain et non plus la simple fonction d’élire des représentants de la Nation toute entière. La souveraineté désigne ici l’addition des souverainetés de chaque citoyen, qui a la possibilité de s’exprimer de diverses manières jusqu’à même détenir un droit d’insurrection. Or cette Constitution ne sera jamais véritablement appliquée, son fonctionnement étant trop long et complexe pour être en mesure de résoudre les révoltes fédéralistes et royalistes qui impliquent une réponse quasi-immédiate. Elle se verra ainsi progressivement remplacée par les décrets du Comité de Salut Public qui se chargera de rétablir l’ordre par la répression et la terreur.
  2. Le gouvernement direct, application intégrale de l’idée démocratique, conférant une véritable souveraineté populaire, est qualifié, semble-t-il à juste titre, par G. BURDEAU de « curiosité historique ». La mise en place d’un tel système impliquerait que tous les citoyens se rassemblent dès qu’il y a lieu de prendre une décision ou, cette procédure étant irréalisable pour les grands Etats, qu’ils instituent des autorités à qui ils donneraient des directives, tout en se réservant le règlement des questions importantes comme l’établissement des lois. Hormis quelques cantons suisses, tels que Glaris ou Appenzell, ce type de gouvernement n’existe plus et renvoie à la naissance de la démocratie à Athènes.
  1. L’expérience d’une souveraineté « mixte ».
  1. Le gouvernement semi-direct.
  1. Aussi, si le gouvernement direct parait inapplicable, certains éléments viables peuvent néanmoins être repris et combinés à d’autres afin de former un nouveau type de gouvernement. Ainsi, dans un gouvernement semi-direct, le peuple élit des représentants (président, Assemblée nationale) afin  d’établir des lois et de mener la politique du pays au quotidien. Cependant, les citoyens ont également la possibilité de s’exprimer directement, en approuvant ou en refusant un texte de loi par référendum, comme on peut l’observer en France ou en Suisse. Cette dernière, et l’on retrouve aussi ce procédé en Italie, offre en outre la possibilité d’une initiative populaire, afin que les citoyens demandent l’organisation d’un référendum ou d’un vote du Parlement concernant une loi et sous certaines conditions. Par ailleurs, l’article 72 de la Constitution française de 1958 confère au peuple un droit de pétition.
  2. La Constitution française du 04 octobre 1958, en attribuant de façon équivoque la souveraineté dès le titre premier, semble nier le conflit et effacer la distinction faite entre deux concepts dissociés dans l’histoire des institutions françaises. « La souveraineté nationale appartient au peuple, qui l’exerce par ses représentants et par la voie du référendum ». L’opposition entre régime représentatif et démocratie directe est ici dépassé. Il s’agit d’une véritable avancée en direction de la démocratie populaire, qui résulte de la volonté des constitutionnalistes d’inscrire le peuple dans la Constitution de la Vème République. CAPITANT écrit à ce titre « c’est le peuple qui exprime la souveraineté nationale ». Toutefois, cette résolution se révèle difficile à mettre en oeuvre dans l’exercice du pouvoir.
  1. Les limites d’une représentation populaire.
  1. Système né en opposition à la « souveraineté parlementaire », vers laquelle tend la souveraineté nationale depuis 1875 et atteint son apogée avec la IVème République que De Gaulle qualifiera de « régime des partis », le gouvernement semi-direct a ainsi pour but de libérer le « souverain captif » (TARDIEU) que constitue le peuple. Dès lors, de la ratification de la Constitution de la Vème République aux diverses étapes du règlement de la question algérienne, le président n’aura de cesse de restreindre les prérogatives du Parlement pour se tourner directement vers le peuple.
  2. Toutefois, cette initiative rencontre des oppositions, dès 1962 par exemple, lorsque P. REYNARD déclare « la France est ici et non ailleurs » à la tribune de l’Assemblée Nationale. De plus, les révisions de la Constitution, proposées en 1973 et réalisées en 1974 et 1976, ont été appliquées par voie parlementaire. En outre, la Constitution n’impose pas le recours au référendum, contrairement à celui des élections, et aucune convention constitutionnelle ne vient appuyer cette démarche. Enfin, en écartant le scrutin proportionnel aux élections nationales, la Vème République fait le choix de la stabilité en lui préférant le scrutin majoritaire dans le but d’éviter le retour au « régime des coalitions » et l’instabilité gouvernementale.

        Il semblerait donc que nous fassions aujourd’hui face à un effacement de la souveraineté populaire alors même que cette dernière s’est imposée avec difficulté et ne détient qu’une place congrue dans la Constitution à travers le référendum. Ce phénomène est à l’origine de nombreuses contestations telles que le mouvement des Indignés en Espagne en 2011 ou celui des gilets jaunes en 2018 en France qui réclamait la mise en place d’un référendum d’initiative citoyenne. Pourtant, l’essor des nouvelles technologies et la multitude de possibilités d’expression qu’elles offrent, devrait pouvoir permettre un renouveau de la démocratie directe, dont le cas le plus abouti a été expérimenté en Islande.

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