Commentaire de texte, Ariettes oubliées

“ De la musique avant toute chose Et pour cela préfère l’Impair Plus de vague et plus solide dans l’air Sans rien en lui qui pèse ou qui pose”. Par cette citation, Paul Verlaine résume sa vision de l’art poétique, outrepasse déjà les frontières entre poésie, musique, image et sensations pour laisser libre cours à l’expérimentation de nouveaux procédés poétiques dans le but de mêler ces différents arts en un tout. Dans le receuil, Romance sans paroles, Verlaine fait déjà référence à la musique puisqu’ une romance sans paroles est un morceau de musique où la musique parle d’elle-même, où elle ne nécessite pas de paroles. Le paradoxe ici est que c’est un receuil de poèmes et de non de musique. Paul Verlaine est un poète parnassien puis symboliste du XIXe siècle et une grande figure des poètes maudits. Amant d’Arthur Rimbaud de 1871 à 1873, il est ensuite emprisonné jusqu’en 1875. Le receuil Romance sans paroles paraît d’ailleurs pendant son emprisonnement. Sa poésie est caractérisée par son lyrisme, la musicalité de ses vers, la mélancolie à travers ses textes et son appel aux sensations visuelles et auditives. Constitué de plusieurs poèmes, le recueil débute par la section intitulée “Ariettes” avec neufs poèmes. Une ariette est une petite aria, un air léger chanté à une seule voix et avec un seul instrument. Nous allons ici nous pencher sur l’Ariette VI. Dans ce poème, Verlaine fait référence à plusieurs personnages issus de chansons traditionnelles et d’oeuvres littéraires afin de dépeindre un portait atypique et humoristique sur la société de son époque.

Nous pouvons donc nous demander, comment avec l’aide de différents procédés, Verlaine dépeint un portait sur la société de son siècle ?

Notre argumentation sera présentée en 3 grandes parties. Tout d’abord, nous verrons en quoi cette ariette est en réalité un centon. Ensuite, nous verrons comment Verlaine pose un regard critique sur la société, puis nous finirons par étudier la forme du poème et ses nouveautés poétiques.

Pour commencer, nous pouvons remarquer que durant cette ariette, Verlaine emprunte différents personnages issus de chansons traditionnelles ou d’oeuvres littéraires pour en faire une création originale, c’est ce qu’on appelle un centon. En effet, un centon est une oeuvre littéraire et musicale, constituée d’élements repris à une ou plusieurs oeuvres et réarrangés de manière à former un texte complètement différent. C’est excatement le procédé qu’utilise Verlaine dans cette ariette et il fait ainsi référence à plusieurs personnages. Pour commencer, le poète débute son ariette en faisant référence à un personnage qui apparait dans un grand nombre de chansons traditionnelles: Jean de Nivelle. Selon la tradition, ce dernier a été sollicité par son père pour se battre dans l’armée de Louis XI contre Charles le Téméraire. Ce dernier répondit par la négative et fut ensuite déshérité. Il fut traité de chien, mépris pour sa conduite peu honorable. Ensuite, le poète fait référence à une chanson enfantine française, populaire dans les années 1820: ”Le chat de la mère Michel”, dans le vers 3. Nous voyons une fois de plus, un écho aux chansons traditionelles françaises.

Mais Verlaine fait également référence à des oeuvres littéraires ou encore de l’opéra. Effectivement, dans le dernier vers de la première strophe: Verlaine fait désormais référence à un opéra comique en trois actes de 1883, “François-les-bas-bleus”.Nous pouvons remarquer qu’il fait référence “La Lune”. A partir du XVIIe sicèle, la Lune inspire beaucoup d’écrivains tels que Cyrano de Bergerac ou encore Jules Vernes, nous voyons donc encore ici une référence à la littérature française. Ensuite, il complète son centon en faisant référence à “Médor avec Angélique”, célèbres héros du poème italien Roland furieux, composé par Ludovico Ariosto, dit “l’Arioste”. Ensuite, dans le vers 4, le poète fait désormais référence à un opéra comique en trois actes de 1883, “François-les-bas-bleus”.

Nous venons de démontrer que Verlaine utilise et fait référence à plusieurs personnages pour former une oeuvre originale. Toutefois, il ne fait pas seulement référence à de la littérature française. Voyons maintenant, comment, à travers son ariette, le poète se moque de la société de son époque.

Pour commencer, Verlaine critique la société du XIXe siècle. Tout d’abord, il semble se moquer d’un auteur ou d’un poète. En effet, il poursuit son cendon mais cette fois ci, et pour la première fois, en faisant référence à lui-même. Il se désigne comme un “écrivain public”, dans le vers 5. Pour continuer, dans le vers suivant, il utilise un oxymore: “dispense sa lumière obscure”. Il se

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