Principes de la philosophie du droit de Hegel
Fiche : Principes de la philosophie du droit de Hegel. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar ISIDO • 19 Novembre 2022 • Fiche • 3 760 Mots (16 Pages) • 347 Vues
Le texte qui nous est proposé est un extrait des Principes de la philosophie du droit de
Hegel. Hegel y examine la question : « L’Etat a-t-il le droit d’infliger la peine de mort aux
individus ? ». Il s’agit ici d’examiner la question du point de vue du droit idéal, c’est-à-dire de se
demander non pas si la peine de mort existe dans le droit positif, c’est-à-dire s’il existe des Etats
qui appliquent la peine de mort, mais de se demander s’il est légitime, pour l’Etat, d’infliger la
peine de mort. Autrement dit, il s’agit de se demander si un Etat idéal est un Etat qui a le droit
d’infliger la peine de mort.
Cette question pourrait paraître surprenante. En effet, la doxa contemporaine est que la
peine de mort est totalement illégitime : l’Etat, s’il a le droit de mettre certains individus à mort
(dans la guerre), n’a pas le droit de punir ses citoyens, lorsqu’ils violent la loi, par la mort. Et la
justification qui est en général donnée à cela est que la peine de mort est contradictoire en ellemême
: interdire le meurtre et soi-même commettre des meurtres pour punir les meurtriers est
illogique.
Pourtant, la peine de mort a existé pendant longtemps sans offusquer grand monde. Ainsi
Socrate boit-il la cigüe sans jamais remettre en question le principe de la peine de mort en luimême.
On peut de fait soutenir que la justice est avant tout restauration de l’égalité et qu’il est
alors juste de prendre à l’individu ce qu’il a pris à autrui : dans le cas du meurtre, sa vie.
Cette question est capitale, dans la mesure où punir un individu par la mort est
irrévocable. Les implications éthiques d’un tel acte sont majeures et il vaut donc mieux être
absolument certain que cet acte est légitime avant de le commettre. Cette question est capitale
en outre, dans la mesure où ce qui fait tenir la communauté politique pourrait être la croyance
dans le fait qu’elle permet une forme de justice absente dans un « état de nature ». Il devient donc
crucial de clarifier quelle forme concrète doit prendre cette justice. Un doute quant à la légitimité
de la peine de mort pourrait faire vaciller cette croyance donc mettre en péril l’unité de la
communauté politique. Cette question est enfin particulièrement intéressante dans la mesure où
elle nous permet de clarifier la conception que l’on a de la communauté politique et de l’Etat :
c’est en effet en fonction de ces conceptions que l’on peut décider s’ils ont, oui ou non, droit de
vie ou de mort sur leurs citoyens.
Le moment où des argumentations contre la peine de mort commencent à apparaître est
particulièrement intéressant puisque vont aussi apparaître, en réponse, des justifications de la
peine de mort. Celles-ci vont devoir répondre à l’argument suivant lequel la peine de mort est
illogique, contraire à la raison. C’est ce type d’argumentation que produit ici Hegel. Il soutient en
effet que l’Etat a non seulement le droit, mais aussi une sorte de devoir d’infliger la peine de mort,
dans la mesure où c’est la seule manière d’honorer le criminel comme un être pleinement
rationnel.
Le texte comporte deux moments. Dans un premier temps, Hegel présente la thèse de
Beccaria et sa justification : l’Etat n’a pas le droit d’infliger la peine de mort car le contrat social
qui le fonde contient la préservation de la vie des individus (ligne 1-4, « Comme on le sait bien …
admettre le contraire. »). Dans un second temps, il va critiquer cette thèse (ligne 5 « Seulement » -
fin du texte). Cette critique va comporter trois moments : il va d’abord critiquer la justification que
donne Beccaria à sa thèse (ligne 5-9 « Seulement … leur sacrifice. »). Il montre ainsi qu’il est
infondé d’affirmer que l’Etat n’a pas le droit d’infliger la peine de mort. Il va ensuite indiquer quels
sont les deux critères à partir desquels l’Etat doit décider de la peine infligée à un individu : le
concept et l’action du crime (ligne 9-16, « — De surcroît… honoré comme un être rationnel. »).
L’Etat doit exiger le sacrifice de ce que le criminel lui a pris (juger en fonction du concept du
crime) et honorer le criminel en tant qu’être-rationnel donc lui appliquer la loi que le criminel a luimême
instaurée, par son action (juger en fonction de l’action du crime). Chacun de ces critères
donne donc un argument en faveur de la peine de mort. Dans un troisième temps, il disqualifie
définitivement la position abolitionniste (contraire à la peine de mort) en montrant que les
conceptions de la peine qui sont mobilisées pour critiquer la peine de mort ne permettent pas de
rendre honneur à l’être-rationnel du criminel (ligne 16, « — Cet honneur ne lui revient pas » …
fin.). On peut donc dégager la thèse, affirmée implicitement par Hegel dans ce texte : l’Etat a non
seulement le droit, mais le devoir, d’infliger la peine de mort.
Hegel
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