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Le critère organique du contrat administratif est-il encore pertinent?

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Par   •  29 Janvier 2022  •  Dissertation  •  2 520 Mots (11 Pages)  •  864 Vues

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Le critère organique du contrat administratif est-il encore pertinent

Dans son manuel de droit administratif, René Chapus, après avoir rappelé le principe selon lequel les contrats conclus entre personnes privées ne sont pas administratifs, ajoutait : « Il est difficile de savoir et de comprendre pourquoi. Mais la jurisprudence est certaine, insensible aux objections et abondamment illustrée ». Ainsi, le critère organique nécessaire en principe afin de qualifier un contrat d’administratif est remis en question par la doctrine.

L’Administration, pour satisfaire l’intérêt des administrés, assure des activités d’intérêt général, autrement dit des missions de service public. Elle est soumise à un droit propre, le droit administratif. Pour accomplir ses missions, l’Administration dispose de deux outils principaux. Les actes administratifs unilatéraux, d’une part, et les contrats administratifs, d’autre part. Les actes administratifs unilatéraux sont des actes juridiques par lesquels l’Administration modifie ou refuse de modifier l’ordonnancement juridique, en édictant de nouvelles règles juridiques créant des droits et obligations ou modifiant des normes existantes. Ces actes sont pris unilatéralement et ne requièrent donc pas le consentement des administrés. En s’imposant aux administrés, ils traduisent l’existence de prérogatives de puissance publique et souligne l’exorbitance du droit administratif. Cela différencie l’acte administratif unilatéral du contrat, consenti par les parties. L’acte administratif unilatéral est propre au droit public, contrairement au contrat, qui existe en droit privé. Les contrats passés par l’Administration sont de deux sortes. Certains sont assimilés aux contrats conclus entre particulier et sont soumis au droit privé. Leur contentieux relève alors du juge judiciaire. D’autres contrats sont régis par des règles spécifiques et seront tranchés par le juge administratif en cas de litige. Ces contrats sont appelés contrats administratifs. Les contrats administratifs sont soumis à un régime particulier dérogeant au régime de droit commun habituellement appliqué aux contrats. Contrairement aux actes administratifs unilatéraux, les contrats administratifs ne s’imposent pas aux cocontractants et supposent la volonté des parties. Ce faisant, l’Administration n’agit pas de façon autoritaire mais recourt au dialogue et à la négociation. L’Administration contractante dispose cependant de prérogatives particulières dont ne dispose pas en principe les particuliers dans le cadre de leur rapport juridique réciproque.

Pour être administratif, un contrat, s’il n’est pas qualifié comme tel par le législateur, doit réunir un critère organique et un critère matériel alternatif. Ainsi, l’un des cocontractants au moins, pour satisfaire le critère organique, doit être une personne publique en principe c’est-à-dire l’Etat, une collectivité territoriale, un établissement public notamment. Pour remplir le critère matériel, le contrat doit également porter sur une mission de service public ou contenir une clause exorbitante de droit commun. Le critère organique a revêtu un caractère absolu pendant longtemps en raison de sa simplicité. Toutefois, il suscite actuellement des débats. En effet, la jurisprudence a progressivement évolué en raison de l’intervention croissante des personnes privées dans l’action administrative. Ainsi, de plus en plus de contrats sont qualifiés d’administratifs alors même qu’ils sont conclus par des personnes de droit privé, faisant ainsi véritablement entorse au critère organique.

Ainsi, il s’agit de se demander si le critère organique, nécessaire en principe pour qualifier un contrat d’administratif, devrait être abandonné.

D’une part, il s’agira de s’intéresser au critère organique, qui garde une place importante dans la qualification d’un contrat administratif, malgré un déclin relatif lié à l’importance du critère matériel (I). D’autre part, il s’agira de s’intéresser aux nombreuses exceptions jurisprudentielles et à la pensée de la doctrine, remettant un cause le critère organique (II).

  1. Un critère organique, essence de la qualification d’un contrat administratif, en déclin relatif

Le critère organique, autrefois absolu, a été retenu par le législateur dans son Code de la commande public, adopté en 2018 (A). Un contrat, dans le silence des textes, est présumé administratif dès lors qu’il est conclu entre des personnes publiques. Toutefois, cette présomption est réfragable, fragilisant de ce fait le critère organique (B).

  1. Un critère organique retenu par le législateur

En 2018, un Code de la commande publique est entré en vigueur. Dans celui-ci le législateur a souligné l’importance du critère organique.

Tout d’abord, concernant les marchés publics, définis comme des « contrats conclus par un ou plusieurs acheteurs soumis au présent code avec un ou plusieurs opérateurs économiques pour répondre à leur besoin en matière de travaux, de fourniture ou de service, en contrepartie d’un prix ou de tout équivalent » par l’article L111-1 du Code de la commande publique, il est précisé que seuls les marchés publics qui sont passés par des personnes morales de droit public sont des contrats administratifs. Ainsi, si les acheteurs peuvent aussi bien être des personnes publiques que privées, seules les contrats conclus entre personnes publiques sont administratifs, selon l’article L6 dudit code.

De même, comme en matière de marché public, les contrats de concession, que l’article 1121-1 du Code de la commande public définit comme un « contrat par lequel une ou plusieurs autorités concédantes soumises au présent code confient l'exécution de travaux ou la gestion d’un service à un ou plusieurs opérateurs économiques à qui est transféré un risque lié à l’exploitation de l’ouvrage ou du service en contrepartie soit du droit d’exploiter l’ouvrage ou le service qui fait l’objet du contrat, soit de ce droit assorti d’un prix », seront administratifs uniquement s’ils sont passés par des personnes publiques. Les autorités concédantes peuvent être des personnes publiques ou privées mais seuls les contrats de concession passés par des personnes morales de droit public sont des contrats administratifs.

Ainsi, le législateur respecte le critère organique dans son nouveau Code de la commande publique, en l’exigeant pour qualifier un contrat d’administratif.

 Le législateur retient ainsi un critère organique dans la qualification de certains contrats. Faute de texte, la jurisprudence a instauré une présomption du caractère admiratif d’un contrat passé entre deux personnes de droit public, présomption réfragable.

  1. La présomption traditionnelle limitée du caractère administratif d’un contrat passé entre deux personnes de droit public

Afin de permettre au critère organique de garder une place décisive dans la qualification d’un contrat à la suite de l’apparition des critères matériels, les contrats administratifs passés entre personnes publiques bénéficient d’un caractère administratif présumé. Cette solution a été posée par un arrêt du Tribunal des conflits de 1983, Union des assurances de Paris. Cet arrêt est relatif à contrat passé entre un établissement public chargé de la gestion d’un navire océanographique et l’Etat. Ainsi, en énonçant qu’un « contrat conclu entre deux personnes publiques revêt en principe un caractère administratif impliquant la compétence des juridictions administratives pour connaitre des litiges portant sur les manquements aux obligations en découlant », le Tribunal des conflits pose le principe de la présomption du caractère administratif dès lors que le caractère organique est satisfait et donne compétence au juge administratif pour connaitre des litiges portant sur de tels contrats administratifs. Cette solution est toutefois composite, puisque le Tribunal des conflits admet le caractère réfragable d’une telle présomption en ajoutant : « sauf dans les cas où eu égard à son objet il ne fait naître entre les partis que des rapports de droit privé ». Ainsi, étaient par exemple de droit privé les contrats d’abonnement d’électricité et de gaz liant les communes à EDF et GDF avant que ces derniers ne deviennent des personnes privées.

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