Les Critères Jurisprudentiels Du Contrat Administratif Sont-ils Encore Utiles ?
Dissertations Gratuits : Les Critères Jurisprudentiels Du Contrat Administratif Sont-ils Encore Utiles ?. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Max56 • 4 Mai 2014 • 2 922 Mots (12 Pages) • 2 767 Vues
Dissertation : « Les critères jurisprudentiels du contrat administratif sont-ils encore utiles ? »
Selon Édouard Laferrière (vice-président du Conseil d’État de 1886 à 1898), dans son Traité de la juridiction administrative et des recours contentieux, « La matière des contrats est peut-être celle où les règles de compétence sont les plus complexes ». Ces règles sont liées en grande partie à la nature du contrat, à savoir son caractère privé ou administratif. Ainsi, il a fallu que la jurisprudence mette en place des critères pour déterminer la nature du contrat afin de connaître la juridiction (judiciaire ou administrative) compétente en cas de litige. Néanmoins, ces critères sont très complexes et cela rejaillit donc sur les règles de compétence.
Le contrat administratif constitue avec l'acte administratif unilatéral l’un des deux moyens d’action de l’administration. On peut le définir comme un « contrat dont, en principe, l'une des parties est une personne publique et dont la connaissance appartient à la juridiction administrative soit en vertu d'une attribution légale de compétence, soit parce qu'ils portent sur l'exécution même d'un service public ou comportent une clause exorbitante du droit commun » (Vocabulaire juridique, G. Cornu). On distingue donc les contrats de droit privé relevant du droit privé et de la compétence du juge judiciaire et les contrats administratifs soumis à des règles spécifiques et dont les litiges relèvent du juge administratif.
Le phénomène contractuel, dans la sphère d'activités publiques, est ancien. Ainsi, dès le XVIème siècle, l’État français passa des conventions avec des particuliers pour la construction et la gestion des canaux. Aujourd’hui, le recours au contrat se développe dans l'action de l'administration même si elle y recourt encore de manière relativement marginale. En effet, le contrat présente des avantages. Lorsque l'administration souhaite intervenir dans la vie économique, elle veut s'adapter et utiliser les instruments habituels dont le contrat. En outre, il permet à l'administration de sembler être sur le même pied d'égalité que son cocontractant car le contrat est avant tout un accord de volontés entre deux parties. Enfin, l'administration pense y gagner en efficacité parce que le contractant est plus tenté de respecter ses engagements. Ainsi, dans une conception renouvelée de l'usage du pouvoir, le contrat permet de le légitimer en négociant les obligations que l'administration entend imposer. C'est dans ce même mouvement que le juge administratif a consacré, dans un arrêt Société Borg Warner du Conseil d’État du 28 janvier 1998, la liberté contractuelle des personnes publiques. Cependant, cette liberté n'est pas absolue car des contraintes spécifiques pèsent sur l'administration et notamment la réalisation de l'intérêt général. Par conséquent, l'utilisation du contrat par l'administration peut présenter des inconvénients. Il peut tout d'abord compromettre cet intérêt général car le contrat nécessite des concessions et cela pourrait amener l'administration a en faire sur l'intérêt général. Ensuite, le contrat peut être un facteur d'éventuelles inégalités entre les individus. C'est pourquoi le contrat est impossible ds certains secteurs comme la police administrative ou l'exercice du pouvoir réglementaire : l'administration ne peut que recourir à des actes unilatéraux.
Le phénomène contractuel prenant de plus en plus d'ampleur, la jurisprudence a dû identifier les contrats ayant un caractère administratif. Elle a eu pour cela recours à des critères qui sont, à l'instar du faisceau d'indice, une technique de qualification jurisprudentielle permettant de différencier les contrats de l'administration (pouvant être de droit privé) des contrats administratifs. Les critères de l'administrativité des contrats sont donc jurisprudentiels pour la plupart mais quelques textes confèrent un caractère administratif à certains contrats. La loi du 28 pluviôse an VIII dispose que les contrats relatifs à des travaux publics sont administratifs. Même si elle a été abrogée en 2006, le juge administratif se fonde toujours dessus. De plus, selon l'article L2331-1 du Code Général de la Propriété des Personnes Publiques, les contrats portant occupation du domaine public sont administratifs. Enfin, une loi du 11 décembre 2001 est venue généraliser l'administrativité des contrats passés en application du Code des marchés publics. Pour les autres contrats, c'est à la jurisprudence qu'il est revenu de tracer la ligne de partage.
Cette ligne de partage a été élaborée par la jurisprudence suivant deux critères cumulatifs d'identification. Le premier, critère organique, exige la présence d'une personne publique au contrat mais il fait l'objet de variantes. Le second, critère matériel, renvoie au rattachement du contrat à l'activité publique. Néanmoins, ces éléments de qualification du contrat en contrat administratif se sont diversifiés au cours du temps jusqu'à devenir très complexes. Ils sont aujourd'hui plus des indices que de véritables critères tant ils sont difficiles à manier. D’où des politiques de simplification, par la jurisprudence qui crée des blocs de compétences jurisprudentiels et par le législateur qui crée des blocs législatifs.
Ainsi, pour s'interroger sur l'actuelle utilité des critères jurisprudentiels du contrat administratif, il convient de se demander de quelle manière la jurisprudence détermine ceux des contrats noués par l’administration qui présentent un caractère administratif et en quoi cette identification s'est complexifiée au fil du temps pour devenir de plus en plus floue.
Ainsi, pour qu'un contrat soit administratif, la jurisprudence exige deux conditions cumulatives. Il s'agira donc de se pencher sur un critère organique contesté (I), avant d'étudier des critères matériels diversifiés (II).
I) Un critère organique contesté
Le principe est naturellement qu'un contrat ne peut être administratif que si une personne publique en est partie (A). Néanmoins, la jurisprudence a pu remettre en cause partiellement cette exigence (B).
A) La nécessaire présence d'une personne publique
En principe, pour qu'il y ait caractère administratif d'un contrat, il faut au moins une personne publique signataire, que le
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