La distinction entre règle juridique, règle morale et règle religieuse
Dissertation : La distinction entre règle juridique, règle morale et règle religieuse. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Aldéa Segond • 13 Octobre 2015 • Dissertation • 1 938 Mots (8 Pages) • 9 087 Vues
Le professeur Gérard Cornu dit : « Le précepte juridique n'est ni une règle de salut, ni une loi d'amour : c'est un facteur d'ordre, un régulateur de la vie sociale".
Cornu établit ainsi une distinction entre la règle juridique, qui conduis les rapports des Hommes entre eux et la vie en société, les règles religieuses, qui codifient le salut de l'être humain envers Dieu et cherchent à assurer la perfection de l’Homme, et enfin les règles morales, qui elles, relèvent du fort intérieur de chacun.
Cependant, on pourrait aussi considérer que droit et morale forme une seule notion, et que la religion, avec ses impératifs moraux, absorbe le droit tout entier. Napoléon Ier, dans le Mémorial de Sainte-Hélène, affirmait d’ailleurs que “la morale publique est le complément naturel de toutes les lois” et, dans l’ouvrage Allocution aux curés de Milan qu’il n’y a que « la religion qui donne à l’Etat un appui ferme et durable ». En effet, si l’on remonte à la naissance du droit on remarque que la dissociation de la règle religieuse et de la règle de droit s’est opérée très lentement et que celle ci à longtemps gardé l’empreinte de ses origines. Ainsi on comprends pourquoi de très nombreuses règles de droit sont empruntées à la morale.
On se demande alors qu’est-ce qui différencie la règle juridique des règles morales et religieuses et s’il n’arrive pas parfois que ces dernières tendent à se confondre avec la règle juridique ?
Bien qu'ils paraissent faciles à définir, les rapports entre les règles de droit, de religion, et de morale sont complexes. En effet, s'il y a bel et bien une distinction entre ces différentes règles (I) on se rends compte qu’un chevauchement entre les trois existent ce qui prouve que la limite de ce discernement est bien plus subtil qu’il ne semble (II).
I°/ Ce qui distingue les règles juridiques, morales et religieuses
Nous verrons dans un premier temps ce qui sépare la règle de droit de la règle morale (A) et deuxièmement ce qui distingue la règle juridique de la règle religieuse (B).
- Distinction entre règle de droit et règle morale
- Les règles morales sont dictées par la conscience. Elles sont des valeurs supérieures qui s’imposent à tous. Elles relèvent du fort intérieur et de l'épanouissement des consciences de chacun
- Elles chevauchent les règles religieuses puisque tout comme la religion elles visent à la perfection morale de l’être humain
- Elles sont sanctionnés uniquement par le sentiment de culpabilité de chacun. La morale est donc autonome.
- Une règle de droit se caractérise par trois éléments. Elle est générale ; abstraite et surtout obligatoire. La règle de droit doit avoir un effet normatif avec un effet contraignant. Elle peut imposer une règle de conduite mais aussi un comportement positif, une obligation, une interdiction ou des permissions.
- Les règles morales ne sont pas des règles de droit puisqu’elles ne sont pas obligatoires et n’ont donc pas de caractère contraignant. Elles ne sont pas sanctionnés par l’ordre public mais uniquement par la conscience de l’individu.
- Contrairement à la règle juridique qui est universelle, et s’applique à un ensemble d’individus (Article 8 du Code Civil: “Tout français jouira des droits civils” et Article 9 du Code civil: “Chacun a droit au respect de sa vie privée”), la morale est une règle intérieure qui procède de la personne même.
- La règle juridique en plus d’être extérieure, procède de l’autorité publique et met en cause au minimum deux personnes alors que la règle morale peut être un combat intérieur avec sa propre conscience.
- On a des règles morales de conduite qui peuvent être produite par la société comme par exemple la règle de bienséance et de politesse. Celles ci peuvent avoir un caractère contraignant au niveau relationnel mais ne seront jamais punis par la loi. La morale est donc une loi interne dicter par sa propre conscience (idée soutenue par Kant). La règle juridique ne cherche pas un comportement bon comme la règle morale mais un comportement adapté à l’organisation de notre société.
- On a un nombre de règle de droit qui ne sont pas moral car le but de la règle de droit est de favoriser un certains nombres de rapports sociaux qui n’ont pas forcément de but moraux (Exemple = Code de la route).
- Parfois les règles juridiques peuvent avoir un fondement moral mais ce n’est pas ça qui en fait une règle de droit, c’est son caractère contraignant qui en fait une règle de droit.
- Exemple de décisions de justice qui n’ont aucun lien avec la règle morale : L’arrêt de l’ Assemblée plénière de la Cour de cassation du 29 octobre 2004. Un testateur décide de léguer une partie de ses biens à sa maitresse dans le cas d’un adultère. La veuve du testateur ainsi que sa fille ont donc souhaité annulé ce legs mais même si ce contrat est contraire aux bonnes moeurs ce n’est en aucun cas la violation d’une règle juridique.
- Distinction entre règle de droit et règle religieuse
- Les règles religieuses veillent à assurer la perfection de l’Homme et son salut envers Dieu
- Elles concernent l'individu et comportent des commandements tout comme la règle juridique mais ces commandements ne sont pas les mêmes. Ceux en rapport avec la religion ont une valeur mystique qui ne veille pas forcément au bon fonctionnement d’une société.
- Avant la révolution française, les règles de droit civil et les règles religieuses se confondaient. En effet, le pouvoir politique tirait sa légitimité d’un droit divin.
- La situation a changé avec la révolution française. On voulait que la règle politique devienne la volonté du peuple et en 1804, a été mise en place l’application de règles civiles. La véritable coupure se fait le 9 Décembre 1905, où on annonce clairement la séparation de l'Église et de l’ État qui amène l’un des grands concepts de la République d’aujourd’hui : la laïcité.
- La laïcité est le principe selon lequel on ne doit pas favoriser ou défavoriser la propagation de croyance ou de règles de vie en société d’aucune religion.
- Se soumettent à la règle religieuse ceux qui font le choix délibéré de se soumettre a une religion
- L’Etat ne punit pas les gens qui ne pratiquent pas la règle religieuse
- La règle religieuse n’a donc pas le caractère contraignant nécessaire à une règle pour devenir une règle de droit
- Il n’y a donc pas de sanctions par l’ordre public pour le non respect des règles religieuses.
- Exemple = L’Arrêt Babilou → une crèche privé stipule dans son règlement intérieur qu’il est interdit de porter un signe religieux ainsi, les personnes portant le voile ont été licencié. Une de ces personnes a porté plainte contre la crèche pour licenciement abusif. Elle a gagné car cela a été considéré comme une discrimination puisque le port de signe religieux ne concerne que les entreprises administratives et non les entreprises privées. Cette affaire est cependant revenue à la cours d’appel puis à la cours de cassation dans un arrêt du 25 Juin 2014 qui considéra que la nature de la tache à accomplir de la crèche justifiait le principe de laïcité soutenue par la crèche. → la religion ne rentre pas dans la règle de droit
Cependant, même si ces règles évoluent de façon distinctes, le droit prend en compte et reçoit les règles religieuses et morales.
II°/ Les limites de cette distinction
La distinction entre droit, morale et religion n'est pas absolue mais peut être perçue comme relative. En effet, ces trois domaines, bien que différents, demeurent similaires au niveau de leur nature puisqu’ils possède le caractère général et impersonnel qui est relatif à toute règle (A). Par ailleurs, des collaborations entre ces règles sont aussi à souligner (B).
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