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Cour administrative d’appel de Bordeaux - lecture du mardi 11 février 2014 N°12BX02011

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Par   •  26 Novembre 2016  •  Commentaire d'arrêt  •  3 158 Mots (13 Pages)  •  1 529 Vues

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Commentaire d’arrêt :

        Pendant longtemps, le principe qui dominait en droit administratif était celui de l’irresponsabilité de la puissance publique. Pour considérer une personne publique responsable, il fallait soit qu’elle se trouve dans une situation contractuelle, soit qu’un texte spécial prévoit la responsabilité. C’est à partir de la seconde moitié du XIXème siècle que se dessine une évolution de l’administration, on admet à partir de l’arrêt Blanco, 8 février 1873, qu’une puissance publique peut être reconnu responsable des dommages qu’elle a causés. Commencera ensuite à se développer au début du XXème siècle la notion de responsabilité sans faute de l’administration, on a une évolution allant dans un sens de facilitation de la réparation pour les victimes, mais qu’en est-il aujourd’hui ?

Le 23 novembre 1989, la SARL compagnie de transport maritime avait conclu une convention avec le département de la Guadeloupe en vue de l’exploitation du transport de passagers sur les liaisons entre les ports. Par la suite, la SARL compagnie de transport maritime et M.A. ont subi un préjudice du fait de l’arrêté du 10 décembre 1999 du président du conseil général du département de la Guadeloupe. En effet, par cet arrêté, et en vertu du l’article R. 351-2 du code des ports maritimes, et en particulier en ce qui concerne la police des ports maritimes, le président du conseil général de la Guadeloupe a fixé les créneaux horaires de départ de l’ensemble de « vedettes » assurant la liaison des ports, et a privilégié une de ces vedettes en particulier. Or, cet arrêt a par la suite été annulé par un jugement du tribunal administratif de Basse Terre le 19 juin 2003, décision confirmée par la suite par la cour d’appel administrative de Bordeaux du 6 juin 2006. Malgré l’arrêté de 1999, la SARL compagnie de transport maritime, et M.A ont continué de faire partir au mépris des dispositions de cet arrêté plusieurs vedettes dans chacun de leurs anciens créneaux horaires. D’autre part, sur le fondement de l’arrêté du 10 novembre 1999, l’ordonnance du 10 mai 2000 les condamnes à la demande d’armateurs qui s’estimaient lésés par leur comportement à ne plus utiliser l’appontement de Trois-Rivières à des fins commerciales, et à verser des astreintes. Cette condamnation a été confirmée par arrêt du 7 mai 2001 de la cour d’appel de Basse-Terre, ils ont également été condamnés à de lourdes astreintes pour concurrence déloyale par ordonnance du tribunal mixte de commerce de Pointe à pitre du 31 décembre 2000, et par ordonnance du 18 janvier 2001.

En première instance, la SARL compagnie de transport maritime et M.A. ont alors demandé au tribunal administratif de Basse-Terre, le 30 avril 2012 de condamner le département de la Guadeloupe à leur verser une indemnité en réparation du préjudice subi du fait de l’illégalité de l’arrêté du 10 novembre 1999. Déboutés de leur demande, ils demandent alors à la cour administrative d’appel de Bordeaux d’annuler le règlement rendu par le tribunal administratif de Basse-Terre, et de condamner le département de la Guadeloupe à leur verser une indemnité.

La cour d’appel a dû se demander si la responsabilité de l’administration peut être engagée pour une illégalité qu’elle a commise, alors même que le dommage découle exclusivement de la situation irrégulière dans laquelle la victime s’est elle-même placée.

La cour d’appel est venue préciser en évoquant tout d’abord le principe de la responsabilité pour faute que, si en principe, toute illégalité commise par l’administration constitue une faute susceptible d’engager sa responsabilité, pour autant qu’il en soit résulté un préjudice direct et certain, l’administration ne sera pas responsable de la faute de la victime.

La cour a par ailleurs jugé que la SARL compagnie de transport Maritime, et M.A ne sont pas fondés à  demander réparation des indemnités, des injonctions, et des astreintes prononcées à leur encontre, dès lors que les préjudices dont ils demandent réparation résultent exclusivement de la situation irrégulière dans laquelle ils se sont placés, en refusant délibérément de ne pas respecter l’arrêt du 10 décembre 1999, avant que celui-ci ne soit annulé par le tribunal administratif de Basse Terre le 19 juin 2003.

De plus, la cour précise que les victimes n’apportent à l’appui de cette demande d’indemnisation du préjudice résultant de la perte de valeur du patrimoine personnel de M.A, et de la détérioration de l’Etat de santé de ce dernier aucun élément qui permet de regarder ces préjudices comme présentant un lien direct de causalité avec l’illégalité de l’arrêt du 10 décembre 1999. La cour précise qu’ils ne sont ainsi pas fondés à demander, sur le fondement de la responsabilité pour faute la réparation des préjudices invoqués.

D’autre part, la cour évoque également le fondement de la responsabilité sans faute, et ainsi le fait que les victimes n’apportent pas la preuve d’un lien de causalité direct entre l’ensemble des préjudices qu’ils invoquent, et l’arrêt du 10 décembre 1999. Et qu’en se bornant à soutenir que cette mesure n’était pas justifiée, par le caractère regardé à tort comme privilégié de leur situation antérieure, résultant d’une convention passée avec le département de la Guadeloupe, les requérants n’établissaient pas qu’une atteinte excessive aurait été portée à l’équilibre financier, du fait de l’arrêté pris, dans l’exercice des attributions de police du port, du président du conseil général, et n’établissent pas non plus qu’ils auraient subi un préjudice excédant ceux que des tiers peuvent normalement supporter sans engendrer le versement d’une indemnité.

Ainsi, faute de prouver l’existence d’un préjudice anormal, ayant un lien de causalité directe avec l’arrêté du 10 décembre 1999, seul de nature à engager la responsabilité sans faute du département de la Guadeloupe à leur égard, les conclusions ne peuvent être que rejetées.

Les requérants n’étant pas fondés à se plaindre du rejet, de la demande faite au tribunal administratif de Basse-Terre, la demande en appel de la SARL compagnie de transport maritime, et de M.A est de ce fait rejetée le 11 février 2014, par la cour administrative d’appel de Bordeaux.

Il conviendra de voir dans un premier temps que l’engagement de la responsabilité de l’Etat selon le régime de responsabilité pour faute ne sera pas retenue, car aucune preuve de l’existence d’un lien de causalité entre le préjudice et le dommage n’est apportée (I), avant de voir que le juge n’appliquera pas non plus le régime de responsabilité sans faute, car les requérants en plus du fait qu’elle n’est pas aisée à démontrée, n’utilisent pas le bon fondement pour leur requête, entrainant le rejet de cette dernière, alors qu’un espoir leur aurait été laissé s’ils s’étaient bien fondés (II).

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