Loi du 21 mars 1884 - Loi Waldeck-Rousseau
Commentaire de texte : Loi du 21 mars 1884 - Loi Waldeck-Rousseau. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar XaaaXX • 15 Février 2019 • Commentaire de texte • 3 001 Mots (13 Pages) • 2 706 Vues
Loi du 21 mars 1884 sur la liberté syndicale.
Le XIXe siècle marque une avancée importante dans l’histoire du syndicalisme. La loi du 21 mars 1884, appelée également loi Waldeck-Rousseau, légalise le syndicalisme en France. Les syndicats sont des associations de personnes dont le but est de défendre les droits et les intérêts sociaux, économiques et professionnels de ses adhérents.
La IIIème République, désormais bien en place à la fin des années 1870, après la crise du 16 mai 1877 et le retrait des monarchistes, entame une série de réformes s’inscrivant dans la lignée du programme de Belleville prononcé par Léon Gambetta en 1869.
En effet, la Chambre des députés, après les élections législatives de 1876, devient majoritairement républicaine. Mais ce n’est qu’en 1879, suite à la démission de Patrice de Mac-Mahon, qu’un premier vrai président de la République est élu : Jules Grévy.
Jules Grévy (1807-1891) est un homme de droit, élu député du Jura en 1863 et 1869, il fut à la tête de l’opposition républicaine. Proche de Léon Gambetta et d’Adolphe Thiers, il s’est opposé à la déclaration de guerre de 1870. Président de l’Assemblée nationale (regroupement de la Chambre des députés et du Sénat sous la IIIème République) de 1871-1873, puis de la Chambre des députés à partir de 1876, il succède donc au Maréchal de Mac-Mahon en 1879. Sous sa présidence, se dessinent les contours d’un régime d’Assemblée. Un régime affaiblissant les pouvoirs de l’Exécutif au profit du Législatif.
Durant cette période, les différents gouvernements républicains, sous la présidence de Jules Grévy, ont voté une série de lois et de mesures sociales pour le pays, notamment la loi sur la liberté de la presse de 1881 ainsi que la loi Ferry, établissant la gratuité de l’enseignement primaire public, en 1881 également ou encore la loi Waldeck-Rousseau, légalisant la création de syndicats professionnels, datée du 21 mars 1884.
Pierre Marie René Waldeck-Rousseau (1846-1904) est, en 1884, ministre de l’Intérieur du gouvernement de Jules Ferry, homme politique proche de Léon Gambetta qui fut ministre de l’instruction publique avant de devenir président du Conseil en 1881 puis en 1883. Pierre Waldeck-Rousseau, juriste, avocat et homme politique, fut déjà ministre de l’Intérieur en 1882 dans le gouvernement de Léon Gambetta. Il deviendra par la suite, le 22 juin 1899, président du Conseil, gouvernement le plus long de la IIIème République. Et bien que cette loi porte son nom, il semblerait qu’il n’ait pas participé à son élaboration.
Ce projet de loi semble dater de 1876 avec la proposition d’Édouard Lockroy. Une proposition de loi « relative à la reconnaissance légale, à l’organisation et au fonctionnement des chambres syndicales, patronales et ouvrières ». Pourtant il aura fallu plusieurs années avant que le texte de loi ne soit véritablement promulgué en 1884, après de longues délibérations. Un projet de loi a, en effet, été déposé le 22 novembre 1880, sur fond de contestation sociale de plus en plus importante. L’immense masse ouvrière estimait n’avoir aucun moyen de défendre ses intérêts.
La grande grève des mineurs d’Anzin, de février 1884, fut l’un des facteurs importants quant à la promulgation de la loi. Ce conflit éclata lorsque la Compagnie imposa brusquement un changement dans l’organisation du travail des mineurs. La grève causa de nombreuses manifestations violentes et de sanglantes échauffourées entre mineurs et gendarmes, ainsi que le renvoi de plusieurs centaines de mineurs. Elle inspira, de par sa portée nationale, à Emile Zola, son oeuvre Germinal.
Dès lors, nous pouvons nous demander en quoi cette loi marque une avancée sociale importante en légalisant la création d’un nouvel acteur dans la vie politique, sociale et économique du pays.
Afin de répondre au mieux à cette question, nous analyserons dans une première partie la légalisation des syndicats professionnels. Ensuite, nous verrons que le gouvernement, malgré cette légalisation, compte garder le contrôle. Enfin, nous étudierons les actions possibles définies par la loi de l’action syndicale.
- Une avancée sociale.
- Abrogation des lois restrictives.
Dès l’article premier du texte de loi, nous pouvons voir la volonté du gouvernement d’abroger certaines lois antérieures. « Sont abrogées la loi du 14-17 juin 1791 et l’article 416 du Code pénal ».
La loi du 14-17 juin 1791 est appelée « loi Le Chapelier », du nom de son instigateur, Isaac Le Chapelier. Elle interdisait la création de nouvelles organisations ouvrières, notamment les corporations de métiers et les coalitions paysannes et ouvrières. Elle faisait écho au décret Allarde (1791). En interdisant les corporations et les associations, l’État interdisait à quiconque d’inspirer aux citoyens un intérêt intermédiaire, de les séparer de la chose publique par un esprit de corporation. Seuls l’intérêt de chaque individu et l’intérêt général comptaient. Défendre ses intérêts n’était donc pas considéré comme un droit collectif.
L’article 416 du Code pénal disait : « seront punis… tous ouvriers, patrons et entrepreneurs d’ouvrage, qui, à l’aide d’amendes, défenses, proscriptions, interdictions, prononcés par suite d’un plan concerté auront porté atteinte au libre exercice de l’industrie ou du travail ». L’abrogation de cet article s’imposait pour donner aux syndicats professionnels les moyens d’intervenir utilement dans la lutte entre le capital et le travail.
Ces deux lois furent abrogées car elles ne correspondaient pas à la volonté syndicale qui se réclamait à cette époque. En effet, comment se défendre sans pouvoir se regrouper et sans se donner les moyens de le faire. Toutefois, la loi Waldeck-Rousseau ne fait que compléter d’autres lois qui abolissaient ces contraintes, telle la loi Ollivier du 25 mars 1864 qui abolit le délit de coalition sans pour autant supprimer le délit d’entrave à la liberté de travail. Prémices du droit de grève, sous certaines conditions.
A ces suppressions de lois, s’ajoutent des lois et articles qui ne pouvaient être appliqués aux syndicats professionnels. « Les articles 291, 292, 293, 294 du Code pénal et la loi du 18 avril 1834 ne sont pas applicables aux syndicats professionnels ».
De fait, l’ensemble de ces quatre articles interdisaient toutes associations non autorisées de plus de 20 personnes (interdiction, dissolution, sanction).
La loi du 18 avril 1834, elle aussi, était relative aux associations de plus de 20 personnes.
Il était donc impossible au gouvernement de légaliser les syndicats professionnels, s’ils ne disposaient pas de la faculté de pouvoir se réunir.
- Légalisation du syndicalisme.
Avec l’article premier qui supprime certaines lois restrictives, le gouvernement met en place sa politique de légalisation des syndicats professionnels. L’article 2 du texte de loi est un contre-pied à la loi Le Chapelier. Ce qui était interdit ne l’est désormais plus. « Les syndicats ou associations professionnelles, […], pourront se constituer librement sans l’autorisation du gouvernement ». Dès lors, les syndicats professionnels ne peuvent plus être considérés comme illégaux.
La définition de ce que doit être un syndicat professionnel dans le droit est également déterminée. L’article 3 fixe juridiquement l’objet et la raison de ces syndicats. « Les syndicats professionnels ont exclusivement pour objet l’étude et la défense des intérêts économiques, industriels, commerciaux et agricoles ». L’article 3 donne une définition volontairement corporatiste du syndicalisme. Cette loi assure donc un rôle de défense pour les travailleurs. En effet, la loi s’inscrit logiquement dans le contexte de l’époque, d’autant que les ouvriers prennent de plus en plus conscience de leur condition.
Avec ces premiers articles, la loi relative à la création des syndicats professionnels commence à prendre forme. Le rassemblement de personnes dans un syndicat professionnel n’est plus reconnu comme illégal.
- Un droit encadré.
Le gouvernement, face à l’ampleur de la contestation sociale de l’époque (cf. les différentes grèves), mit en place cette loi relativement vite afin d’essayer d’apaiser les choses. Toutefois, et toujours pour maintenir l’ordre, le gouvernement a voulu garder un certain contrôle de ces syndicats professionnels. En effet, celui-ci veut limiter leur influence.
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