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Le juge constitutionnel, créateur de droit constitutionnel ?

Dissertation : Le juge constitutionnel, créateur de droit constitutionnel ?. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  7 Octobre 2023  •  Dissertation  •  2 294 Mots (10 Pages)  •  284 Vues

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Dissertation : Le juge constitutionnel, créateur de droit constitutionnel ?

« Le pouvoir normatif de tout juge par le biais de l’interprétation est une réalité juridique et inévitable ». Cette citation est extrait d’un entretien du Professeur J.Roux accordé à Eurolettre, pose le principe selon lequel n’importe quel juge est créateur de normes. Pourtant, cette idée reste discutable, notamment car il s’agit ici d’un juge constitutionnel, qui n’a pas, à l’origine, la même fonction que n’importe quel autre juge.

Le juge constitutionnel a pour vocation d’apprécier la conformité de la loi à la Constitution, norme suprême à laquelle, sont subordonnés tous les actes normatifs de l’état. Le conseil constitutionnel a été institué par la Constitution de la Ve République, en date du 4 octobre 1958. Il peut contrôler la loi avant sa promulgation ou après, notamment grâce à la question prioritaire de constitutionnalité. Ensuite, le droit constitutionnel est la partie du droit public qui traite des règles relatives à l’organisation et au fonctionnement de l’État, du gouvernement, du parlement, des juridictions et des institutions publiques. La Constitution écrite étant la norme suprême, la colonne vertébrale du système étatique, toutes les normes inférieures lui sont largement subordonnées. Le Conseil Constitutionnel, a vocation à interpréter la conformité de la loi à la constitution, il joue un rôle de vérificateur de ce que la norme supérieure soit respectée. Il parait alors évident que son rôle ne peut être celui d’un créateur de droit constitutionnel, car il n’a qu’un rôle de vérification de la conformité, le droit constitutionnel étant issu de la constitution. Mais néanmoins, la constitution ne peut pas se permettre d’être trop précise sauf à venir brider le pouvoir du législateur, et à paralyser le fonctionnement de l’état. Enfin, il convient de se demander ce que signifie « créateur de droit ». Naturellement, cela ne peut pas s’entendre comme la simple procédure législative ou réglementaire mise en oeuvre par le Parlement ou le Gouvernement, auquel cas il serait difficile d’affirmer que le juge constitutionnel y participe. Il faut donc voir cette expression comme un ensemble plus large, comme une masse de dispositions.

Il serait intéressant de se demander dans quelles mesures le juge constitutionnel crée-t-il du droit, et plus précisément du droit constitutionnel ? Bien que ce pouvoir créateur du juge constitutionnel semble indiscutable, il faut tout de même le nuancer avec certaines limites.

I- Le pouvoir créateur du juge constitutionnel dans les faits

A- L’appropriation progressive du pouvoir normatif :

Le juge constitutionnel a progressivement obtenu un pouvoir normatif, mais à l’origine, sa fonction n’était pas celle-ci. Ce pouvoir a bien sûr était inauguré par la décision « liberté d’association ». Par cette célèbre décision du 16 juillet 1971 relative à la liberté d’association, le Conseil Constitutionnel a largement étendu sa compétence. Il a intégré à la Constitution, son préambule, et les textes auxquels il renvoie, soient la Déclaration des droits de l’homme de 1789 et le préambule de la Constitution de 1946. Ces textes forment donc le bloc de constitutionnalité et se trouvent au sommet de la hiérarchie des normes de Hans Kelsen. De sorte qu’il peut désormais apprécier la conformité des lois au préambule de la constitution de 1958 et par une cascade de renvoi, la déclaration des droits de l’homme et du citoyen, le préambule de la constitution de 1946 ainsi que les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République et depuis la loi constitutionnelle du 1er mars 2005 la charte de l’environnement de 2004 ainsi que le document d’orientation de l’accord de Nouméa de 1998. Ce gonflement des normes de référence opère une transformation qualitative de la nature du contrôle du Conseil. Il s’agit d’un véritable coup d’état jurisprudentiel. Le juge constitutionnel s’attribuait indépendamment le contrôle des libertés publiques et droits fondamentaux que recensaient une grande partie les textes du préambule. Par son activité normative, il se positionnait alors comme « gardien des libertés fondamentales », et non plus comme simple outil de rationalisation du parlementarisme. Par la suite, un autre élément est venu accentuer son pouvoir normatif : la décision du 23 aout 1985. À l’occasion de cette décision intitulée « Nouvelle-Calédonie », le Conseil se permet de redéfinir la loi votée en assurant qu’elle n’exprime la volonté générale que dans le respect de la Constitution ». Et alors, que le Conseil Constitutionnel avait demandé la cassation partielle de la loi, le Président de la République décide de ne pas promulguer la loi, pourtant partiellement conforme. On voit donc l’impact des décision du Conseil Constitutionnel. Un tel impact ne peut être que créateur de droit. Une seule expiation s’impose : le contrôle de constitutionnalité des lois antérieures à la Constitution, qui ont été prises en théorie en application d’une volonté générale conforme aux normes constitutionnelles en vigueur à l’époque.

Bien qu’à l’origine le Conseil Constitutionnel est été créé afin de diminuer et de contrôler les limites abusives du Parlement, il a progressivement obtenu un pouvoir normatif, de création de droit, notamment constitutionnel.

B- La jurisprudence et l’interprétation, créatrices de droit :

Ce pouvoir créateur du juge constitutionnel s’affirme tout particulièrement avec ses interprétations et sa jurisprudence. Tout d’abord, le Conseil Constitutionnel va pouvoir mettre en place des réserves d’interprétation. Ces réserves sont exprimées dans le cadre du contrôle de constitutionnalité. Un spécialiste de cette question, Thierry Di Manno, en donne la définition suivante : « Par cette technique non prévue par les textes et purement prétorienne, le Conseil constitutionnel s’affranchit du carcan du schéma décisionnel binaire, pour agir directement sur la substance normative de la loi afin de la mettre en harmonie avec les exigences constitutionnelles ». Ainsi, le Conseil Constitutionnel, au lieu de déclarer une loi conforme ou non conforme à la Constitution, peut prononcer sa conformité dans le sens qu’il préconise. Ces réserves d’interprétations sont nécessairement créatrices de droit puisqu’en vertu de l’article 62 de la Constitution : « les décisions du Conseil constitutionnel ne sont susceptibles d’aucun

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