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La responsabilité du fait des lois: quel fondement?

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Par   •  20 Avril 2023  •  Dissertation  •  4 589 Mots (19 Pages)  •  542 Vues

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Séance 8 : La responsabilité administrative (sans faute)

Dissertation : La responsabilité du fait des lois: quel fondement ?

L'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen dispose que « la loi est l'expression de la volonté générale ». Il s'agit d'un acte de souveraineté, voulu par le peuple par le biais de ses représentants. Aujourd'hui, cette vision idyllique de la loi est dépassée et il se peut que la loi nuise à un individu. En effet, c’est par l'arrêt Société anonyme des produits laitiers "La Fleurette", de 1938, que le Conseil d'État a reconnu pour la première fois l'engagement de la responsabilité, sans faute, de l'État du fait des lois.

Selon l’arrêt du Conseil d’Etat « Madame Bleitrach » du 22 octobre 2010, il existe trois différents régimes de responsabilité administrative: la responsabilité pour faute (qui nécessite l’existence d’une faute, d’un dommage et d’un lien de causalité), la responsabilité sans faute et la responsabilité du fait de la méconnaissance des engagement internationaux.

Contrairement à la responsabilité pour faute, la responsabilité sans faute est une responsabilité pécuniaire des personnes publiques pour laquelle les victimes ont seulement à prouver le lien de causalité entre l’activité de l’administration et le dommage qu’elles ont subi. C’est une responsabilité englobant le simple fait pour l’administration d’exposer une victime à des risques anormaux (la responsabilité pour risque), où la victime n’a pas à établir la preuve de la faute de l’administration qui ne pourra pas s’exonérer en prouvant l’absence de faute de sa part, et la responsabilité du fait des lois, le cas où c’est une loi ou une décision légale qui cause le préjudice.

La responsabilité administrative est souvent comparée avec la responsabilité de droit civil : on retrouve les mêmes conditions afin d’obtenir l’indemnisation du préjudice, soit un fait générateur et un dommage reliés par un lien de causalité. Cependant, l’article 1240 du Code civil, relatif à ces conditions d’application, a toujours été perçu comme inapplicable à l’administration : alors que la responsabilité civile vise à répondre des dommages que l’on cause à autrui, la responsabilité administrative vise à sanctionner une faute de l’administration et demande une réparation de la part de l’Etat.

Le principe de responsabilité de l’administration est d’origine récente, pendant longtemps la puissance publique était considérée comme irresponsable. Il faut attendre la fin du 19ème siècle pour que le Tribunal des Conflits, dans son célèbre arrêt Blanco rendu en 1873, consacre la responsabilité de l’Etat pour les dommages causés à la suite de son action. S’opère ensuite une extension de cette responsabilité administrative à tous les domaines de l’action de la puissance publique et les hypothèses de sa mise en œuvre n’ont cessé de s’élargir suite à cet arrêt.

Puis, en 1895 s’opère une des innovations les plus importantes du droit administratif : Le juge administratif  reconnait que l’État est responsable des dommages subis par les personnes qu’il emploie en dehors de toute faute et prévoit l’indemnisation des accidents par le législateur (CE, Cames, 1895). C’est la naissance du premier régime de responsabilité administrative sans faute.

Il faut cependant attendre 1938 pour que naisse un second régime de responsabilité administrative sans faute : la responsabilité du fait des lois (CE, Société anonyme des produits laitiers "La Fleurette").  A partir de ce moment, L’Etat a dû veiller à certains principes essentiels à son fonctionnement, comme le principe d’égalité des citoyens devant les charges publiques, fondé sur le principe démocratique d’égalité devant la loi, qui doit être prioritairement respecté et imposé par l’Etat lui-même. C’est pour cela que l’Etat doit être tenu seul responsable du fait des lois dans l’hypothèse où l’égalité des citoyens devant les charges publiques serait rompue.

Alors que la jurisprudence autours de la responsabilité administrative était cohérente et unanime sur le fait qu’il s’agit d’un régime sans faute fondé sur le principe d’égalité devant les charges publiques, l’arrêt Gardedieu (CE, 8 février 2007), vient semer le trouble quant au fondement de cette responsabilité.  Consacre-t-il une responsabilité pour faute du législateur ?

Une partie de la doctrine était pour, dont René Chapus, pour qui cela était la conséquence classique du contrôle de conventionnalité de la loi : « apprécier une loi comme n’étant pas compatible avec une norme qui lui est supérieure, c’est en faire ressortir l’irrégularité […] c’est reconnaître que le législateur a commis une faute… ».

Il convient alors de se demander : quelles sont les conditions et les fondements d'engagements de la responsabilité de l'Etat du fait des lois ?

Ainsi la responsabilité du fait des lois pourra être envisagée avant tout comme un régime de responsabilité sans faute, fondé sur le principe d’égalité devant les charges publiques (I), mais avec comme exception le fait des lois contraires aux normes supérieures, qui nécessite la création d’un régime de responsabilité sui generis, extérieur à la notion de faute (II).

  1. La responsabilité du fait des lois : un régime de responsabilité sans faute fondé sur la rupture de l’égalité des citoyens devant le charges publiques

Le contentieux de la responsabilité administrative est lié au contentieux de juridicité sur un point : la violation d’une norme objective par l’administration peut constituer une faute entraînant un préjudice réparable.

En effet, l’administration peut causer certains dommages, même si son action est régulière et répond à l’intérêt général. Elle n’engage pas sa responsabilité pour les risques que son activité fait peser sur les administrés, mais elle engage un ou plusieurs administrés qui seront sacrifiés sur l’hôtel de l’intérêt général.

Dans ce cas, le juge administratif reconnait la responsabilité sans faute de l’Etat législateur du fait des lois sur le fondement du principe de rupture de l’égalité des citoyens devant les charges publiques (A), qui demeure cependant, au vu de ses conditions d’application, difficile à appliquer dans les faits (B).

  1. Le principe de rupture de l’égalité des citoyens devant le charges publiques

Le principe de rupture de l’égalité des citoyens devant les charges publiques trouve son fondement dans le principe d’égalité devant la loi : si une loi ou un règlement crée une situation inégalitaire, la victime peut en demander l’annulation. Ce principe justifie que l’administration agisse de manière à mettre un terme à toute situation illégale. A défaut, elle sera reconnue responsable.

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