Ce que les riches pensent des pauvres, Serge Paugam

« Ceux que les riches pensent des pauvres » – ASH – Serge Paugam

Introduction

Le document présenté est extrait du magazine ASH (Actualités Sociales hebdomadaires) numéro 3027, parût le 29 septembre 2017. Il s'agit d'un article rédigé par Brigitte Bègue. La journaliste relate les propos du sociologue Serge Paugam qui publie la même année, aux éditions du Seuil, un ouvrage intitulé :"Ce que les riches pensent des pauvres". Serge Paugam est directeur d'études à l’École des Hautes Études en Sciences Sociales et directeur de recherche au CNRS. Ses travaux concernent les inégalités, la pauvreté, la disqualification sociale, le chômage et la précarité professionnelle. Il étudie ces différents phénomènes à l'échelle nationale, européenne et internationale. A l'occasion de la publication de cet ouvrage, Serge Paugam présente les résultats du travail qu'il a mené en collaboration avec Bruno Cousin, Camila Giorgetti et Jules Naudet. Les quatre chercheurs ont en effet réalisé une enquête qualitative et comparative, portant sur la manière dont les plus aisés perçoivent la pauvreté, à São Paulo au Brésil, à Delhi en Inde et à Paris en France.

Pour Serge Paugam, l'intérêt de mener une telle enquête, dans des pays aussi contrastés est double :

• D'abord, cela lui permet d'observer les variations de la perception de la pauvreté en fonction des pays mais aussi en fonction du cycle économique dans lequel ces pays se trouvent.
• Ensuite, d'un point de vue méthodologique, ce qui est constaté dans les quartiers riches permettrait, d'après Serge Paugam, « de faire ressortir sous forme d'une loupe grossissante ce que le quotidien ne permet pas toujours de révéler de façon directe dans d'autres couches sociales".

Présentation synthétique des résultats de l'enquête sociologique

Les résultats de cette étude montrent que même si les inégalités sont beaucoup plus élevées à Delhi et à São Paulo qu'à Paris, "les mécanismes qui structurent les rapports sociaux entre les riches et les pauvres peuvent conduire à des formes radicales de séparatisme social assez semblables d'une métropole à l'autre". Serge Paugam met en évidence l'existence d'un triptyque de la discrimination à l'égard des pauvres qui se caractérise de la façon suivante :

        1) Le réflexe de défense des intérêts des riches

Pour justifier les privilèges dont ils jouissent, les riches s'enferment dans un système de défense étayé par l'idée que la pauvreté fait partie de la nature, qu'elle a toujours existé et qu'elle existera toujours. Pour eux, l'ordre social est par nature inégal. Il n'y a donc pas forcément lieu de s'émouvoir de la pauvreté, d'autant plus que la richesse sert à la société toute entière (concept du ruissellement). Pour défendre leurs intérêts, les riches n'hésitent pas non plus à considérer que les pauvres sont paresseux et qu'ils ne méritent pas nécessairement qu'on leur vienne en aide. À ce propos, l'auteur pointe que ce type de considérations peut entraîner des effets de culpabilisation chez les plus démunis mais aussi la remise en cause des programmes d'aide qui leurs sont destinés. Ici, le système de défense utilisé par les classes les plus aisées passe par une "neutralisation de la compassion" à l'égard des plus pauvres.

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