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Séparation et équilibre des pouvoirs

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Par   •  4 Décembre 2017  •  Dissertation  •  2 567 Mots (11 Pages)  •  842 Vues

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Séparation et équilibre des pouvoirs

   « Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée ni la séparation des pouvoirs déterminée n’a point de Constitution. ». L’article 16 de la DDHC de 1789 insiste grandement sur la présence d’une véritable séparation des pouvoirs, nécessaire au fondement même de la société. Le principe de séparation des pouvoirs est donc, selon cette conception, à la fois une composante essentielle de la Constitution et son principal objet.

   Au XVIIème siècle, la doctrine de la séparation des pouvoirs est avancée par certains auteurs comme Locke ou Montesquieu, en réaction aux contextes historiques de leurs époques. Ce principe de séparation des pouvoirs, attribué généralement à Montesquieu, consiste en une organisation du système politique dans laquelle les fonctions juridiques de l’Etat ne sont pas exercées par un même individu ou collège, mais réparties entre plusieurs autorités. Ces pouvoirs sont au nombre de trois : le pouvoir législatif, le pouvoir exécutif, et le pouvoir judiciaire, et ceux-ci, dans les mains d’un seul homme, conduisent au despotisme. On estimait donc que l’objet de toute Constitution était de séparer les pouvoirs en ce sens, comme le montre l’article 16 de la DDHC. L’équilibre, quant à lui, est vu comme une stabilité et une égalité horizontale de ces pouvoirs. Il existerait ainsi des moyens pour ces pouvoirs de s’équilibrer, de se compenser, afin que l’un ne soit pas plus puissant que l’autre, et que l’Etat puisse être stable, sans être gêné par la supériorité trop grande de l’un des pouvoirs.

   Le principe de la séparation des pouvoirs n’est cependant pas resté une théorie des Lumières, puisqu’il a été interprété et appliqué, comme le prouve les textes de lois qui le citent. Néanmoins, l’histoire et l’actualité prouvent que nous sommes très loin à présent de la vision théorique de Montesquieu au 18ème siècle. La séparation n’est pas aussi rigide que le philosophe l’avançait, elle est beaucoup plus souple. Cette souplesse peut s’évaluer sur plusieurs niveaux, ce qui nous permet de dégager une certaine typologie de régimes démocratiques, qui cherchent l’équilibre des pouvoirs de différentes manières. Aujourd'hui, la question d’une « bonne » séparation des pouvoirs en France se pose, car on assite à des déséquilibres entre les pouvoirs, notamment à cause d’une survalorisation du pouvoir exécutif.

   Ainsi, comment s’organise la séparation des pouvoirs et comment essaye-t-elle de garantir l’équilibre des pouvoirs ?

Une vision largement théorique de la séparation des pouvoirs se met d’abord en place (I), avant d’être reconsidérée et réinterprétée par les Etats afin de garantir l’équilibre des pouvoirs (II).

  1. Une vision largement théorique de la séparation des pouvoirs

La séparation des pouvoirs est théorisée par des auteurs comme Locke ou Montesquieu, qui développent une conception très classique de la séparation des pouvoirs (A), mais qui cependant prouvera rapidement ses limites lors de sa mise en pratique (B).

  1. La thèse théorique et classique de Locke et Montesquieu

   Émergeant dans la philosophie politique grecque avec Aristote, puis dans la Rome antique, le principe de la séparation des pouvoirs sera ensuite théorisé par Locke et Montesquieu, deux philosophes libéraux (qui placent l’individu au centre de leur raisonnement). Ce principe marque la volonté de rupture avec la monarchie absolue. Elle fut tout d’abord expérimentée en Grande-Bretagne, lorsque le souverain fut amené à partager ses pouvoirs avec des assemblées (Parlement). John Locke décrit le principe de la séparation des pouvoirs dans le Traité du Gouvernement civil de 1690, où il y distingue trois différents pouvoirs. Tout d’abord, vient le pouvoir législatif, c'est-à-dire celui de faire les lois « nécessaires à la conservation de la société et de ses membres ». Il est remis « entre les mains de diverses personnes », qui doivent également être soumises à ces lois. Comme ces lois ont un caractère qui s’inscrit dans le temps et qui s’appliquent à tous, il faut un pouvoir exécutif pour faire exécuter ces lois « au-dedans de la société. Pour Locke, ainsi, ces deux pouvoirs « se trouvent souvent séparés ». Enfin, le pouvoir fédératif est celui de faire la guerre et la paix, de conclure les alliances et les traités, « au regard des gens de dehors et des autres sociétés ». Cependant, Locke trouve difficile de séparer ces deux derniers pouvoirs : « on ne les voit guère résider […] dans deux personnes différentes. »

   Partant du postulat que « tout homme qui a du pouvoir est porté à un abuser », Montesquieu va reprendre et concrétiser le principe de la séparation des pouvoirs dans De l’esprit des lois (1748), c’est d’ailleurs à lui qu’on lui attribue généralement la création de ce principe. Dans le chapitre 6 du livre XI, il décrit les différentes caractéristiques d’une organisation où les pouvoirs seraient séparés. Ainsi, il dégage tout d’abord la puissance législative (faire la loi, la modifier, l’abroger), la puissance exécutrice (exécuter les « résolutions publiques », faire la paix ou la guerre, mener la politique diplomatique et de défense, et de faire régner la sécurité). Enfin, la puissance de juger (affaires civiles et pénales). Montesquieu insiste cependant sur le fait que le pouvoir judiciaire occupe une position inférieure par rapport aux deux autres : l’équilibre se joue en réalité entre la puissance législative et la puissance exécutrice.

   Montesquieu va développer la séparation des pouvoirs comme un principe qui repose sur deux critères : la différenciation des fonctions et la différenciation des organes. Chaque organe exerce une fonction différente des autres. Cela implique qu’ils soient différents et indépendants. Par exemple, la séparation des pouvoirs n’est pas assurée dans le cas où la fonction exécutive est confiée à un conseil composé de membres choisis et révoqués par le corps législatif, et qui ne peut agir qu’en exécution de ses décisions. Tel était le cas du comité exécutif de 24 membres prévu par la Constitution française de 1793 (non appliquée).

   Ainsi, ces deux auteurs du 18ème siècle développent la théorie classique de la séparation des pouvoirs, qui prône une séparation plutôt stricte, à raison d’un organe par fonction. Cependant, des limites vont être perçues au fil du temps.

  1. Les limites d’une séparation des pouvoirs trop rigide

   Montesquieu avait prévu la façon dont s’équilibrerait les pouvoirs entre eux. Son idée d’un gouvernement modéré s’appuie sur l’idée suivante : « Pour qu'on ne puisse pas abuser du pouvoir, il faut que, par la disposition des choses, le pouvoir arrête le pouvoir ». Ainsi, la puissance législative est divisée en deux chambres (système du bicamérisme), qui vont se limiter mutuellement, elles-mêmes liées par la puissance exécutive. Puissance législative et puissance exécutive seront ainsi « forcées d’aller de concert », comme l’écrit Montesquieu. De ce fait, la puissance exécutrice doit prendre part à la législation par sa faculté d’empêcher, tout comme la puissance législative a le droit (et devoir !) d’examiner de quelle manière les lois qu’elle a faites ont été exécutées. De ce fait, les pouvoirs se limiteront les uns les autres par un système décrit par le philosophe « de freins et de contres poids. ». Ceci étant instauré, le gouvernement peut s’exercer sans crainte de l’absolutisme, car puissance législative et puissance exécutive vont travailler ensemble au même objectif, tout en se limitant l’une à l’autre.

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