Que vous inspire cette formule d'Alain Juppé : « Un bon mode de scrutin c'est un mode de scrutin qui dégage une majorité de gouvernement, mais qui, en même temps, donne la parole aux minorités », (Le Figaro, 8 septembre 1996).
Dissertation : Que vous inspire cette formule d'Alain Juppé : « Un bon mode de scrutin c'est un mode de scrutin qui dégage une majorité de gouvernement, mais qui, en même temps, donne la parole aux minorités », (Le Figaro, 8 septembre 1996).. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Manrtv • 6 Novembre 2022 • Dissertation • 2 136 Mots (9 Pages) • 336 Vues
Alain Juppé, en 1996, est alors premier ministre de Jacques Chirac. Très peu apprécié par l’opinion publique à cause, en grande partie, de son plan sur la retraite et la sécurité sociale, il finit par démissionner de son poste au gouvernement après la défaite de la droite aux élections législatives de 1997. Le Président affiche alors publiquement son soutien et sa solidarité avec ce dernier, et les tensions sont vives du côtés des partis politiques, qui se préparent aux prochaines élections. Dans ce contexte, la formule d’Alain Juppé fait écho dans l’esprit de la population. Le « mode de scrutin » évoqué par cet ancien premier ministre dans Le Figaro, désigne les mécanismes de traduction des votes en sièges. Or il n'y a pas de consensus sur le mode de scrutin idéal qui doit assurer la représentation la plus fidèle. C'est d'ailleurs sur un tel sujet que Michel Rocard a choisi, en avril 1985, de démissionner du gouvernement Fabius. Il semble qu'il y ait deux grands types de scrutin : le scrutin majoritaire et le scrutin proportionnel. S'ils font débat, c'est que Le choix d'un mode de scrutin n'est jamais neutre au regard des luttes politiques et des positions de pouvoir occupées par les acteurs en mesure d'influencer ce choix. . C'est pourquoi les controverses sur les modes de scrutin peuvent prendre tant d'ampleur, comme c'est le cas de manière récurrente à propos de la représentation proportionnelle en France. La question de l'influence des modes de scrutin sur les systèmes électoraux n'a cessé, depuis les premiers travaux de Maurice Duverger dans les années 1950, de passionner les spécialistes de science politique.
Mais la question du mode de scrutin nous amène à nous poser en premier lieu celle du type de souveraineté car ces modes sont légitimés par différentes assises théoriques en fonction du concept de souveraineté. La souveraineté est un terme polysémique qui a plusieurs fois été sujet de confusion en France du fait de l’utilisation de ce seul mot pour définir plusieurs choses. Mais on peut aujourd’hui le définir en deux aspects : Dans un premier temps comme l’exercice effectif sur une population rassemblée sur un territoire donné d’une autorité politique exclusive. Ce premier aspect constitue la souveraineté dans l’Etat, au regard du droit constitutionnel. La souveraineté est également l’absence de subordination d’un Etat par apport à un autre : c’est la souveraineté de l’Etat au regard du droit international. Enfin Selon Troper c’est à la fois un caractère d’Etat, la qualité de celui qui est suprême : la puissance de l’organe qui n’est soumis à aucun contrôle, et l’ensemble des pouvoirs que cet organe peut exercer. Le débat entre les deux modes de scrutin est pertinent car c’est une question d’actualité au vu des récentes volontés du MoDem de réinstaurer la proportionnelle aux prochaines élections législatives : projet qui est loin de faire l’unanimité, mais au-delà de ça c’est « un très vieux problème entre théoriciens du droit constitutionnel ou de la science politique que d’opposer les mérites et les inconvénients respectifs du scrutin proportionnel et du scrutin majoritaire. Nous allons aujourd’hui nous appuyer sur la citation d’Alain Juppé pour déterminer quel est le « bon mode de scrutin », pourquoi sa définition peut elle être rapprochée de l’utilisation du scrutin majoritaire ? En d’autres termes : comment la citation d’Alain Juppé suggère elle le scrutin majoritaire comme bon mode de scrutin ? Nous commencerons par nous pencher sur le titulaire et l’exercice de la souveraineté dans l’Etat ( I ) en étudiant la souveraineté populaire et l’importance de la voix citoyenne ( A ) ainsi que la souveraineté nationale et la transcendance de l’intérêt général ( B ). Ensuite dans une deuxième partie nous nous intéresserons au rôle crucial des représentants : leur mode d’élection et son impact ( II ) en évoquant l’idéalisation du système proportionnel : donneur de voix aux minorités ( A ) puis ses inconvénients et la nécessité du scrutin majoritaire ( B )
I ) Le titulaire et l’exercice de la souveraineté dans l’Etat : débat entre souveraineté populaire et nationale
A ) La souveraineté populaire et l’importance de la voix citoyenne
La souveraineté populaire est un concept qui a été beaucoup défendue par Rousseau, il nait d’ailleurs dans ses travaux et notamment dans « du contrat social » en 1762. Cette doctrine prône l’attribution du pouvoir suprême au peuple qui induit un concours direct de chaque individu à la volonté générale et donc à la prise de décision. En effet selon Rousseau la volonté générale est en fait seulement le résultat des volontés individuelles : il dira du souverain qu’il « n’est formé que des particuliers qui le composent » (extrait du contrat social). Ainsi la volonté générale devient souveraine et la souveraineté trouve son siège dans les individus qui composent le peuple. Rousseau et l’ensemble des partisans de la théorie de la souveraineté populaire légitiment le concours direct du peuple dans la prise de décision par la conclusion suivante : la souveraineté selon eux réside dans la volonté du peuple et la volonté ne se représente point. De cette façon ils réfutent l’idée de représentation du peuple lors de la prise de décision : « Les députés du peuple ne sont donc, ni ne peuvent être ses représentants, ils ne sont que des commissaires » ( extrait du contrat social ). Cette vision des choses suppose dont l’utilisation du mandat impératif pour permettre au peuple de concourir directement à l’élaboration des décisions politiques sans passer par une intermédiaire. Les citoyens élisent les élus pour qu’ils mettent en place la volonté populaire mais si celle-ci est mal exécutée : ils sont renvoyés. Selon Carré de Malberg, un autre mode de fonctionnement : par exemple celui de la représentation avec le mandat représentatif, s’apparenterait à un acte d’abandon de la souveraineté et une confiscation périodique de la volonté populaire. Le peuple serait dans ce cas privé de parole, esclave de la volonté de ses représentants alors qu’il est l’essence même de la souveraineté et la raison d’être de la constitution. C’est dans cela que réside le problème : lorsque les représentants entre en jeu, la constitution se concentre uniquement sur l’organisation de leurs pouvoirs et délaisse les citoyens.
B ) La souveraineté nationale et la transcendance de l’intérêt général
A l’opposé de la théorie de souveraineté populaire, la théorie
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