Pourquoi Robert Nozick considère le droit à la propriété privée plus fondamental que le droit à la vie?

La Déclaration universelle des droits de l’homme stipule que «tout individu a droit à la vie, à la liberté et à la sûreté de sa personne.»(1) Cela implique de recevoir les soins nécessaires afin de jouir du meilleur état de santé possible.(2) En faisant primer le droit à la propriété privée, Robert Nozick néglige d’autres droits fondamentaux, comme le droit à la vie. La liberté du concepteur d’un vaccin de fixer le prix désiré a-t-elle plus d’importance que la nécessité de protéger la population d’une maladie dévastatrice ? En quoi le droit à la propriété privée est-il plus fondamental que le droit à la vie ?

Selon le principe du «transfert des possessions»(3) de Nozick, si chaque individu possède un droit légitime et absolu sur ses propriétés, tout échange libre et consenti entre eux est juste. Pour lui, la véritable justice, compatible avec le respect de la liberté, respecte les droits de propriété de tous: tant la propriété des biens que la propriété de soi et du produit de son travail. Il abonde dans le sens du philosophe John Locke qui stipule que «tout ce [qui a été] tiré de l’état de nature, par sa peine et son industrie, appartient à lui seul»(4). Ainsi, le chercheur qui a utilisé son intelligence, son talent et son travail pour inventer un vaccin peut en disposer comme il le souhaite et par conséquent en exiger le prix qu’il désire afin de faire fructifier son capital.

D’autre part, la stabilité et l’harmonie de la vie en société nécessitent une réglementation assurée par les pouvoirs publics. De ce fait, le gouvernement du Canada assure, entre autres, le «rôle […] de réglementer les prix auxquels les brevetés vendent leurs médicaments brevetés aux [acquéreurs] afin de s'assurer que ces prix ne sont pas excessifs.»(5) En l’absence de telles règles, le vaccin nécessaire à l’éradication d’une maladie dévastatrice pourrait être inaccessible. Choisir de vivre en société est choisir que la vie humaine ait la primauté sur le droit à la propriété privée. Par conséquent, nous devons, en tant que société déterminer la préséance d'un droit sur un autre quand ils entrent en conflit.

Ainsi, le droit à la vie, donc l’accessibilité à un vaccin nécessaire à la protection de la population est prioritaire sur le droit à la propriété privée. Par conséquent, les droits positifs, tels que les textes de loi, établis par un État soucieux de la santé publique sont indispensables au bon fonctionnement de la société, et ce même si elle doit empiéter sur la liberté du concepteur.

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1- Site des Nations Unies, La Déclaration des droits de l’homme, article 3

http://www.un.org/fr/universal-declaration-human-rights/index.html

2- Site de l’Organisation mondiale de la santé Santé et droits de l’homme

http://www.who.int/mediacentre/factsheets/fs323/fr/

3- Extrait de Robert Nozick, Justice distributive – la théorie de l’habilitation, dans Anarchie, État et Utopie, 1974, page 187-192, ligne 60

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