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Le pouvoir de révision constitutionnelle et la Constitution de 1958

Dissertation : Le pouvoir de révision constitutionnelle et la Constitution de 1958. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  9 Décembre 2018  •  Dissertation  •  2 870 Mots (12 Pages)  •  767 Vues

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Une constitution doit bénéficier de stabilité en raison du caractère fondamental des règles qu’elle fixe pour la vie d’une nation. Elle régit l’organisation du pouvoir politique, nécessaire à toute société, reconnaît et assure en général la protection des droits et libertés de l’homme.

Pour autant, l’œuvre constituante a vocation à évoluer. Il faut en effet prévoir les moyens de la réviser pour en corriger les défauts que la pratique révélerait ou encore pour pouvoir l’adapter aux évolutions politiques et sociétales. Il serait d’ailleurs absurde de vouloir figer la Constitution, au risque de ne laisser que le coup d’Etat ou la révolution comme moyens d’aboutir à un changement constitutionnel. Empreint de sagesse, l’article 28 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1793 disposait : « Un peuple a toujours le droit de revoir, de réformer et de changer sa Constitution. Une génération ne peut assujettir à ses lois les générations futures ». La possibilité d’adapter la constitution permet ainsi d’assurer sa longévité.

Cette fonction appartient au pouvoir de révision constitutionnelle – parfois qualifié de pouvoir constituant dérivé ou institué – que la théorie constitutionnelle invite à distinguer du pouvoir constituant originaire dont est titulaire le peuple en démocratie. Le second n’intervient en principe que pour élaborer la constitution de manière initiale et inconditionnée, c’est-à-dire en dehors de règles constitutionnelles qui le limiteraient puisque, par hypothèse, il n’existe pas ou plus de constitution. Le premier est celui qui a été institué par la constitution pour réaliser des révisions. Ce pouvoir doit intervenir conformément à la procédure de révision et dans le respect des limites fixées par la constitution.

A cet égard, la procédure de révision constitutionnelle peut être ou non distincte de la procédure d’adoption des lois ordinaires. Lorsqu’elle ne l’est pas, la constitution est dite souple et peut être modifiée de la même manière que le serait la loi (Royaume-Uni). Dans la très grande majorité des Etats, dont la France, la constitution est dite rigide car elle ne peut être révisée que selon une procédure particulière, plus solennelle et plus lourde que la procédure législative ordinaire. En général, la loi ordinaire est adoptée par les chambres du Parlement à la majorité simple ou plus rarement par référendum. Les procédures de révision des différentes constitutions sont quant à elles alourdies et en cela rendues plus difficiles de différentes manières : par l’exigence d’une majorité renforcée au sein des assemblées parlementaires (majorité des 3/5 par exemple), par la possibilité ou l’obligation d’un référendum, par l’existence de limites à la révision constitutionnelle, etc. Il en va ainsi de la procédure de révision de la Constitution française de 1958 fixée par son article 89.

[Problématique] La procédure de révision est ainsi censée assurer la rigidité du texte constitutionnel tout en permettant néanmoins son évolution. La recherche de cet équilibre est délicate et incertaine. Sa réussite est largement tributaire du contexte politique, de la structuration partisane de la vie politique et de la discipline majoritaire des assemblées. La question se pose dès lors de savoir comment l’équilibre entre rigidité et adaptabilité a été pensé à travers la Constitution de 1958 et si l’objectif a été atteint au vu du fonctionnement de la Ve République.

[Annonce des parties] A cet égard, il s’agira de montrer, d’une part, comment la Constitution limite le pouvoir de révision (I) et, d’autre part, le relatif échec de ce conditionnement compte tenu du nombre de réformes réalisées par le pouvoir de révision, lesquelles ont largement remodelé la Constitution (II).

I – Un pouvoir de révision limité par la Constitution

[Annonce des sous-parties] Dans son exercice, le pouvoir de révision est soumis à deux types de limites. Des limites procédurales que l’on pourrait qualifier d’ordinaires au sens où elles encadrent toute révision du texte constitutionnel (A), et des limites circonstancielles et matérielles qui revêtent un caractère extraordinaire dans la mesure où elles ne s’appliquent que pour des hypothèse précises, et en fait résiduelles (B).

A – Les limites procédurales à l’exercice du pouvoir de révision

La rigidité de la Constitution se manifeste plus particulièrement dans les deux dernières étapes de la procédure de révision de l’article 89.

L’initiative est quant à elle largement ouverte au pouvoir législatif et au pouvoir exécutif et ne présente pas, à cet égard, de restrictions particulières à l’exercice du pouvoir de révision. Elle appartient, d’une part, aux membres du Parlement : un ou plusieurs députés ou sénateurs peuvent en ce sens déposer une proposition de loi constitutionnelle. L’initiative appartient, d’autre part, au président de la République sur proposition du Premier ministre et prend la forme d’un projet de loi constitutionnelle. L’exécutif a retrouvé un rôle en matière de révision alors qu’il en était exclu sous la IVe République. Son déclenchement suppose néanmoins une entente entre les deux têtes de l’exécutif.

Un fois l’initiative déclenchée, les assemblées doivent adopter en termes identiques la proposition ou le projet de loi constitutionnelle. Chaque assemblée dispose ainsi d’un véritable pouvoir de blocage, d’un « droit de veto » puisque l’accord de chacune d’entre elles sur le même texte (en termes identiques) est nécessaire pour que la procédure puisse continuer. L’Assemblée nationale ne dispose pas du dernier mot sur le Sénat comme cela peut être le cas dans la procédure législative ordinaire. Le bicamérisme est égalitaire en matière de révision constitutionnelle. Le Sénat dont le collège électoral surreprésente les petites communes rurales, politiquement plus conservatrices, devait être en mesure de réfréner au besoin les ardeurs de la chambre basse issue d’une élection directe. Il y a là véritablement un premier obstacle lorsque, en particulier, les deux chambres du Parlement ne sont pas dominées par des majorités politiques concordantes. C’est ainsi, par exemple, que le Sénat s’est opposé à l’adoption de plusieurs révisions constitutionnelles (1984, 1990, 1993).

Quant à la dernière étape du processus de révision, elle se singularise par une lourdeur évidente. La rédaction de l’article 89 al. 2 laisse penser que le référendum est la voie normale pour entériner la révision : « La révision

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