Le droit et la nécessité de la sanction
Dissertation : Le droit et la nécessité de la sanction. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Jonathan Lasry • 9 Décembre 2016 • Dissertation • 3 918 Mots (16 Pages) • 1 090 Vues
Il existe différents types de règles qui renvoient à des domaines très différents et sont intégrées de manières différentes : la règle religieuse renvoie à des croyances spirituelles et ne comporte a priori pas de sanction matérielle pour les fidèles qui la suivent, a contrario, la règle de droit renvoie à la volonté d'un groupe social de faire régner l'ordre et l'harmonie au sein de celui-ci et est a priori sanctionnable. Alors que l'ordre peut résulter de la force sans consensus, l'harmonie qui résulte de l'accord des pensées, des sentiments est un état qui intègre la notion d'intérêt général qui est aujourd'hui très présente dans le droit. De ce fait, l'individu qui voudrait agir uniquement dans son intérêt personnel, se heurte aux règles qui sont souvent contraignantes puisqu'il s'efforce d'agir en vertu et pour une cause qui le dépasse quand il les respecte. C'est pour cette raison que les individus n'ont a priori pas intérêt ni envie de respecter les règles qui doivent alors être accompagnées de sanctions pour être respectées. Néanmoins, certaines règles n'ont pas vraiment besoin de sanctions matérielles pour que l'individu soit conscient qu'il doit les respecter. Ceci est possible quand l'individu prend conscience que ces règles sont faites pour l'harmonie du groupe (qui est une constituante de son intérêt personnel). Certains individus vont donc respecter la plupart des règles sans forcément penser à la sanction mais par intérêt bien compris. Finalement c'est la diversité des comportements humains qui pose problème à la puissance publique : il faut s'assurer que tous les individus sans exception suivent les règles. Ce n'est qu'en présence de sanctions dissuasives qui peuvent parfois se traduire par une privation de droits que l'on peut réellement combattre les comportements divergents. La dimension éducative de la règle qui est indéniable semble ici insuffisante pour atteindre l'harmonie du groupe. Est il toujours adéquat de sanctionner pour faire respecter les règles et concourir au bien être du groupe ? Comme nous l'avons dit la sanction est nécessaire pour créer des règles et les faire respecter ces nouvelles règles. Néanmoins on peut aussi soutenir que la sanction au même titre que les règles ne sont qu'un moyen pour vivre en harmonie et qu'il existe d'autres moyen pour atteindre l'harmonie du groupe.
La création d'une nouvelle règle passe par l'établissement d'une sanction qui attire l'attention des individus et les dissuade de ne pas la respecter. En effet, la sanction est au coeur de la bonne application des règles : il faut avoir la force de mettre en oeuvre la sanction et il faut que la sanction soit considérée comme juste par le groupe social pour qu'elle amène l'harmonie. La sanction théorique provient d'un consensus puisqu'elle est écrite dans la loi votée par le parlement. C'est indirectement le peuple qui discute et fixe la sanction à travers son vote. De ce fait la sanction doit être l'expression de la volonté du peuple et à ce titre elle doit être considérée comme juste par celui-ci. Par ailleurs la règle doit être aussi justifiée aux yeux des gens pour qu'elle soit bien acceptée. Comme le rappelle Pascal : "La justice sans force est contredite, parce qu'il y a toujours des méchants. La force sans justice est accusée. Il faut donc mettre ensemble la justice et la force, et pour cela faire que ce qui est juste soit fort, ou ce qui est fort soit juste". En effet, lorsqu'une nouvelle règle apparait les individus ne ressentent pas le besoin de la respecter car ils n'en ont pas le réflexe. Même si certaines règles sont prévisibles comme les règles anti pollution, les règles sur le recyclage, leur caractère nouveau peut les faire passer inaperçues. En revanche, lorsqu'il y a sanction, comme des sanctions financières en cas de non respect du traitement des déchets en matière environnementale, les entités concernées vont prendre le problème au sérieux pour ne pas être sanctionnées. La logique répressive de la règle est nécessaire pour permettre le respect de la règle car l'individu aura toujours intérêt à attendre que son voisin respecte la règle plutôt que la respecter avant lui. Dans son article de 1968 intitulé "La tragédie des biens communs", Garett Hardin nous parle de ce type de raisonnement dans les situations de compétition pour l'accès à une ressource limitée face à laquelle les compétiteurs vont aboutir à une situation où tout le monde perd. Les "biens communs" sont des ressources qui ont deux particularités : ils n'appartiennent à personne car il serait trop complexe de les attribuer à quelqu'un, de plus ce sont des "biens rival" : si je pêche un poisson il ne sera plus disponible pour les autres. Si l'on prend l'exemple des compagnies qui pêchent dans les océans : elles sont en concurrence, et la valeur de leur vente dépend du nombre de poissons qu'elles pêchent. Elles ont donc, a priori, toute intérêt à pêcher le plus de poisson possible pour faire le plus de vente possible. Ce calcul qui marche à court terme s'avère désastreux à long terme, puisque, les océans, victimes de la surpêche vont petit à petit être vidés de leur ressources. De plus, à moyen terme, une baisse du nombre de poisson signifie une baisse de la reproduction et donc aussi une baisse du nombre de poissons dans les océans. Le risque pour les compagnies est de faire faillite puisqu'il n'y aura plus du tout de poissons dans l'océan. Pourtant d'un point de vue individuel, on comprend qu'une compagnie est forcée d'adopter un comportement individualiste et courtermiste. En effet, si la compagnie choisit de modérer sa pêche, elle va moins pêcher et donc être moins efficace que ses concurrentes, ses coûts vont être plus élevés et elle va aussi faire faillite. Un autre exemple typique est celui d'un champ de fourrage commun à tout un village, dans lequel chaque éleveur vient faire paître son propre troupeau : le champs va vite devenir un tas de boue si personne n'organise son exploitation. Quoi qu'il en soit il est clair qu'en l'absence d'actions, ces situations sont dangereuses pour tous. Les solutions qui ont été proposées par la suite à ce problème sont diverses mais elles ont en commun de s'appuyer sur le droit. Par exemple la solution du théorème de Coase consiste à établir des paiements entre les individus pour qu'ils n'utilisent pas trop la ressource. Dans le cas ou un individu refuserait de payer il serait alors poursuivi et sanctionné par le législateur. Un exemple très connu de solution à ce problème est la politique de l'enfant unique en Chine : dans ce cas c'est le législateur qui se porte gérant du bien commun : le nombre de citoyens. Il veille à ce qu'il ne soit pas trop élevé. Dans ce pays il y a un mécanisme de punition pour les personnes qui ne respectent pas la politique de l'enfant : les sanctions sont très variables et sont surtout financières mais peuvent aller plus loin. Dans le cas des biens communs, la sanction remplace l'absence de consensus de la part des acteurs qui toutefois sont tous d'accord sur le fait qu'il faut éviter la tragédie mais qui ne peuvent à titre individuel faire en sorte de l'éviter. Finalement la sanction a indéniablement une utilité pratique mais doit toujours être juste pour qu'elle amène à l'harmonie. De plus comme on l'a vu elle doit être accompagnée de la force car même lorsque sa finalité est juste et utile pour tous les individus peuvent, à titre personnel avoir intérêt à ne pas la respecter.
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