La responsabilité civile
Commentaire d'arrêt : La responsabilité civile. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar rnehamia • 28 Février 2022 • Commentaire d'arrêt • 2 361 Mots (10 Pages) • 306 Vues
Le 12 novembre 2020, la chambre sociale de la Cour de cassation a rendu un arrêt de cassation relatif à une action en réparation d’une atteinte à la vie privée.
En l’espèce, une salariée a été engagée le 1er octobre 1999 comme secrétaire dans une entreprise. Cependant, elle a été licenciée pour faute grave le 9 novembre 2010 et a de ce fait saisi la juridiction prud’homale. Dans ce litige, l’employeur a fait parvenir comme élément du dossier un message privé échangé par la salariée avec une de ses collègues. La victime a alors demandé réparation de son atteinte à la vie privée sur le fondement de l’article 9 du Code civil. Précisément, cette dernière exige le versement de dommages-intérêts conformément à la responsabilité du fait personnel comprise à l’article 1240 du Code civil.
La cour d’appel de Douai a dans un arrêt du 30 mars 2018 déduit le caractère privé du message échangé entre la victime et une autre salariée. Les juges retiennent également que la production d’un tel message n’était pas nécessaire à l’exercice du droit de la preuve dans le litige opposant la salariée à son employeur et caractérisent alors l’atteinte à la vie privée. Toutefois, la cour d’appel a débouté la victime de sa demande de dommages-intérêts en ce que cette atteinte ne lui avait causé aucun préjudice sur le fondement de l’article 9 du Code civil. En conséquence, cette dernière a formé un pourvoi en cassation afin d’obtenir réparation de son atteinte à la vie privée.
La question qui était alors posée à la Cour de cassation est la suivante: La victime d’une atteinte à la vie privée doit-elle prouver l’existence d’un préjudice ou seule la démonstration d’une atteinte illicite à sa privée lui ouvre droit à réparation?
Conformément à sa jurisprudence dégagée dans son arrêt du 5 novembre 1996, la Cour de cassation juge que « la seule constatation de l’atteinte à la vie privée ouvre droit à réparation ». Elle casse alors l’arrêt de la cour d’appel de Douai au visa de l’article 9 du Code civil. En effet, les juges retiennent que la victime n’a pas à sa charge la démonstration d’un préjudice et que l’action en réparation décrite par l’article 9 est ouverte dès lors qu’il y a une atteinte illicite à la vie privée d’une personne.
Dans cet arrêt, la Cour de cassation retient la qualification d’une atteinte à la vie privée qui engendre des conséquences juridiques importantes à l’égard de la victime (I). Cette atteinte donnant lieu à une action en réparation fondée sur l’article 9 du Code civil (II).
I. Les conséquences de la qualification d’une atteinte à la vie privée
Dans un premier temps, la Cour de cassation confirme la qualification par les juges du fond d’une atteinte à la vie privée et cette qualification a des conséquences juridiques qui méritent d’être étudiées. En effet, l’atteinte à la vie privée est constitutive d’une atteinte aux droits de la personnalité (A) et cette atteinte consacre un préjudice moral (B).
A) L’atteinte à la vie privée constitutive d’une atteinte aux droits de la personnalité
Dans son arrêt du 12 novembre 2020, la Cour de cassation casse l’arrêt d’appel au regard de l’article 9 du Code civil qui dispose « chacun a droit au respect de sa vie privée ». Introduit par la loi du 17 juillet 1970, le droit à la vie privée est une composante des droits de la personnalité. Les droits de la personnalité sont les droits reconnus par la loi à tout être humain dès lors qu’il est doté de la personnalité juridique, pour la protection de ses intérêts dans ses rapports avec autrui. Corrélativement, ces droits subjectifs impliquent le devoir de ne pas nuire à autrui qui correspond à l’objet d’une action en responsabilité civile. En ce
sens, « l’action en responsabilité ne sanctionne pas la violation d’un pur devoir imposé par la règle objective, mais d’un devoir subjectif qui est corrélatif à un droit subjectif » (TRAITE DES DROITS DE LA PERSONNALITE, Lexis Nexis, 2012 Jean-Christophe SAINT-PAU). Et c’est principalement lorsque les contours de l’exercice des droits de la personnalité ne sont pas respectés qu’une telle action peut être déclenchée. L’exercice des droits de la personnalité se manifeste par le consentement de son titulaire, soit de manière positive en acceptant l’atteinte ou de bien de manière négative en la refusant. Ainsi, l’exercice du droit au respect de la vie privée consiste à accepter ou refuser des enquêtes ou des divulgations d’informations relatives à l’identité, l’intimité de son titulaire. Lorsque la volonté de la personne dans l’exercice de son droit n’est pas respectée et qu’aucun motif justifie l’intérêt à l’information, il y a
alors atteinte à la vie privée et la victime peut alors former une action en réparation sur le fondement de l’article 9 du code civil. En l’espèce, la requérante forme un pourvoi en cassation en ce qu’elle a subi une atteinte à un droit subjectif, à son droit à la vie privée. En effet, dans le cadre d’un litige avec son employeur, ce dernier a produit un message privé obtenu sans le consentement de la requérante échangé avec une autre salariée via le réseau social Facebook. De ce fait, les juges du fond ont relevé une atteinte à la vie privée de la salariée, « en constatant le caractère privé de ce message » et que cette production « n’était pas indispensable à l’exercice du droit de la preuve ». L’atteinte à la vie privée est bel et bien caractérisée puisqu’elle a été réalisée sans le consentement de la victime et n’était pas justifiée par l’intérêt d’information. Ainsi, dans ledit arrêt, le fait générateur de responsabilité prend sa source dans une atteinte à la vie privée constitutive d’une atteinte aux droits de la personnalité.
B) L’atteinte illicite à un droit de la personnalité constitutive d’un préjudice moral
En l’espèce, la requérante soutient qu’elle a subi une atteinte à sa vie privée sur quoi elle peut demander réparation. Les juges du fond ont d’ailleurs caractérisé cette atteinte qui a été confirmée par la Cour de cassation. La salariée est alors victime d’un dommage. En effet, le dommage réside dans l’atteinte à la vie privée elle-même et a fortiori à la personnalité. Et « toute atteinte à la personnalité implique un préjudice au moins moral » (« L'article 9 du Code civil ouvre-t-il un droit à réparation autonome » - Commentaire par Jacques RAVANAS ). En effet, le droit au respect de la vie privée est
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