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La rationalisation de la IVe République

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Par   •  21 Octobre 2016  •  Dissertation  •  2 999 Mots (12 Pages)  •  758 Vues

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Dissertation : La rationalisation de la IVe République

Jean Gicquel aborde l’adoption de la IVe République comme une volonté pour les constituants de 1946 de « s’efforcer de lutter contre l’instabilité ministérielle et procéder à une indispensable rationalisation du système politique. » 

La IVe République de la France s’inscrit comme un régime parlementaire, où les organes du pouvoir exécutif sont politiquement responsables devant une assemblée législative, par opposition au chef du gouvernement irresponsable. Plus précisément, la IVe République est un régime parlementaire dit moniste, caractérisé par la responsabilité du ministère devant l’assemblée élue au suffrage universel direct. Ce régime politique permet ainsi de conserver les idées de la Révolution de 1789 voulant un système prônant la séparation des pouvoirs, c’est-à-dire une organisation du système politique dans laquelle les fonctions sont réparties entre des autorités spécialisées et mutuellement indépendantes. Toutefois, la IVe République tente d’introduire dans le droit constitutionnel français la notion de rationalisation : elle désigne l'ensemble de moyens mis en œuvre pour assurer la stabilité et l'efficacité gouvernementales, notamment en instaurant une majorité parlementaire homogène et en rendant plus difficile la mise en jeu de la responsabilité politique du gouvernement par l'assemblée. La rationalisation est mise en place par écrit dans la Constitution, elle-même loi fondamentale d’un État fixant son statut juridique mais aussi son organisation des pouvoirs publics et les rapports qui s’établissent entre eux ; mais doit aussi être respectée dans la pratique des pouvoirs.

Ce concept apparaît suite à l’échec de la IIIe République, où le gouvernement n’est responsable que devant le Parlement, et le président est réduit à un rôle de représentation. Le Parlement gagne donc la maîtrise du sort du gouvernement sans encourir aucune sanction pour ses abus possibles dans ce domaine. Or, très vite, la pratique va mettre en place toutes les formes possibles de la mise en jeu de la responsabilité gouvernementale : la motion de censure ou la question de confiance sont utilisées de manière abusive par les parlementaires, entraînant au total, en soixante-dix ans, la présence de cent cinq gouvernements, soit une longévité moyenne de huit mois. Cette instabilité,

ainsi que l’invasion de la France par les nazis et la défaite de l’armée française lors de la Seconde guerre mondiale en seulement quelques semaines entraînent le maréchal Pétain, devenu alors président du Conseil, à signer l’armistice avec l’Allemagne et à établir le régime de Vichy de 1940 à 1944. Un régime autoritaire voit alors le jour en France, foulant aux pieds tous les droits de l’homme et principes fondamentaux précédemment acquis. À la fin de la guerre se pose la question, au sein du gouvernement provisoire présidé par le général de Gaulle, quant à la forme du future régime politique français. Un premier projet de constitution, soumis par référendum le 5 mai 1946, est écarté par les français. Le second, proposé une nouvelle fois par l’assemblée constituante le 13 octobre 1946, est approuvé avec près d’un tiers d’abstentionniste. La nouvelle constitution établit une IVe République, régime parlementaire moniste.

Cependant, cette nouvelle République s’inscrit comme la plus courte de l’histoire constitutionnelle de France, avec seulement 12 ans d’existence. En effet, à la suite de la Seconde guerre mondiale, le peuple français, comme les autres peuples européens, se méfie d’un trop grand pouvoir de l’exécutif, et prône un pouvoir plus grand pour l’institution légitime de l’Assemblée nationale, élue au suffrage universel direct. Cette méfiance quant aux abus possibles du pouvoir exécutif amène une rationalisation impossible du régime politique français, marqué par l’instabilité gouvernementale pareillement visible sous la IIIe République. Il est donc intéressant de comprendre pourquoi les constituants de 1946, malgré l’expérience et l’échec de la IIIe République, n’ont pas su établir un régime politique stable. La Constitution de 1946 réagit aux trois défauts majeurs des lois constitutionnelles de 1875 : le président de la République n’a plus de pouvoirs, ceux-ci sont transférés au président du Conseil dont la présence à la tête du Gouvernement est affirmée par les textes, le bicamérisme n’est plus que formel et seule l’Assemblée nationale a un pouvoir politique réel. Ce régime laisse présager un problème au niveau du concept de séparation des pouvoirs, visible par écrit dans la Constitution de la IVe République mais pourtant inefficace au vu de l’inexistante collaboration entre les pouvoirs. La rationalisation voulue par l’assemblée constituante se voit donc impraticable pendant la IVe République, vouant à l’échec le régime nouvellement créé. Quelles sont les raisons qui ont menées à un échec de la rationalisation du régime parlementaire de la IVe république ? Il s’agit de s’intéresser aux déséquilibres au sein des pouvoirs législatif et exécutif (I), mais aussi d’aborder la collaboration de ces deux pouvoirs au sein d’un régime parlementaire se voulant rationalisé (II).

  1. Des pouvoirs déséquilibrés en leur sein

La Constitution de la IVe République a été rédigée dans un contexte d’après-guerre, où les régimes autoritaires ou fascistes écrasent la vie politique européenne. L’organisation des pouvoirs exécutif et législatif se doit donc de répondre à la montée des extrêmes et des régimes ayant fait subir à la France un réel traumatisme. Ces pouvoirs cependant font preuve de déséquilibre en leur sein, tant pour le pouvoir exécutif soumis à de grandes instabilités gouvernementales (A) que pour le pouvoir législatif institué de manière inégalitaire (B).

  1. Un exécutif bicéphale soumis aux instabilités

La Constitution de 1946 réintègre les acquis de la IIIe République : le régime parlementaire monoélectif est toujours en place, avec un président de la République élu pour 7 ans par le Parlement réuni en Congrès selon l’article 29 de la Constitution. Il n’est rééligible qu’une fois et ne peut être élu parmi les membres des familles ayant régnées sur la France ; en cas d’empêchement, de mort ou de démission, il y a un intérim qui est pris par le président de l’Assemblée Nationale. Son irresponsabilité politique n’est pas remise en cause, mettant en exergue son rôle symbolique et protocolaire dans le pouvoir exécutif. En effet, la Constitution officialise le statut et le rôle du Premier ministre, désormais nommé président du Conseil et chef de file de l’exécutif. L’article 38 de la Constitution est la consécration de la perte de pouvoir du président de la République, précisant ainsi que tous ses actes doivent être contresignés « par le président du Conseil des ministres et par un ministre ». On nomme ainsi l’exécutif en France de dualiste et bicéphale lors de la IVe République, entre président du Conseil et président de la République.

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