Arrêt droit commercial, Pékin Express
Commentaire d'arrêt : Arrêt droit commercial, Pékin Express. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Amandine Deliaune • 24 Octobre 2016 • Commentaire d'arrêt • 1 517 Mots (7 Pages) • 1 661 Vues
Charlotte Rettig
TD Social
octobre 2015
Commentaire d'arrêt
Cassation sociale, 4 février 2015, Pékin Express
L'opération de qualification va permettre d'assurer la plénitude et l'effectivité d'un régime propre à une catégorie juridique. Le modèle du contrat de travail est essentiel pour comprendre les mécanismes d'acquisition de droits sociaux et ensuite pour qualifier la relation de travail, c'est en cela que la qualification du contrat de travail s'avère être fondamentale dans l'affaire ayant donné lieu à l'arrêt rendu par la chambre sociale le 4 février 2015.
En l'espèce, six personnes ont participé pendant l'année 2007 au tournage de l'émission "Pékin Express", un programme de divertissement ayant pour objet l'affrontement de candidats lors d'une course disputée sur un continent. Ces participants avaient signé un document intitulé "contrat de participation au jeu Pékin Express" ainsi qu'une "règlement candidat". Cependant, les parties ont considéré que ce contrat devait être analysé comme étant un contrat de travail et ont saisi la juridiction prud'homale de demandes en paiement de rappel de salaire, dommages et intérêts et indemnités de rupture.
La cour d'appel de Versailles a recueilli, le 10 septembre 2013, les prétentions des participants selon lesquelles il appartient, dans un premier moyen, au demandeur à la requalification d'un contrat de démontrer le caractère erronée de sa qualification apparente et qu'un contrat est considéré comme étant un contrat aléatoire lorsque les effets de celui-ci dépendent d'un évènement incertain. Les parties interjettent appel selon un second moyen dans lequel un lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur ainsi que le fait que l'existence d'un contrat de travail suppose à la fois l'accomplissement d'une prestation de travail mais également une rémunération versée en contrepartie d'un travail fourni.
Suite aux décisions rendues par la cour d'appel de Versailles, la société a formé un pourvoi en cassation. La Haute juridiction a donc dû déterminer si ces participants à une émission de télé-réalité pouvaient bénéficier du statut de salarié et du régime qui en découle.
La chambre sociale de la Cour de cassation rejette le pourvoi de la société Studio 89 Productions en écartant tout d'abord la qualification de "contrat de jeu" et en mettant en évidence la réunion des éléments caractéristiques du contrat de travail.
Il conviendra d'étudier dans un premier temps l'écartement fait par la Haute juridiction de la qualification de contrat de jeu (I) tout en mettant en évidence la réunion des éléments caractéristiques du contrat de travail que la cour de cassation retiendra (II).
I. Un écartement justifié de la qualification de contrat de jeu
Bien que l'opération de qualification s'avère être fondamentale pour assurer l'effectivité d'un régime, l'existence d'un lien ambivalent entre les notions de contrat de travail et contrat de jeu peut rendre délicate cette opération. L'écartement de la qualification de contrat de jeu se comprend au travers de ses conditions de constitution (A) puis selon le principe de la charge de la preuve en la matière (B).
A. Les conditions de constitution d'un contrat aléatoire
- le contrat de jeu comme acte aléatoire
- le contrat de jeu est un acte par lequel il est stipulé qu'une des parties recevra un gain (pécuniaire ou non), si, du fait du hasard et/ou de son habileté, un évènement qui lui est favorable se produit et inversement, où l'autre essuiera de ce fait une perte.
- avantage du contrat de travail: il présente l'intérêt d'investir l'employeur d'un véritable pouvoir
- inconvénient du contrat de travail: il soumet l'employeur à de nombreuses contraintes telles que financières. Ce sont à partir de ces inconvénients qu'apparait parfois la volonté d'écarter le contrat de travail au profit d'un contrat de jeu.
- l'arrêt rappelle la formule jurisprudentielle selon laquelle l'existence d'une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu'elles ont donné à leur convention, mais des conditions de fait dans lesquelles sont exercées l'activité des travailleurs.
- Cette formule s'appuie sur l'article 12 du code de procédure civile selon lequel il revient au juge de "donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée"
Dans l'affaire en question, la qualification de contrat de jeu soutenue par la société de production a été écartée pour plusieurs motif, notamment celui de la charge de la preuve.
B. Un rappel du principe de la charge de la preuve
- la Haute juridiction rappelle ce principe de la charge de la preuve en la matière.
- principe selon lequel, en l'absence de contrat de travail, il appartient à celui qui se prévaut de son existence d'en rapporter la preuve
- c'est ainsi que sur la base des documents produits, la cour d'appel souligne que "la sélection des candidats se faisait sur des critères subjectifs, totalement déterminés par l'entreprise de production et inconnus des participants".
- Or il convient de préciser que les juges de la cour d'appel révèlent que la "participation à un jeu supposait une sélection selon des critères objectifs appliqués à des compétences attendues dans un domaine déterminé".
- il faut rappeler que le jeu constituait seulement une partie du contenu de l'émission, ajouté à d'autres scènes de tournage et des interviews sur le ressenti des candidats
- dans certains cas, les règles du jeu pouvaient être contournées afin de cadrer avec les nécessités du tournage.
- c'est pour cela que le caractère aléatoire de la compétition se trouvait ainsi exclu et qu'il y avait des contraintes supplémentaires imposées aux participants
La qualification comme contrat de jeu envisagée par la société de production étant clairement écartée par la cour d'appel, la qualification en tant que contrat de travail était cependant justifiée.
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