La France face à la Convention EDH
Dissertation : La France face à la Convention EDH. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Noé Dollé • 4 Novembre 2019 • Dissertation • 3 016 Mots (13 Pages) • 543 Vues
« L'Europe est la paix qui est venue après le désastre de la guerre. L'Europe est le pardon entre Français et Allemands. L'Europe est le retour à la liberté pour la Grèce, l'Espagne et le Portugal. L'Europe est la chute du mur de Berlin. L'Europe est la fin du communisme. L'Europe est l'État-providence, c'est la démocratie. L’Europe c’est les droits fondamentaux. Pourrions-nous vivre sans tout ça ? ». La question sensiblement rhétorique soulevée ici par le débuté européen espagnol Esteban Gonzalez Pons n’est pas sans nous amener à considérer le rôle de garant des libertés et des droits joué par l’Europe ainsi que l’impact de l’exercice de cette fonction sur les états.
En la matière du respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales le Conseil de l’Europe fait autorité sur le continent. Il est essentiel de distinguer le conseil de l’Europe du conseil européen mais aussi du conseil de l’Union européenne. Le premier est une organisation intergouvernementale fondée en 1949. Elle rassemble aujourd’hui quarante-sept états dont les vingt-huit membres de l’union européenne. Le Conseil européen est quant à lui un sommet qui réunit les chefs d’états ou de gouvernements des vingt-huit pays membres de l’union européenne au moins deux fois par semestre et plus généralement en amont de toute prise de décision relative à l’orientation de la politique de l’union. Enfin, le Conseil de l’Union Européenne aussi appelé Conseil des ministres est une institution de l’union européenne qui exerce le pouvoir législatif en collaboration avec le parlement européen. Précisons tout de même que bien que le Conseil européen soit distinct de l’Union Européenne notamment de par leurs objets différents, le premier cherche à favoriser le développement de pratiques juridiques et démocratiques communes là où le second vise davantage à dynamiser l’économie des pays membres, ces deux organisations n’en coopèrent pas moins. La première réalisation du Conseil de l’Europe afin de satisfaire le dessein précédemment évoqué fut de se doter de la Convention Européenne des Droits de l’Homme en novembre 1950, nous nous y référerons désormais, par soucis de concision, sous le nom de Convention EDH. Ce texte fut peu à peu ratifié par tous les états membres du Conseil de L’Europe, ce fut le cas en 1973 pour la France. Les citoyens français ne purent cependant se prévaloir de ses dispositions devant les tribunaux nationaux qu’à partir de 1981. En outre, dans le cadre de sa mission de promotion des droits de l’homme, c’est-à-dire de l’« ensemble de facultés et prérogatives considérées comme appartenant naturellement à tout être humain » (Vocabulaire Juridique de l’association Henri Capitant, Gérard Cornu, p378) , la Convention EDH prévoit la création d’une Cour Européenne des droits de l’homme. Elle vit le jour le dix-huit septembre 1959 et examine depuis les recours des citoyens européens estimant que leur état a outrepassé ses droits. Pour aller plus avant, il convient de préciser que la présente analyse se bornera à la question de la France face à la Convention EDH, soit en d’autres termes aux effets que cette-dernière produit sur le système juridique français.
D’un point de vue historique, on ne doit pas le concept de droits de l’Homme à la Convention EDH, elle s’en veut davantage l’héritière. En effet, on peut considérer que la Déclaration d’Indépendance des Etats-Unis de 1776 et plus encore la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 ont marqué l’avènement de ces droits inhérents à la nature même de l’Homme. A cette époque créés pour prémunir l’individu des abus de l’état, les droits de l’Homme ont connu un sursaut planétaire après la seconde guerre mondiale. Un besoin impérieux de les réaffirmer s’ensuivit et donna naissance à la Convention EDH. Celle-ci a changé le visage et la fonction des droits de l’Homme en abolissant leur caractère immuable et sacré pour en faire un droit évolutif plus nuancé propre à garantir les droits subjectifs, soit les pouvoirs particuliers dont peut se prévaloir un individu. Le perpétuel mouvement des droits de l’Homme qu’à instaurer modèle les systèmes juridiques des états membres. Il est aujourd’hui même en action dans la mesure où se rassemble ces 14 et 15 octobre à Strasbourg les ministres de la Justice du Conseil de l’Europe autour de la question de la justice à l’ère du numérique.
Dans ce contexte d’allégeance de la France à un droit communautaire qui mute et redessine sa conception historique des droits de l’Homme il est légitime de se demander quels sont les effets de la Convention EDH sur le système juridique français.
Son impact est double en cela qu’il l’influence et le contraint. Comme nous l’avons mentionné, la Convention EDH a insufflé un renouveau notre vision des droits de l’Homme Son influence est également palpable au niveau de nos juridictions dont le rôle est modifié par le principe de subsidiarité. D’autre part, le droit interne français est soumis à cet ordre juridique supérieur, ainsi lois et règlements doivent lui être conformes sous peine de sanction.
Ainsi nous étudierons tout d’abord l’influence de la Convention EDH sur le droit national (I) avant de nous pencher sur sa prééminence vis à vis de l’ordre juridique interne (II).
I. L’influence notoire de la Convention EDH sur le Droit national
La convention EDH a modifié le paysage juridique français à deux principaux égards. D’une part, d’un point de vue idéologique elle a transformé la signification révolutionnaire des droits de l’Homme (A). D’autre part, l’application de la convention EDH par les juridictions françaises a motivé des aménagements de ces dernières (B).
A. Une forte influence sur la conception des droits de l’Homme française
On peut considérer l’héritage occidental des droits de l’Homme comme découlant pour une grande de la tradition française. La convention EDH en est ainsi empreinte bien qu’elle allie les cultures juridiques d’une multitude de nation. Elle s’inspire notamment d’un texte iconique en la matière : la déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen de 1789. Toutefois en s’appropriant ses principes, la convention EDH a transformé ce droit. En effet, en au lendemain de la Révolution, des penseurs, hommes de la bourgeoisie et du clergé, tels que l’abbé Sieyès ou le marquis de La Fayette forment une assemblée constituante afin d’établir un texte permettant de préserver le peuple des abus de
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