La séparation des pouvoirs, facteurs d'un régime démocratique ?

La séparation des pouvoirs, facteurs d'un régime démocratique ?

Selon Abraham Lincoln, "La séparation des pouvoir est un facteur de démocratie, caractérisée par un gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple ». Ainsi, on comprend donc que la séparation des pouvoirs est un principe qui permet de garantir la démocratie.

En effet, la séparation des pouvoirs est évoquée par le philosophe anglais John Locke à la fin du XVIIe siècle, en France par Montesquieu. Dans De l'Esprit des lois (1748), il distingue trois pouvoirs : le pouvoir de voter la loi, c'est le pouvoir législatif, le pouvoir d'exécuter les lois, c'est le pouvoir exécutif ; le pouvoir de rendre la justice, le pouvoir judiciaire. Selon Montesquieu : "pour qu'on ne puisse abuser du pouvoir, il faut que, par la disposition des choses, le pouvoir arrête le pouvoir. » L’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen (DDHC) de 1789 énoncé également : "Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution". Ainsi, le concept de séparation des pouvoirs est aujourd'hui reconnu comme un principe à valeur constitutionnelle. De plus, dans les démocraties modernes, selon les pays, le principe de séparation des pouvoirs s’articule de manière différente. On distingue la séparation stricte ou souple selon le niveau d'intervention et de contrôle des pouvoirs. La séparation souple des pouvoirs désigne l'organisation d'un État dans lequel les différents pouvoirs collabore de nombreuse fois entre eux. C'est le cas en France où le pouvoir exécutif peut intervenir dans l'élaboration des lois et le pouvoir législatif peut intervenir dans des fonctions relevant du gouvernement. 

Dans un système de séparation stricte, les pouvoirs sont distincts (c'est-à-dire spécialisés et organiquement séparés) mais ils disposent de moyens d'action réciproques. C'est le cas des États-Unis on l'on parle de checks and balances : les pouvoirs s'équilibrent et se complètent mais ne peuvent empiéter les uns sur les autres. Dans la pratique, la séparation ne peut être totalement stricte, car il est très compliqué de maintenir un équilibre entre les pouvoirs sans qu'il n'y ait aucune collaboration ni moyen de contrôle entre eux. 

En outre, il est nécessaire de définir les termes du sujet. La séparation des pouvoirs serait une technique constitutionnelle destinée à éviter le despotisme et à garantir la liberté des individus mais pas forcément celle du peuple dans son ensemble. En cela elle est une théorie libérale mais pas nécessairement démocratique. Le terme facteur quant à lui renverrait à un élément qui concourt à un résultat. Autrement dit, la séparation des pouvoirs serait un élément qui permet l'établissement d'un régime démocratique. En effet, le régime démocratique signifierait un régime politique fondé sur le principe que la souveraineté qui appartient à l'ensemble des citoyens, soit directement (par des référendums) soit indirectement par l'intermédiaire de ses représentants élus. Les élections doivent se tenir au suffrage universel, de façon régulière et fréquente.

Dans les différentes définition donnée, la séparation des pouvoirs semble être corrélée à l'établissement d'un régime démocratique puisqu'elle permet d'éviter les abus et donc de garantir les liberté. En effet, la démocratie est un débat, parfois une tension entre des positions diverses. C’est ce principe qui justifie la séparation des pouvoirs. En effet, la séparation des pouvoirs (législatif, exécutif, judiciaire) est un principe fondateur de la démocratie, l’équilibre démocratique résulte aussi de la confrontation permanente d’opinions. Premièrement parce qu'avec les possibilités de contrôle réciproques qu'il installe entre les trois pouvoirs il permet à la puissance de s'autocontrôler et de s'autolimiter. Ensuite parce que l'histoire a montré que toutes les grandes démocraties modernes et durables l'ont adopté, tandis que dans tous les pouvoirs autoritaires qui ont existé, il y avait une complète confusion des pouvoirs. Néanmoins, c’est une théorie qui à été remise en cause. En premier lieu, on s’est rendu compte que, dans chaque régime politique, chaque organe n’avait pas une fonction si bien définie.  Dans l’esprit de la théorie classique, le pouvoir exécutif ne doit que prendre des mesures d’exécution de la loi ; il ne peut pas prendre des règles de portée générale. Le Premier Ministre détient en effet un pouvoir réglementaire qui lui permet de prendre des décisions de portée générale, comme les décrets d’application générale. Ce sont les règlements adoptés sur le fondement de l‘article 37 de la Constitution.  De plus, il peut en outre se voir déléguer le pouvoir législatif.Mais cette séparation stricte des pouvoirs est tempérée par des moyens de contrôle et d’action réciproques entre les pouvoirs. C’est la théorie des des checks and balances (freins et contrepoids).  A l’inverse, le Sénat américain peut bloquer le pouvoir de nomination de certains hauts fonctionnaires qui appartient à l’exécutif. La théorie classique a rarement été appliqué à la lettre au cours des différents régimes démocratiques. On préfère parler de principe de collaboration des pouvoirs. Certes, à la base, il y a toujours cette distinction entre législatif, exécutif et judiciaire. Pour autant, ces différents pouvoirs ont des moyens d’actions les uns envers les autres.

C'est pourquoi il serait intéressant de se demander si la séparation des pouvoirs est un préalable nécessaire à la démocratie. Pour répondre à cette question, nous allons dans un premiers temps voir comment comment cette séparation des pouvoirs s’exprime, en effet c'est un concept important à l’établissement d'un régime démocratique (I) et dans un second temps nous allons voir en quoi ce concept est limité dans le temps, en effet la séparation des pouvoirs n’est pas uniquement un facteur contribuant à l’établissement d’une démocratie (II).

I-/ la séparation des pouvoirs, garant d’un régime démocratique

Nous allons voir en quoi la démocratie parlementaire est un régime de séparation souple des pouvoirs (A) mais aussi un régime de séparation stricte des pouvoirs dans le cas d'une démocratie présidentielle (B)

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