Constitutionnalisme et constitution
Fiche : Constitutionnalisme et constitution. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Alizee Freire • 2 Novembre 2018 • Fiche • 10 739 Mots (43 Pages) • 650 Vues
Chapitre I: Constitutionnalisme et constitution
Caractère extrêmement relié, indissociable de ces 2 notions.
SECTION N°1: LE CONSTITUTIONNALISME
Nous pouvons définir le constitutionnalisme comme renvoyant, dans l’histoire, à un ensemble de courants de pensée militants pour l’encadrement du pouvoir. Le constitutionnalisme désigne le mouvement, apparu au siècle des Lumières, et qui s’est efforcé, d’ailleurs avec succès, de substituer aux coutumes existantes, souvent vagues et imprécises et qui laissaient de très grandes possibilités d’actions discrétionnaires aux souverains, des constitutions écrites conçues comme devant limiter l’absolutisme et parfois le despotisme des pouvoirs monarchiques. Les libéraux ont donc demandé à ce que les modes de dévolution et d’exercices du pouvoir politique soient fixés une fois pour toutes par une charte fondamentale servant de règle du jeu. Et, en effet, par son existence même, la Constitution entendue au sens formel, s’oppose à l’arbitraire en ce qu’elle définit un état de droit où n’est possible que ce qui est conforme aux règles qu’elle pose. Le constitutionnalisme est à certains égards un ensemble d’idées et de techniques justifiant la limitation du pouvoir par la mise en place d’une constitution.
§1 : L’importance et le legs, l’héritage du constitutionnalisme "ancien"
Le constitutionnalisme peut se définir par un ensemble de tendances historiques ayant permis l’apparition des constitutions en tant que techniques de limitations des pouvoirs. Ce n’est pas un courant récent puisqu’on le renvoie aux premières constitutions écrites.
A. La richesse de la pensée constitutionnelle ancienne
On hérite toujours de quelque chose. La pensée s’alimente de ce qui existait avant. Bien souvent, et à tort, on pense que tout a commencé en 1789, avec le siècle des Lumières. Or, le discours constitutionnel est bien plus ancien en réalité.
1. La pensée antique: l’homme est la mesure de toute chose
a) En Grèce
L’homme est central dans la réflexion morale grecque. La pensée des philosophes grecs est déjà une pensée des droits du citoyen, c’est pourquoi chez certains (Platon , Aristote) on retrouve des dénonciations des tyrans, on doit pouvoir agir contre ceux qui nous oppriment.
- Platon, la dénonciation du tyran, réflexion sur la limitation du pouvoir qui ne peut être illimitée (La République, livre IX)
- Aristote, réflexion sur quelle est la meilleure constitution pour une situation donnée, Réflexion sur la morale, l’éthique et le pouvoir politique (La Politique, livre III)
Ces deux auteurs se sont penchés sur des questions d’ordre politique observées sous l’angle de la justice. Le pouvoir n’appartient à personne, il s’agit d’une fonction déléguée à un monarque, à un président, à un prince…
Procédures contre les tyrans, ou les citoyens en devenir tyrans: ostracisme (Athènes) et pétalisme (Syracuse), une façon de poser des limites à la tentation d’un pouvoir absolu en chassant les tyrans, modes de résistance au pouvoir qui montrent un constitutionnalisme ancien, si ils en abusent, ils feront objet de procédures.
b) À Rome:
Les auteurs rédigent des discours inspirés des grecs, sur la tyrannie et les empereurs empreints de richesse. Les stoïciens influencent plus ou moins l’empereur romain.
- Cicéron: Les paradoxes de stoïciens (-47), cet ouvrage est une critique des empereurs avides de richesses et sombrant dans la tyrannie - constitution « mixte », les « miroirs des princes ». Texte sur la modération du pouvoir chez l’empereur en respectant le peuple romain.
- Sénèque: apologie de la liberté humaine -> de la vie heureuse (+42), réflexions sur la liberté de conscience humaine.
La lex regia: loi en vertu de laquelle, pour tous les républicains romains, l’empereur détiendrait son pouvoir du peuple lui-même, le pouvoir ne saurait être exercée de manière capricieuse ou de manière personnelle.
À Rome, il existe des règles juridiques très précises, notamment concernant l’élection des magistrats. Le Moyen Âge a beaucoup puisé dans les périodes antérieures, c’est une période très riche en inventions techniques qu’il faut sauvegarder.
2. Le "constitutionnalisme primitif" entre MA et Renaissance, protoconstitutionnalisme
Ce constitutionnalisme est aussi appelé « proto-constitutionnalisme », et peut faire allusion à un embryon de constitutionnalisme. On trouve un grand nombre de courants et de pratiques du Moyen Âge dans lesquels on aperçoit une esquisse de constitutionnalisme. Il n’y a pas la présence d’un despotisme ou d’un obscurantisme.
a) Des idées
- critiques des hiérarchies sociales immuables, les inégalités entre différentes catégories de sujets ou de citoyens de la part des auteurs du MA.
- critique de l’idée d’un droit divin au profit d’un droit naturel (le début des droits inaliénables et sacrés), tous les penseurs ne pensent pas que qu’ils tiendraient leur pouvoir de dieu, càd critiques assez lourdes portant sur l’idée d’un recul du droit divin des rois dans le discours de nombreux penseurs.
- émergence d’une conception du sujet et de la volonté: "ce qui intéresse tout le monde doit être réglé par tous" (quod ornes tangit); "celui qui préside à tous doit être l’élu de tous" (qui praefuturus est ab omnibus eligatur), (dans les assois de métiers dans les villes les universités de l’époque on a souvent ces idées là).
La réflexion philosophie qui émerge de la Renaissance est nouvelle, elle constitue en un basculement dans la conception de la société politique. On voit alors un nouveau constitutionnalisme, c’est l’avènement de l’autonomie et de la volonté.
Le constitutionnalisme correspond à des idées qui doivent être incarnées dans les procédures, c’est un versant technique des outils dans le constitutionnalisme. Le Moyen Âge serait alors d’une « extrême » efficacité pour la mise en forme des idées concrètes.
b) des techniques (différents laboratoires)
- le droit féodal (contrat féodo-vassalique). Le seigneur est un suzerain, il a des vassaux, se développe un contrat entre les deux par lequel ils s’engagent l’un vers l’autre, ce contrat est assorti de droits et de devoirs. Le suzerain n’est pas libre de ses mouvements et des termes du contrat, il a des obligations, même si on pourrait penser qu’il aliene, le roi a un code d’action car il a passé qu’il le veuille ou non un contrat avec le peuple.
- le droit des corporations et des communautés de métiers. Chaque corps de métier se donne des règles, il existe un droit des corporations. Le chef de corporation est appelé le "rector", roi simple. De nombreux auteurs expliquent la relation analogique entre le roi et son royaume et entre le rector et sa corporation => c’est un élément de séparation du pouvoir. On passe de réflexions juridiques de petits ensembles (corporations) à de grands ensembles (royaume).
- le droit des communes (villes franches, qui restent soumises à l’autorité du roi, mais possèdent des privilèges comme la République de Venise,…) : lorsqu’on élit le doge de Venise cela repose sur un constitutionnalisme ; nous sommes dans une République donc le doge n’a pas eu le pouvoir par droit divin mais par les citoyens de Venise.
Ainsi une réflexion constitutionnelle ne date pas des Lumières, c’est beaucoup plus complexe. La dynamique du constitutionnalisme est de postuler le fait que des éléments anciens se transmettent au constitutionnalisme contemporain. Nous avons besoin du passé pour avoir une perspective d’avenir.
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