Plaidoirie

Plaidoirie

Monsieur le Président, mesdames et messieurs les jurés, je suis aussi surpris que vous de me retrouver ici à défendre les intérêts de mon client. Comment la justice peut-elle à ce point défaillir qu’on en arrive à juger les faits et gestes d’une personne à la moralité irréprochable, alors même qu’il n’existe – comme je le démontrerai dans quelques instants – aucune preuve tangible des crimes dont on l’accuse ?

Est-il même nécessaire que je plaide ?

Je n’ai pas besoin de chercher de circonstances atténuantes à mon client puisqu’il n’a rien à se reprocher. Mais si l’un d’entre vous possède encore un soupçon de doute, un simple rappel du passé devrait achever de le convaincre.

Mon client, Douglas Templemore, journaliste britannique parti en Australie avec sa fiancée, Sybil Graeme, et les collègues anthropologues, géologues et paléontologues de celle-ci, découvre une espèce qui est apparue il y a un million d’années. Cette espèce est alors nommée Paranthropus erectus ou plus simplement Tropis.

Celui que vous accusez de meurtre est un Journaliste, un Citoyen engagé, un Être humain accompli. (temps de pause )

Mon client n’a jamais fait de délit; son casier est vierge. Cet homme a toujour été de nature calme, équilibré et impliqué dans son travail…

On ne peut accuser un Homme de meurtre, que lorsqu’il tue un autre Homme.

Or, les Tropis sont-ils des humains ?

Voici toute la question du débat d’aujourd’hui. Voici ce pourquoi mon client est là.

Voici ce qui pourrait régler cette affaire. (temps de pause lever la tête se tenir droit)

Pour l’instant mon client n’a ôté la vie qu’à une chose ne bénéficiant d’aucune législation juridique; une espèce non classifiée utilisée comme bête de somme par des hommes sans scrupules.

Pourquois perdre du temps sur ce détail futile, alors que la question de l’esclavage des Tropis est en jeu?

J’imagine que vous êtes au courant du fait qu’un certain Mr Vancruysen achète des terrains sur lesquels vivent les Tropis afin de les soumettre en esclavage dans de nouvelles usines textiles en Australie. Je ne reviendrai donc pas sur ce point bien qu’il me semble tout de même beaucoup plus important que les accusations contre mon client.

En effet en réalisant cet acte singulier mon client défend ici les Tropis de ne pas encore appartenir à une espèce définie et protégée et par là-même il défend l’économie britannique.

Nous voulons le bien de la Grande Bretagne et une main d’oeuvre gratuite serais une concurrence déloyale. Sans mon client, la question aurait duré des mois pour savoir quelle est vraiment la nature et l'espèce des Tropis … et cela aurait fait perdre beaucoup d’argent, non seulement à la Grande-Bretagne, mais au monde entier. (pause)

Pour conclure, Mr Templemore ne mérite point de sanction étant donné qu’en ce moment même les Tropis ne sont pas reconnus comme des hommes.

Mais

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