Le luxe et les soldes

Les soldes, c'est pas du luxe

13 janvier 2011 à 13:56 (Mis à jour: 16:41)

La boutique Vuitton sur les Champs Elysées. (AFP Thomas Coex)

-Par ELODIE AUFFRAY

La position officielle, chez Louis Vuitton, est claire: la maison ne pratique pas les soldes, car «nous n'y avons aucun d'intérêt, indique-t-on. Nous n'avons pas d'invendus. Nos produits sont de qualité et demandés, nous n'avons aucune raison de brader le travail de nos ateliers».

Pas de promotions donc, ni en saison de soldes ni même hors saison. Seule dérogation: quelques opérations, plutôt secrètes, destinées au personnel de la prestigieuse entreprise française, filiale du groupe LVMH.

«Parmi les lois d'une stratégie de luxe, il y a: ni soldes, ni délocalisation, ni licences, etc.», énumère Jean-Noël Kapferer, spécialiste des marques et coauteur de Luxe oblige avec Vincent Bastien, ancien directeur général de Louis Vuitton.

«L'absence de soldes, surtout revendiquée comme telle, est une stratégie commerciale, rien de plus», analyse Marie-Claude Sicard, auteure de Luxe, mensonges et marketing. «Les très grandes marques de luxe sont beaucoup plus discrètes, par exemple dans la haute horlogerie. Elles peuvent, au cas par cas et en toute confidentialité, proposer à tel ou tel client de "faire un geste", mais elles n'ont pas besoin de proclamer qu'elles ne font pas de soldes, cela va de soi.»

«Construction de l'excellence sociale des acheteurs»

«L'essentiel du ressort de la vente des produits de luxe repose sur la construction de l'excellence sociale des acheteurs, détaille Alain Quemin, sociologue à l'université Paris-Est et spécialiste de la consommation de luxe. Si les marques se mettent à solder, elles deviennent accessibles à plus de personnes, ce qui leur fait perdre une partie de leur valeur.»

Pour le sociologue, Vuitton est un archétype de cette stratégie, qui a aussi pour avantage, selon Marie-Claude Sicard, de pouvoir «se refaire une virginité à peu de frais, et de contrebalancer es excès médiatiques en tout genre». Comprendre: les campagnes de publicité très onéreuses et autres opérations de communication, qui ne sont pas l'apanage du vrai luxe, moins tapageur.

L'autre modèle, c'est celui d'Hermès, qui solde «discrètement et au compte-goutte», indique Marie-Claude Sicard. La marque organise, deux fois par an, des soldes publiques. Elles ont lieu hors magasins, au Palais des congrès de Paris. La collection en cours n'est pas bradée: cette année, les consommateurs y trouvent les collections printemps-été 2010, et un peu d'automne-hiver 2009. Mais, souligne Alain Quemin, ces soldes de luxe «se méritent. Il y a des files d'attente monstrueuses. On est toujours dans la mise en scène de la désirabilité du produit».

D'autres marques sacrifient aux opérations de promotion, notamment via des ventes privées. «C'est une forme de soldes, mais qui permet de conserver une sélection, en particulier sociale», explique Alain Quemin.

(Source: Wat TV)

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