Responsabilite internationale etat d'interaction
Analyse sectorielle : Responsabilite internationale etat d'interaction. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Momodiop • 26 Mars 2015 • Analyse sectorielle • 9 051 Mots (37 Pages) • 828 Vues
ANNUAIRE FRANÇAIS DE DROIT INTERNATIONAL
LV – 2009 – CNRS Éditions, Paris
LE CODIFICATEUR ET LE JUGE FACE
À LA RESPONSABILITÉ INTERNATIONALE
DE L’ÉTAT : INTERACTION
ENTRE LA CDI ET LA CIJ DANS
LA DÉTERMINATION DES RÈGLES SECONDAIRES
SANTIAGO VILLALPANDO
Résumé : Après avoir souligné la place que la jurisprudence de la Cour internationale de
Justice a prise dans les travaux de codification par la Commission du droit international de
la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite, l’article analyse l’influence
que ces travaux ont exercée sur la jurisprudence de la Cour, qui s’en est parfois inspirée,
mais l’a souvent aussi contournée. L’article vise à démontrer l’existence d’un processus
qualifié d’« autocatalytique » suivant lequel l’interaction entre la Commission et la Cour
contribue à la consolidation du droit international dans un domaine déterminé.
Abstract: After underscoring the scope of the International Court of Justice’s case
law in the International Law Commission’s work on codifying State responsibility for
internationally wrongful acts, this contribution examines the influence that work has
exerted over the jurisprudence of the Court, which has sometimes been inspired by
it, but has often circumvented it. The paper aims to prove there is a “self-catalysing”
process by which interaction between the Commission and the Court helps to consolidate
international law in a given domain.
INTRODUCTION
L’organe judiciaire principal des Nations Unies et celui auquel l’Assemblée
générale a confi é la codifi cation et le développement progressif du droit international
entretiennent des relations étroites, qui sont bien connues du juriste et
unanimement célébrées comme apportant une contribution essentielle à la cause
du droit des gens. Cependant, si des bibliothèques entières sont remplies d’exégèses
de la jurisprudence de la Cour internationale de Justice (CIJ) et des travaux de
la Commission du droit international (CDI), peu d’études se sont spécifi quement
concentrées sur leur interaction 1, qui révèle pourtant des aspects intéressants sur
l’exercice par ces deux organes de leurs mandats respectifs.
(*) Santiago VILLALPANDO, docteur (droit international), IUHEI (Genève) ; juriste à la division de
codifi cation, bureau des affaires juridiques, Nations Unies ; ancien juriste à la CIJ. Les opinions exprimées
dans la présente étude sont celles de l’auteur et ne refl ètent pas nécessairement celles de l’Organisation
des Nations Unies ou de la Cour internationale de Justice.
1. Voy. notamment, Stephen M. SCHWEBEL, « The Inter-Active Infl uence of the International Court of
Justice and the International Law Commission », in C.A. ARMAS BAREA et al. (dir.), Liber Amicorum « In
Memoriam » of Judge José María Ruda, La Haye, 2000, pp. 479-505.
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40 RESPONSABILITÉ INTERNATIONALE DE L’ÉTAT
La division des fonctions entre la Cour et la Commission est, du moins en
principe, limpide, celle-ci ayant pour but « de promouvoir le développement progressif
du droit international et sa codifi cation » 2, celle-là ayant reçu la mission « de régler
conformément au droit international les différends qui lui sont soumis » 3. Pour ce
faire, pourtant, la Cour et la Commission sont toutes deux appelées à identifi er les
normes internationales et leurs chemins sont dès lors nécessairement appelés à se
croiser. En effet, comme le précise le statut de la Cour, « les décisions judiciaires et
la doctrine des publicistes les plus qualifi és des différentes nations » constituent des
« moyen[s] auxiliaire[s] de détermination des règles de droit » 4. Ainsi, la Cour, bien
qu’elle reste très réticente à invoquer les ouvrages d’auteurs particuliers 5, hésite
de moins en moins à faire appel aux travaux de la Commission, organe réunissant
les publicistes les plus qualifi és. Quant à la Commission, elle prend appui pour son
œuvre de codifi cation sur les décisions judiciaires, et notamment la jurisprudence
de la CIJ, chef de fi le des juges internationaux 6.
Ce rapprochement ratione materiae s’accompagne d’une affi nité ratione personae
qui facilite l’interaction. Les membres de la Cour et ceux de la Commission ont ceci
en commun qu’ils siègent à titre individuel 7 et sont élus par des organes principaux
des Nations Unies 8 parmi les personnes possédant une compétence reconnue
ou notoire en matière de droit international 9. Il n’est dès lors pas surprenant de
constater que plus d’un tiers des membres de la Cour ont également siégé en tant
que
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