Rétroactivité de la loi
Dissertation : Rétroactivité de la loi. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar apeja • 30 Janvier 2018 • Dissertation • 2 144 Mots (9 Pages) • 2 620 Vues
TD 6 : Droit civil
La rétroactivité des lois
« L’office de la loi est de régler l’avenir ; le passé n’est plus en son pouvoir. Partout où la rétroactivité serait admise, non seulement la sûreté n’existerait plus, mais son ombre même. [...] Que deviendrait donc la liberté civile, si le citoyen pouvait craindre qu’après coup il serait exposé au danger d’être recherché dans ses actions ou troublé dans ses droits acquis, par une loi postérieure ? »
C’est dans ces mots que Jean-Étienne-Marie Portalis présente et définit en 1801 le principe de non-rétroactivité des lois pour le premier projet de Code civil. On retrouve cela à l’article 2 du Code Civil « la loi ne dispose que pour l’avenir, elle n’a point d’effet rétroactif ». Le principe de non-rétroactivité des lois signifie qu’une loi ne peut être appliquée à des actes ou à des faits qui se sont passés avant son entrée en vigueur. Une loi nouvelle ne peut en principe modifier ou effacer les effets juridiques d’une loi ancienne. Par ailleurs, la loi dispose pour l’avenir, c’est-à-dire qu’à partir du moment où une loi entre en vigueur, elle régira les situations juridiques futures. La question de « l’application de la loi dans le temps » se pose quand il s’agit de préciser quels sont le domaine respectif d’une loi nouvelle et celui de la loi ancienne qu’elle remplace. Les règles d’entrée en vigueur et d’abrogation de la loi ne suffisent pas pour déterminer quels seront les faits et les actes soumis à la loi ancienne et ceux soumis à la loi nouvelle. Il peut y avoir des conflits de lois dans le temps, c'est-à-dire des conflits entre deux lois successives pour leur application à une situation juridique donnée. En réalité, le problème ne se posera réellement qu’en présence d’une situation juridique qui est née sous l’emprise de la loi ancienne et qui continue de produire ses effets alors qu’une loi nouvelle intervient. Ce type de conflits, accrus par l’inflation législative, le législateur doit trouver une solution qui permet de tracer les limites entre la loi ancienne et la loi nouvelle. Le problème a vu le jour en 1804 au lendemain de la codification Napoléonienne. L’empereur a hérité d’un empire qui contenait une pluralité de droit, son ambition avec la création du Code Civil était de réunir et de clarifier toutes les lois de son empire. Néanmoins, cette codification n’a pas été sans poser de problème puisque la loi est un élément écrit qui régit, et qui encadre des phénomènes humains qui sont dans leur essence en mouvement. On pouvait se demander comment aller être jugé les affaires qui étaient en cours sous l’ancienne loi avant 1804 et après, ou même entre ces deux périodes. C’est là que les premiers conflits de lois dans le temps sont apparus. En outre, le droit se méfie de la rétroactivité, car elle semble souvent contraire à la sécurité juridique. La sécurité juridique est de permettre aux citoyens une stabilité juridique pour gérer leur situation mais pour cela il faut réduire les risques résultant des difficultés d'accès au droit, de défaut de clarté et de lisibilité du droit, de ses incohérences et complexités, de ses modifications trop fréquentes. Les individus ont organisé leurs activités en tenant compte de leur environnement juridique. Si celui-ci est modifié par une loi nouvelle, les contrats ou autres techniques juridiques prévus risquent de ne plus être adaptés, voire ne plus être valables à l’égard des nouvelles dispositions légales. Le souci de sécurité impose de ne pas remettre en cause les actes passés conformément à une loi connue et parfois même choisie entre plusieurs régimes possibles par les parties.
Ce sujet mérite notre intérêt à plusieurs égards. D'une part, la loi ne suis pas les comportements humains à la lettre néanmoins elle trouve le moyen de s’y adapter par le biais notamment des doctrines ou encore la Jurisprudence. D’autre part, la rétroactivité de la loi pose de nombreux problèmes pour les citoyens.
Pour ces raisons, nous délimiteront notre sujet à l'étude de la résolution des conflits entre la loi ancienne et la loi nouvelle. Mais aussi à la sécurité, le besoin de sécurité exige que l’on restreigne au maximum le domaine d’application dans le temps de la loi nouvelle.
On tentera de répondre ainsi à la question de savoir si est-ce que les conflits des lois dans le temps assurent la sécurité juridique des sujets de droit ?
Tout d’abord, on verra dans une première partie que le principe de rétroactivité la sécurité juridique est préservée (I) puis qu’elle peut être aussi menacée (II).
I) La sécurité juridique préservée
La question des conflits des lois dans le temps se relève particulièrement complexe car elle met en cause des préoccupations multiples et contradictoire, mais également parce qu’elle se pose différemment selon le type et le moment de l’activité juridique concernée par la loi nouvelle. C’est pourquoi, il existe le prince de non rétroactivité des lois (A), mais aussi que suivant les situations la loi ancienne reste applicable (B).
A) La non rétroactivité des lois
Le principe de non rétroactivité de la loi est énoncé par l’article 2 du Code Civil « La loi ne dispose que pour l’avenir, elle n’a point d’effet rétroactif ». En effet, il est interdit de revenir sur la conclusion passée d’une situation juridique mais aussi sur ces effets juridiques antérieurement constituée, que cette situation juridique soit légale ou contractuelle. Par exemple, si un prêt a été conclu avec des intérêts fixés à un taux qu’une loi nouvelle déclare excessif après que ledit prêt a été remboursé et les intérêts payés, l’emprunteur ne pourrait pas se prévaloir de cette nouvelle loi pour remettre en question la dette qu’il a acquittée. Ainsi, la règle a une portée générale, elle concerne toutes les situations juridiques quelle que soit leur nature, mais également elle est reconnue autant en droit public qu’en droit privé. Ce principe est rationnel et juste car il vise à protéger les citoyens, leur assurer une sécurité juridique. Or, il n’y aurait plus aucune sécurité juridique si on remettait en question les actes passés par les individus. Par ailleurs, si les lois avaient un effet rétroactif, il n’y aurait plus aucun intérêt à les respecter. En effet, n’importe quelle prescription pourrait être remis en cause alors.
A la différence de la Constitution de l’an III, le principe de non rétroactivité ne figure pas dans notre Constitution. Aussi, ce principe ne s’impose qu’au juge. Le législateur peut y porter atteinte de façon directe en adoptant des lois expressément rétroactives, soit de façon indirect en adoptant des lois interprétatives ou bien en laissant la libre appréciation de ce principe au juge (B).
B) La survie de la loi ancienne
Selon le Doyen Paul Roubier, la survie de la loi ancienne est logique puisque qu’il s’agit de situations dont la loi laisse ordinairement la maitrise aux volontés individuelles, il est normal que ce que ces volontés ont légitimement établi ne puisse être ensuite bouleversé. De plus, la jurisprudence est d’accord avec ce principe tel qu’il en témoigne dans un arrêt de la première chambre civile de la Cour de Cassation « les effets d’un contrat conclu antérieurement à la loi nouvelle, même s’ils continuent à se réaliser postérieurement à cette loi, demeurent régis par la disposition de la loi sous l’empire de laquelle le contrat a été passé… ». C’est le cas notamment en matière contractuelle, un contrat reste soumis à la loi ancienne jusqu’à la fin de la durée de son exécution. De plus, l'article 2 du code civil a valeur légale et non constitutionnelle : le législateur peut donc y déroger et décider de la rétroactivité d'une loi, en le précisant expressément dans celle-ci, conformément au principe de Hiérarchie des normes en droit français. Il en est ainsi des lois interprétatives ou des lois de validation, qui deviennent cependant rares et sont soumises à des conditions. Le Conseil constitutionnel contrôle qu'un intérêt général suffisant justifie la rétroactivité de la loi. C’est le cas de l’affaire Draon c. France et Maurice c. France du 6 octobre 2005, l’Assemblée Nationale a adopté le 4 mars 2002 une loi mettant fin à la jurisprudence dite « Perruche » de la Cour de cassation française. L’article premier de cette loi dispose que « Nul ne peut se prévaloir d’un préjudice du seul fait de sa naissance ». A la suite d’une erreur de diagnostic prénatal, un enfant est né handicapé. Au nom de l’enfant, les parents entendent obtenir réparation des préjudices subis en raison de son handicap. Ils s’appuient sur la jurisprudence « Perruche ». L’instance est introduite avant l’entrée en vigueur de la nouvelle loi. Le tribunal français, appelé à statuer après l’entrée en vigueur de la loi et faisant application de celle-ci, rejette toutefois cette demande d’indemnisation. Puis, les parents ont saisi la Cour européenne des droits de l’homme, estimant notamment que l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme par rapport au droit au respect de la vie privée et familiale. Mais la cour à conclut à la non-violation de l’article 8, parce que le législateur s’est prononcé sur la base de motifs d’intérêt général et n’a pas dépassé la marge d’appréciation large qui lui est reconnue en la matière.
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