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Les révisions constitutionnelles sous la Ve République

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Par   •  18 Septembre 2019  •  Dissertation  •  3 149 Mots (13 Pages)  •  487 Vues

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  1. Les révisions constitutionnelles sous la Vè République        (juin 2003)

En novembre 1992, le « comité Vedel » institué par le président de la République est invité à réfléchir à un rééquilibrage des pouvoirs et à un renforcement des droits des citoyens. Publié dans le Journal officiel du 16 février 1993, la réécriture de la Constitution par ce comité d’experts n’eut qu’un retentissement limité. Pourtant, à ce jour dix-sept révisions constitutionnelles ont eu lieu sous la Vè République, dont douze depuis 1992. C’est pourquoi, certains ont tiré argument de cette récente multiplication pour dénoncer le vieillissement de la loi d’octobre 1958 et proposer de la remplacer purement et simplement afin de fonder un nouveau régime. D’autres au contraire, les plus nombreux, lui trouvent encore des qualités et préfèrent les retouches à la mise en cause intégrale. Quelque position que l’on adopte, il reste un constat : le texte constitutionnel n’est pas éternel.

Cet état de fait n’est d’ailleurs pas nouveau puisque, à propos de la Constitution, la déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 24 juin 1793 disposait dans son article 28 qu’ « une génération ne peut assujettir à ses lois les générations futures ». Ainsi, si « la perpétuité est dans le vœu de la loi », entraver toute possibilité de révision de celle-ci serait en quelque sorte contre-nature parce qu’antisocial. Permanence et stabilité de l’ordre juridique ne sont donc pas incompatibles avec l’idée de réforme. Bien au contraire, et pour suivre Burdeau, on serait tenter d’affirmer que comme « superstructure de la constitution sociale », la constitution politique ne joue pleinement son rôle qu’en faisant écho à l’évolution de celle-là. Tout ceci suppose donc que soit instituée la possibilité de révision constitutionnelle.

Dans la Constitution écrite de la Vè République, c’est à un pouvoir constituant dérivé qu’il appartient de réviser la norme suprême. A l’origine, l’exercice de ce pouvoir connaissait deux procédures. La première, issue de l’article 85 abrogé le 4 août 1995, posait des règles simplifiées de modification des institutions de la Communauté. L’unique recours à cet article remonte au 4 juin 1960 et ne présente plus guère qu’un intérêt historique aujourd’hui. La seconde, organisée par l’article 89, fixe les règles de droit commun de la révision. La rigidité de la procédure qu’il définit vise à protéger l’intégrité de la volonté du souverain : bicamérisme égalitaire, recours au référendum ou adoption à la majorité qualifiée. Il était donc légitime de penser que seul cet article fondait le pouvoir constituant dérivé. Or, la pratique a démontré le contraire. Non seulement l’exclusivité de la procédure de l’article 89 a été contournée mais, par surcroît, elle semble avoir été accaparée par le Président de la République au détriment des autres intervenants.  

Faire que la norme suprême soit en continuelle adéquation avec les changements qu’apporte le temps, d’une part, traduire le texte par la pratique après en avoir découvert le sens, d’autre part, paraît participer d’un même objectif : apporter la meilleure réponse juridique possible à un problème politique. Cela étant, les logiques qui sous-tendent la réalisation de ces deux intentions diffèrent.

La question procédurale qui renvoie à l’aspect formel de la constitution enseigne sur les motifs politiques qui ont conduit à certains choix. C’est de ces politiques de révision qu’il sera question dans la première partie (I). Enfin, la nécessaire adaptation du texte, renvoyant à l’aspect matériel de la constitution, concerne plus spécialement les révisions politiques (II). Ce sera l’objet de notre deuxième partie.

 

  1. I – Les politiques de révision 

Au-delà de l’aspect procédural que régit la Constitution, il serait intéressant d’interroger les pratiques ayant conduit aux révisions de la norme suprême. Pourquoi a-t-on eu recours à l’article 11, doit-on le contester, comment l’article 89 est-il utilisé, voilà le questionnement qui guidera nos développements.

  1. A – Le mise en œuvre de l’article 89

Le premier alinéa de l’article 89 pose clairement que l’initiative d’une révision est partagée entre le Parlement et le président de la République. L’article ajoute que la procédure prend fin, en principe, avec l’approbation par referendum. Par conséquent, les termes de l’article semble indiquer que le peuple et ses représentants occupent une place centrale dans le dispositif. Il n’y a pas de quoi s’en étonner s’agissant de la loi constitutionnelle, acte souverain par excellence. Mais cette rapide lecture est trompeuse. A la vérité, tant l’initiation que la conclusion d’une révision sont dans une large mesure le fait du président de la République qui devient en quelque sorte le « maître de la procédure ».  

D’abord, si l’article précise que l’initiative peut procéder du président de la République sur proposition du premier ministre, on peut affirmer que dans la réalité il en va tout autrement. En effet, comment croire qu’en dehors des périodes de cohabitation l’initiative du président soit conditionnée par une proposition formelle de son 1er ministre. Chef du parti de gouvernement, l’élu du peuple imposera sa volonté si bien que l’on peut prétendre qu’il propose et initie les révisions constitutionnelles. Pour les mêmes raisons l’initiative parlementaire affirmée par l’article se trouve paralysée. Des dix à vingt propositions de révision par an qui sont déposées aucune n’a jamais abouti. Il faut dire que l’article 48 donne la maîtrise de l’ordre du jour des assemblées au Gouvernement qui privilégiera la discussion des projets de loi.

Depuis l’entrée en vigueur de la Constitution, une seule révision a été soumise au référendum pour être approuvée : l’institution du quinquennat présidentiel. Le souverain est donc écarté au profit des chambres alors que le texte faisait du referendum la conclusion normale de la procédure. Cherche-t-on à prendre ses distances avec les pratiques plébiscitaires de de Gaulle ou craint-on la censure du peuple ? on devine tout de même que la mise en jeu, par ce biais, de la responsabilité politique du président de la République n’est pas souhaitée. Tant et si bien que la censure politique du parlement est elle aussi écartée. On se souviens, en effet, que diverses tentatives de révision n’ont pas été conduites à leur terme pour cette raison. Lorsqu’une révision, initiée comme on l’a vu par le président de la République, a été adoptée dans les mêmes termes par les deux chambres avec une majorité étroite, la crainte de voir le Congrès ne pas l’adopter à la majorité qualifiée des 3/5 a poussé le président a différé sine die son choix entre le Congrès et le référendum. La situation s’est présentée en octobre 1973 lorsque Pompidou a voulu réduire à 5 ans la durée du mandat présidentiel, en septembre 1974 lorsque V. Giscard d’Estaing voulait réformer le statut des suppléants des parlementaires. Suivant une voie différente, J. Chirac a fait la même chose : en janvier 2001, il a abrogé le décret de convocation du Congrès défavorable à la réforme du Conseil supérieur de la magistrature.

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