La République Thermidorienne

LA RÉPUBLIQUE THERMIDORIENNE

Le 9 Thermidor an II, la chute de Robespierre marque une inflexion dans le déroulement de la Révolution française. Sa mort le lendemain entérine définitivement l’abandon du régime dictatorial des Comités et de la Terreur et laisse le champ libre aux Girondins, vainqueurs de Thermidors surnommés Thermidoriens, pour rédiger une nouvelle Constitution. La Convention Thermidorienne devient alors un régime transitoire pendant la rédaction de la Constitution qui est adoptée le 5 fructidor de l’an III et qui instaure le Directoire. Après la chute de Robespierre, les Thermidoriens mettent ainsi en place une réaction anti-révolutionnaire par l’intermédiaire du nouveau régime. La Commission chargée de rédiger la nouvelle Constitution est composée de 11 membres, dont Boissy d’Anglas et Sieyès qui démissionne par la suite du fait de désaccords. Le texte rédigé prend le contrepied la Constitution de 1793 en affirmant la nécessité de maintenir l’ordre et de prévenir le despotisme. Il est d’esprit conservateur voire réactionnaire et tend à limiter la démocratie et les libertés. Ayant voté la mort du roi, les Constituants ne veulent pas d’une restauration monarchique et optent donc pour la République. Les Constituants de la Commission des Onze tentent d’élaborer un édifice stable, durable et ordonné qui mettrait un terme aux excès du début des années 1790 et institutionnalisant de cette manière le pouvoir sans partage des possédants. Dans les faits, le Directoire connaît durant ses quatre années d’application un nombre non-négligeable de tentatives de coups d’Etat qui sont les symptômes d’un relatif dysfonctionnement du régime. Le dernier sera mené par le général Bonaparte le 18 brumaire an VIII, qui fera adopter une nouvelle Constitution et mettra un terme à celle de l’an III.

Face au constat des ambitions des Constituants de l’an III, nous pouvons ainsi nous interroger sur leur volonté de “terminer la Révolution”.

Dans quelle mesure la Convention thermidorienne et sa suite, le Directoire, marquent-ils la volonté des constituants de “terminer la Révolution” ?

I) LES PRINCIPES DIRECTEURS DE LA CONSTITUTION DU 5 FRUCTIDOR AN III : RÉTABLIR L’ORDRE ET ANCRER LA RÉPUBLIQUE

Il faut donc analyser dans en premier lieux les objectifs et les moyens d’y parvenir que met en oeuvre la Commission des Onze dans la Constitution du 5 fructidor. Les principes directeurs sont doubles et participent à l’élaboration d’une nouvel ordre après les épisodes de la Révolution. Il s’agit dans un premier temps de rétablir l’ordre par un texte tourné contre les abus de la Révolution, puis de parvenir à un régime stable qui puisse s’inscrire dans le temps.

1) Une réaction à la Terreur et aux abus de la Révolution

On décèle donc chez les Thermidoriens un volonté d’encadrer strictement la société et le système politique pour ne pas renouveler les abus despotiques. Cela se traduit par une limite des libertés. Pour les Constituants, la démocratie entendue de façon absolue a provoqué la Terreur et il est donc important de la limiter. Premièrement, la participation populaire au processus politique est fortement réduite. Le peuple se voit refuser le droit à l’insurrection et mes dispositions relatives à la liberté de culte ou à la liberté de la presse disparaissent de la Constitution.

D’autre part, en préambule du texte, la Déclaration des droits de l’homme rédigée en 1789 devient la Déclaration des droits et des devoirs de l’homme et du citoyen. Son premier article, qui était originellement “les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits” devient “les droits de l’homme en société sont la liberté, l’égalité, la sûreté, la propriété”. On remarque donc une volonté des Thermidoriens de restructer la société post-révolutionnaire sur de nouvelles bases. Cependant, selon Boissy D’Anglas, la Constitution doit “se garantir avec courage des principes illusoires d'une démocratie absolue et d'une égalité sans limites sont incontestablement les écueils les plus redoutables pour la véritable liberté”. Le texte du 5 fructidor an III admet donc nier quelques principes de la démocratie adoptés en 1789, comme à l’article 66 où est rompu l’absence formelle de secret en politique. Les Conseils sont ainsi autorisés à se tenir en comité général secret pour discuter, mais pas pour délibérer. Enfin, le texte à vocation a conjurer tous les risques de dérive despotique. L’article 69 notamment interdit aux Directeurs de faire passer ou séjourner aucune troupe sans autorisation dans un rayon de 60 km autour du lieu de séances des Conseils. On retrouve bien là une volonté de se prémunir contre une insurrection ou un abus de pouvoir.

2) La recherche de stabilité

La recherche de stabilité du régime directorial s’appuie sur le retour du suffrage censitaire pour permettre une politique plus éclairée. Il s’agit du retour d’une politique élitiste inspirée par la grande bourgeoisie. Bussy d’Anglas déclare dans le rapport de la Commission des Onze "Nous devons être gouvernés par les meilleurs : les meilleurs sont les plus instruits et les plus intéressés au maintien des lois". Il faut s’acquitter d’un cens financier, être propriétaire, pour pouvoir participer aux élections primaires qui visent à élire les grands électeurs. Ce cens primaire est payé par environ 6 millions de personnes, qui élisent 30.000 grands électeurs s’acquittant d’un cens secondaire bien plus important. La démocratie est donc limitée au possédants et les classes les plus pauvres sont mises à l’écart du processus politique. La Thermidoriens honorent toutefois l’action de la Révolution puisque l’article 9 de la Constitution dispose que sont citoyens, sans aucune condition de contribution, les Français qui auront fait une ou plusieurs campagnes pour l'établissement de la République. L’article 12 tend à réduire encore les électeurs primaires par l’ajout d’un cens culturel à l’inscription sur la registre civique. Il faudra alors à partir de l’an XII savoir lire, écrire et savoir exercer une profession mécanique pour prétendre à ses droits en temps que citoyen.

La recherche de stabilité s'opère aussi par une volonté de maintien de la société. Les Thermidoriens évoquent pour la première fois l’idée de “devoir” associée aux droits de l’homme et du citoyen. En ce sens, ils joignent à la Constitution une Déclaration des devoirs

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