Commentaire de l’arrêt DESCHAMPS du 25 février 1988
Commentaire d'arrêt : Commentaire de l’arrêt DESCHAMPS du 25 février 1988. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Baptiste Dufaure • 3 Octobre 2017 • Commentaire d'arrêt • 2 824 Mots (12 Pages) • 1 414 Vues
Commentaire de l’arrêt DESCHAMPS du 25 février 1988
Tout comme en enfance, dans le monde du travail il peut s’avérer parfois utile de dénoncer certaines pratiques.
Il s’agit d’un arrêt rendu le 22 février 1988 par la chambre sociale de la Cour de cassation qui traite de la suppression d’une gratification devenues constitutive d’un 13ème mois.
En l’espèce, Mme Deschamps et six autres salariés de la société Desarbre avaient pour habitude de recevoir depuis 1972 une gratification devenue une prime constitutive d’un 13ème mois et par conséquence un accessoire de salaire. Cependant pour l’année 1982-1983, l’employeur a décidé de ne pas verser ce 13ème mois en supprimant ladite prime.
Mme Deschamps et ses collègues ont donc assigné l’entreprise en paiement de leur prime constitutive d’un 13ème mois pour l’année 1982-1983, prime qui est devenue obligatoire.
Par un jugement du 6 décembre 1984, le conseil de prud’hommes de Roanne a débouté les requérantes salariées de leur demande en paiement de la prime du 13ème mois que leur employeur a décidé de supprimer au titre de l’année 1982-1983.
Les requérantes ont donc formé un pourvoi près la Cour de cassation où ceux-ci avancent que toute modification substantielle du contrat de travail envisagée par l’employeur et refusée par le salarié est soumise à l’affirmation des juges qui doivent vérifier le bienfondé de la modification substantielle ou du refus. Les requérantes font aussi mention de la situation financière de l’entreprise qui ne peut en aucun cas influer sur leur prime.
Or ce que les requérantes omirent de préciser était que l’employeur avait procédé à une dénonciation de l’usage ne répondant pas aux conditions de l’article L.132-19 du Code du travail. Par cette dénonciation obligatoire, et en ayant respecté la publicité de l’information ainsi que le délai, l’employeur a supprimé la prime.
Il convient alors de se demander si un employeur peut-il légitimement supprimer la prime de 13ème constitutive d’un accessoire de salaire par usage d’entreprise lorsque celle-ci est attribuée en désaccord avec le Code du travail ?
La cour de cassation par un arrêt rendu le 25 février 1988 en sa chambre sociale a rejeté la demande des salariées en ce qu’ils souhaitaient le versement de leur 13ème mois puisque l’employeur a prévenu les salariés à plusieurs reprises, qu’il a respecté le délai de préavis il a pu légitimement supprimer la prime obligatoire par dénonciation régulière.
Afin de répondre à cette problématique il convient d’étudier dans un premier temps le régime de la prime résultant d’un usage d’entreprise (I), puis d’étudier la dénonciation régulière (II).
I La force obligatoire de la prime résultant d’un usage d’entreprise
Les primes et gratifications revêtent des formes multiples : treizième mois, prime de fin d’année, prime de vacances, prime de bilan, prime de vacances, prime d’ancienneté… Malgré la diversité de leur objet, ces primes et gratifications peuvent, s’agissant de leur régime juridique être regroupées en deux grandes catégories selon qu’elles ont un caractère obligatoire ou bénévole (A). La suppression de la prime en fonction de sa caractérisation va se heurter à des impossibilités (B).
- La caractérisation de la prime
- L’exclusion de la prime bénévole
Les gratifications sont dites bénévoles lorsque l’employeur peut décider en tout liberté de l’opportunité de leur versement ainsi que de leur montant, elles constituent alors une libéralité et n’ont pas le caractère juridique du salaire. Or en l’espèce, il apparaît clairement qu’il s’agit d’une prime obligatoire comme le précise la Cour de cassation au cours de cet arrêt « prime du treizième mois constitutive d’un accessoire du salaire et présentant un caractère obligatoire ».
Il apparait d’ores et déjà qu’il va y avoir quelques complications quant à la suppression de ladite prime, puisque n’étant pas une gratification bénévole, de par sa définition, l’employeur ne peut décider en toute liberté le versement du montant. Il s’agit d’une prime obligatoire, reste à savoir quel type de prime.
- Le type de prime obligatoire
Dans l’attendu décision il est fait mention « …de la prime de 13e mois… devenu par, voie d’usage, obligatoire dans l’entreprise », il n’y a aucun doute à avoir quant au type de gratification obligatoire. Il s’agit d’une prime devenue par usage obligatoire, mais comment en arriver à caractériser cette prime d’usage ?
Il existe trois critères qui permettent de caractériser l’usage d’entreprise rendant obligatoire la prime, il s’agit des critères : de généralité, de constance et de fixité. Ainsi, en étudiant en corrélation chaque critère avec les faits, la Cour de cassation a pu en déduire qu’il s’agissait d’un usage d’entreprise.
- Critère de généralité
La cour de cassation a eu l’occasion de se prononcer sur le critère de généralité, ainsi elle a pu considérer comme générale, la gratification attribuée à l’ensemble du personnel dans un arrêt de sa chambre sociale du 23 mars 1988 (n°85-45.096), elle a aussi considéré le générale lorsqu’une catégorie bien déterminée du personnel bénéficiait de cette gratification lors d’un arrêt rendu en sa chambre sociale le 10 janviers 1980 (n°78-41.303).
La condition de généralité ne s’oppose pas toutefois à ce que l’octroi de la gratification soit réservé aux salariés remplissant certaines conditions d’ancienneté d’après un arrêt de la chambre sociale du 20 juin 1984 (n°81-42.917). Etant donné qu’il n’y a que 7 salariées dont il est fait mention dans l’arrêt du 25 février 1988, il peut très bien s’agir d’anciens salariés, ainsi la prime leur a été attribué grâce à leur ancienneté, ou parce que ces sept font partie d’une catégorie bien déterminée du personnel. Le critère de généralité semble donc rempli.
- Critère de constance
Pour créer un véritable usage, la gratification doit être constante dans son attribution, c’est-à-dire, qu’elle doit être versée un certain nombre de fois (Cour de cassation, chambre sociale du 8 décembre 1976 n° 648). De manière générale, revêt un caractère constant la prime versée depuis de nombreuses années.
Sont également considérée comme constantes, la prime versée d’une manière régulière depuis 5 ans, même si la raison invoquée par l’employeur a changé chaque année (Cass.soc. 28 octobre 1981 n° 80-11.299), la prime payée depuis 3 années consécutives : Cass.soc. 3 juin 1971 n°70-40.370).
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