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Commentaire d'arrêt du 28 janvier 1954.

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Par   •  31 Mars 2016  •  Commentaire d'arrêt  •  1 908 Mots (8 Pages)  •  3 382 Vues

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Commentaire d’arrêt : arrêt du 28 janvier 1954

« Je n'ai jamais déjeuné avec une personne morale », affirmait Gaston Jèze, partisan de la thèse selon laquelle seules les personnes physiques, les êtres humains, sont aptes à devenir sujet de droit. À cela Jean-Claude Soyer, alors adhérent de la thèse selon laquelle la reconnaissance de l'État n’est pas indispensable à l'établissement de la personnalité morale, répondait « Moi non plus, mais je l'ai souvent vue payer l'addition. ». Ce débat traduit clairement les difficultés de l’appréhension du concept de personne morale en droit français.

Il convient de rappeler ce qu’est une personne morale. À l’heure d’aujourd’hui il s’agit d’un groupement doté de la personnalité juridique accordée sous certaines conditions par l’État, ce qui lui confère des droits et des devoirs. La personne morale n'a pas d'existence corporelle, mais constitue un sujet de droit, titulaire d'un patrimoine collectif qui est distinct de celui des individus qui la constituent et qui sont réunis pour accomplir quelque chose en commun. En droit français, la personnalité juridique est la capacité pour une personne physique ou une personne morale à être sujet de droit. Les personnes morales acquièrent la personnalité juridique après enregistrement auprès d’une administration compétente.

Mais au cours du temps, la personnalité juridique n’était pas toujours reconnue à une personne morale. Le 22 février 1945 une ordonnance sur les comités d’entreprise dans les établissements de plus de 100 salariés établissait que ces comités sont élus, consultés chaque mois sur les conditions de travail et ont un droit de regard sur la comptabilité. Le 2 novembre 1945, un décret reconnaissait la personnalité morale au comité d’entreprise.

L’arrêt à l’étude est un arrêt de la 2ème chambre civile dont l’audience publique a eu lieu le 28 janvier 1954 et dont le numéro de pourvoi est 54-07081.

En l’espèce une société créée des comités d’établissements au sein de son entreprise. Un comité d’établissement est une institution au sein d’une entreprise chargée de représenter les intérêts du personnel des salariés. L’un des comités d’établissement passe une commande de vêtements mais ils ne sont pas livrés. Le comité d’établissement saisit le juge et assigne le vendeur en justice.

En appel, la cours décide que le comité d’établissement n’est pas une personne et que par conséquent l’action en justice est irrecevable. Pour la cours d’appel il n’y a pas de loi qui reconnaisse au comité d’établissement la personnalité morale. Le comité d’établissement forme alors un pourvoi en cassation dirigé contre l’arrêt de la cours d’appel.

Un comité d’établissement à qui la loi ne lui a pas attribué la personnalité morale peut-il néanmoins être considéré comme une personne morale ? La cours de cassation répond par la négative à la cours d’appel, il s’agit donc d’un arrêt de cassation. La cours de cassation accepte ainsi qu’un comité d’établissement puisse avoir la personnalité morale en l’absence de loi.

Comment les personnes morales se voient-elles octroyer la personnalité juridique ?

Si l’attribution de la personnalité juridique à une personne morale lui permet d’avoir un patrimoine et donc le droit d’être reçu en justice (I), cette attribution demeure conditionnée et soumise à l’examen du juge (II).

I- Un rejet de la théorie de la fiction permettant la recevabilité des personnes morales en justice

L’arrêt du 28 janvier 1954 vient reconnaître la personnalité morale d’un comité d’entreprise et vient donc concrétiser la théorie de la réalité (A), ce qui permet de ce fait à cette personne morale d’agir en justice (B).

La consécration de la théorie de la réalité

Concernant le statut juridique d’une personne morale, la doctrine s’est très longtemps disputée, certains auteurs en faveur de la réalité de la personne morale, d’autres en faveur de la fiction de la personne morale.

La théorie de la fiction repose sur l’idée qu’une personne morale n’existe pas, elle n’a pas d’enveloppe corporelle, matérielle. Elle est purement immatérielle. Le seul moyen de reconnaître le concept est d’adopter une loi qui va reconnaître leur existence. D’après Savigny, la personne moral « n’existe pas en dehors de la loi, elle répond à un besoin en organisation juridique ».

À l’opposé, la théorie de la réalité soutient que la reconnaissance de l'État n’est pas indispensable à l'établissement de la personnalité morale. L’observation de la réalité montre que la volonté d’un groupement de personnes, par exemple, est autre chose que la somme des volontés individuelles de ses membres. En s’organisant cette personne morale peut exprimer une volonté et agir en conséquence. Ainsi, la personne morale existerait indépendamment d’une loi qui la reconnaitrait. Gierke soutenait cette théorie selon laquelle la personnalité moral existe de fait, elle n’a donc pas besoin de loi.

Marcel Planoir, lui, ne soutenait aucun de ces deux théories. Il estime que la personnalité juridique est un concept inutile. Pour lui, la prétendu personnalité moral n’est rien d’autre qu’une propriété collective, dans laquelle les biens n’appartiennent pas à un sujet de droit distinct des membres qui la composent mais à ces dernier collectivement.

Ainsi, se pose la question quelle théorie retient le droit positif ?

Par un arrêt de principe, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, le 28 janvier 1954, a tranché la controverse universitaire, en imposant la thèse de la réalité de la personne morale. En affirmant que « la personnalité civile n’est pas une création de la loi » la cours de cassation

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