Cass. com., 30 mars 2016
Commentaire d'arrêt : Cass. com., 30 mars 2016. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar loulou9808 • 20 Décembre 2020 • Commentaire d'arrêt • 1 607 Mots (7 Pages) • 2 075 Vues
RODRIGUES Lou-Anne
Commentaire d’arrêt DOC 18 : Cass. com., 30 mars 2016, n°14-11684
Dans un arrêt du 30 mars 2016, la chambre commerciale de la Cour de cassation aborde la notion de consentement vicié par le dol.
En l’espèce des parents ainsi que leurs enfants ont cédé à un acquéreur représentant d’une société, l’ensemble des parts sociales qu’ils détenaient d’une autre société. L’acquéreur ainsi que la société s’estimant victime de manœuvres dolosives ayant vicié leur consentement assigne la famille cédante en annulation de la cession des parts sociales, restitution du prix versé et paiement de dommages et intérêts.
La juridiction de première instance rend un jugement, auquel il est interjeté appel par l’une des parties.
La Cour d’Appel de Caen par un arrêt du 4 juillet 2013 accueille les demandes de l’acquérant en retenant que le consentement de celui-ci était entaché d’un dol incident par la pratique de réticences dolosives, ce faisant la cour a prononcé la nullité du contrat de cession de parts sociales.
La famille cédante se pourvoi en cassation faisant grief à l’arrêt de retenir un dol incident et de prononcer la nullité du contrat alors même que seulement un dol principal pouvait emporter la nullité. Se fondant sur l’article 1116 ancien du Code civil que dés lors que le dol incident n’avait pas empêché le cocontractant de consentir au contrat mais seulement de consentir en d’autres termes, ne pouvant être entaché de nullité.
Le qualificatif de dol incident peut-il entrainer la nullité d’un contrat ?
La Cour de cassation rejette le pourvoi en reprenant le raisonnement de la Cour d’Appel. Elle se fonde sur le fait que les cédants avaient mis en œuvre une ruse en « donnant une image trompeuse » des résultats de la société et d’avoir dissimulé au cocontractant des informations essentielles, privant ainsi le cocontractant d’accepter sous des modalités différentes s’il avait eu pleinement conscience de la situation. La Cour de cassation retient que la cour d’Appel a légalement justifié sa décision en estimant que les faits étaient constitutifs de réticences dolosives entrainant la nullité du contrat de cession. Ainsi la Cour de Cassation reconnait la possibilité de qualifié un dol incident de déterminant entrainant la nullité.
A première vue, il semble que la décision de la Cour de Cassation soit absurde compte tenu du droit commun des contrats en vigueur (I) qui cependant semble vouloir s’inscrire dans une continuité en devenir (II).
- Une décision pour le moins surprenante
Cette décision parait surprenante dans la mesure où elle opère une rupture en la dichotomie traditionnelle du dol (A), en imposant également une « nouvelle » notion paradoxale de dol incident comme déterminant du consentement (B).
- La rupture d’une dichotomie traditionnelle
Dans cet arrêt les cédants de parts sociales motivent leur pourvoi par un critère de distinction fondamental établit à l’article 1116 du CC, selon lequel alinéa 1 «Le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manœuvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces manœuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté. ». Cet article pose le principe selon lequel le dol entraine la nullité à condition que sans ces manœuvres l’autre partie n’aurait pas accepté le contrat, on parle dès lors de dol principal entrainant la nullité et de dol incident qui n’entraine pas la nullité dans la mesure où sans ces manœuvres la partie contractante aurait quand même contracté mais a d’autre condition. Le dol incident ne constitut donc qu’une perte de chance de pouvoir contracter en pleine connaissance de cause et sera en principe insusceptible de nullité mais ouverte à l’engagement de la responsabilité civile pour l’octroie de dommages et intérêts.
Toutefois la Cour de cassation confirme le qualificatif de dol incident et la nullité du contrat retenue par la Cour d’Appel. La cour de cassation retient en effet « [qu’il] n’aurait pas accepté les mêmes modalités d’acquisition s’il avait eu connaissance de la situation exacte de cette société » , elle établis le constat d’un dol incident et également «la nullité de la cession » par conséquent on octroie à un dol incident la sanction d’un dol principal. Ce faisant la Cour de cassation efface la distinction faite entre dol incident et principal qui se tenait à leur définition mais principalement par la sanction où le dol incident ne pouvait donner lieu qu’à dommage et intérêt.
On constate ainsi une rupture quant à la dichotomie traditionnelle de dol incident et dol principal qui se voit davantage brouillé lorsque la cour de cassation introduit la notion de « dol incident déterminant ».
- La référence au dol incident déterminant
La Cour de cassation énonce « ces éléments étaient déterminants pour le cessionnaire, lequel n’avait pas été mis en mesure d’apprécier la valeur de la société cédée et ses perspectives de développement et n’aurait pas accepté les mêmes modalités d’acquisition s’il avait eu connaissance de la situation exacte de cette société », par principe un élément déterminant est joint à la notion de dol principal aussi appelé dol déterminant. Pourtant la cour de cassation resouligne qu’il s’agit d’un dol incident dans la mesure où le cocontractant n’aurait pas, pas conclut le contrat mais l’aurait conclu en d’autres termes. Pour constituer le dol la Cour de cassation retient que « une hausse massive des prix de vente, donné une image trompeuse des résultats atteints par la société cédée au cours des mois ayant précédé la cession» ainsi que le fait qu’ils « avaient dissimulé à la société NUMP les informations qu’ils détenaient sur l’effondrement prévisible du chiffre d’affaires réalisé avec au moins deux des principaux clients de l’entreprise» constituait des éléments déterminants qui avait conduit le cocontractant a accepté. En effet il n’était pas en mesure « d’apprécier la valeur de la société cédée et ses perspectives de développement » par conséquent le cocontractant n’aurait pas accepté le contrat sous les mêmes modalités, la cour de cassation introduit ainsi la notion de dol incident déterminant qui semble abandonner la dichotomie traditionnelle.
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