Arrêt Perdereau
Commentaire d'arrêt : Arrêt Perdereau. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Baptiste Dufaure • 25 Octobre 2016 • Commentaire d'arrêt • 2 770 Mots (12 Pages) • 5 282 Vues
Commentaire de l’arrêt Perdereau
« Si on ne peut, à l’évidence, consommer l’impossible, on peut toujours le tenter. » M. Prothais.
Il s’agit d’un arrêt rendu le 16 janvier 1986 par la Chambre Criminelle de la Cour de cassation. Félix Perdereau a exercé des violences sur Willekens dans l’intention de lui donner la mort, tout en ignorant qu’il était déjà décédé.
La chambre d’accusation de la cour d’appel de Paris par son arrêt du 11 juillet 1985 a renvoyé Perdereau Félix devant la cour d’assises de l’Essonne pour tentative d’homicide involontaire.
Félix Perdereau a formé un pourvoi près la Cour de cassation, puisque d’après lui, il y a contradiction entre les faits dénoncés dans les motifs et ceux reprises dans le dispositif dans l’arrêt rendu par la chambre d’accusation de la cour d’appel de Paris, en effet dans ses motifs la chambre d’accusation retient que « ce serait en portant des coups de bouteille sur le crâne de Willekens et en l’étranglant avec un lien torsadé » alors que dans son dispositif la chambre d’accusation retient « que ce serait par des coups de barre de fer et par strangulation avec celle-ci que Félix Perdereau aurait tenté de donner la mort ».
La tentative d’homicide volontaire sur le de cujus est-elle possible ? Plus subsidiairement, la Cour de cassation peut-elle effectuer son rôle de contrôle quand la chambre d’accusation s’est contredite dans les faits dénoncés dans ses motifs et son dispositif ?
Dans son arrêt de Chambre criminelle du 16 janvier 1986, la Cour de cassation casse et annule l’arrêt rendu par la chambre d’accusation de la cour d’appel de Paris du 11 juillet 1985. La chambre d’accusation s’est contredite, ce qui ne permet pas à la Cour de cassation d’effectuer son contrôle. Par sa solution, la Cour de cassation permet à la chambre d’accusation de la cour d’appel d’Amiens, la chambre de renvoi de renvoyer Félix Perdereau devant la cour d’assises de l’Essonne si ladite cour d’appel estimerait qu’il y ait lieu à accusation contre le demandeur à l’égard du chef de la poursuite.
Dans cet arrêt le problème de la chambre d’accusation qui s’est contredite n’est que subsidiaire, ce n’est pas très intéressante, il n’y a là qu’une sorte d’application de la procédure, a contrario cette décision quant à la tentative de l’infraction impossible : la tentative de l’homicide involontaire est plus palpitante.
I Une solution inauguratrice d’un nouvel ère pour la tentative
- Les conditions de la caractérisation de la tentative
La tentative était réprimée en 1986 par l’article 2 de l’ancien code pénal, qui correspond désormais à l’article 121-5 du nouveau Code pénal « La tentative est constituée dès lors que, manifestée par un commencement d’exécution, elle n’a été suspendue ou n’a manqué son effet qu’en raison de circonstances indépendants de la volonté de son auteur. », à la lumière de cet article en ressort deux éléments nécessaires pour caractériser la tentative : il faut tout d’abord un commencement d’exécution et cumulativement l’effet manqué ou suspendu en raison de circonstances indépendantes de la volonté de l’auteur de la tentative.
Ainsi, il ne peut être fait référence à la tentative sans définir le commencement d’exécution et les circonstances indépendantes.
- Le commencement d’exécution
Il faut se reporter au cheminement criminel, on distingue trois phases, la première est celle du simple projet avec résolution arrêtée de passer a l'acte. Il n'y a aucune manifestation extérieure donc pas de tentative. La seconde phase c'est celle des actes préparatoires, l'individu commence a préparer son forfait, il y a donc une manifestation extérieure de la volonté. La manifestation extérieure existe mais elle est imprécise. Il faut une troisième phase qui est le passage a l'acte, l'individu met à exécution son forfait et donc il y a une tentative.
La Cour de cassation a définie elle-même le commencement d’exécution « «l’acte qui tend directement au délit lorsqu’il a été accompli avec l’intention de le commettre » avec un arrêt de sa chambre criminelle du 5 juillet 1951.
Il y a plusieurs conceptions du commencement d’exécution, tout d’abord une thèse objectiviste (Ortolan), qui retient un élément objectif pour la définition du commencement d’exécution : il est nécessaire que l’acte tende directement à la commission de l’infraction. D’après cette thèse objectiviste, il n’y aurait commencement d’exécution pour le vol défini à l’article 311-1 du Code pénal « Le vol est la soustraction frauduleuse de la chose à autrui », qu’à partir du moment où le délinquant aurait introduit sa main dans le sac à main de sa victime Cependant cette thèse objectiviste aurait tendance à laisser impunis des actes qui se trouvent trop près du but recherchés par l’infracteur.
Ainsi, une conception objectiviste plus souple a vu le jour. Ces auteurs considèrent que lorsque la loi exige un commencement d’exécution elle n’exige pas le commencement de l’exécution de l’infraction mais le commencement d’exécution de la tentative. On vise ici à réprimer « l’entrée en action » de l’agent. D’ailleurs cette solution a été adoptée par la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation dans un arrêt du 14 juin 1977 dans lequel les juges visent expressément « le commencement d’exécution de la tentative » et non plus le commencement d’exécution de l’infraction. Ceci permet d’étendre quelque peu la répression.
Il y a une thèse subjectiviste qui elle retient un élément subjectif : l’acte doit être accompli avec l’intention irrévocable de commettre l’infraction, l’acte doit être non équivoque. C'est une thèse qui permet de remonter très haut dans le temps, au début de l'élaboration de l'infraction. Ainsi, toute tentative, selon cette doctrine, devrait être punissable, on n’a plus besoin de l’exigence de commencement d’exécution du moment que l’intention d’aller jusqu’au bout de la commission est certaine.
Dans notre arrêt du 16 janvier 1986, la Cour de cassation par sa formule « lesdites violences caractérisant un commencement d’exécution », la cour justifie la tentative,
- Les circonstances indépendantes
La tentative n’est pas caractérisée si l’infracteur en puissance se désiste volontairement, la tentative n’étant pas constituée, l’infracteur en puissance ne tombe donc pas sous le coup de la loi pénale.
Or en l’espèce, la mort de Willekens est indépendante de la volonté de Félix Perdereau ce qui a permis la cour de dégager une circonstance indépendante de la volonté de Perdereau, ainsi les deux éléments caractéristiques de la tentative sont présents.
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