Doit-on Apprendre à Devenir Soi-Même?

Doit-on apprendre à devenir soi-même?

Tous les jours, nous sommes bombardés (à travers de slogans publicitaires, par exemple) d’un dicton de bon sens: “Sois toi-même”. Cela pour vouloir exprimer un individualisme, un refus du changement personnel. Donc, au premier abord, l’expression “devenir soi-même” semble paradoxale: n’est-on pas soi-même de base, simplement en existant?

L’utilisation de “doit-on” dans ce sujet implique un devoir, peut être même une obligation. L'autorité exercée dont on parle est peut être non seulement biologique, mais sociale.

Le terme “apprentissage”, quant à lui, s’associe souvent à la jeunesse, à l’enfance. Il est reconnu que l’enfant est innocent: donc, en manque de connaissances par rapport au fonctionnement de la société, et aussi par rapport à son propre fonctionnement. Ce processus d’apprentissage, par ailleurs, nécessite autrui. “Devenir”, employé ici, suggère une transformation de soi- cela peut faire référence à un changement de la vision de soi-même, ou simplement parler de l’adolescence (une transformation physique). La notion de “soi” est directement liée à l'identité, qui est un concept purement social: sans la société, nous n’aurions pas besoin de se distinguer d’autrui. Il est donc possible de reformuler la question d’origine: “Doit-on apprendre à trouver une place en société?” Quelles sont les conditions sous lesquelles on peut trouver cette place? Cela est-il difficile? Est-il possible pour l’Homme de se reconnaître soi-même? Le moi est il changeant, ou figé? Qu’est-ce ”être soi-même”? Peut-on être “autre” que soi? Le devoir insinué est-il une obligation? Si oui, cette obligation est-elle biologique ou sociale? Finalement, nous en arrivons à poser cette question: “Quelle est la relation entre l’identité de l’Homme et sa place en société?” Tout d’abord, nous examinerons le point de vue suivant: Il n’est pas nécessaire de devenir soi-même car nous le sommes déjà; ensuite, nous verrons que nous ne sommes pas toujours forcément nous mêmes, et que le mouvement vers notre “soi” nécessite un effort réel.

Finalement, nous verrons que l’accomplissement du “soi” est imposé socialement et biologiquement, et qu'il est défini par son impossibilité.

Il semblerait que le concept de “devenir soi-même” soit absurde, car tout être humain peut être défini en tant que sujet unique. D’un point de vue physique, il est tout d’abord évident que le corps d’un individu sépare clairement celui-ci du monde autour de lui; c'est la frontière du soi. Sous l'hypothèse d’un être créateur, nous ne pouvons être autre chose que nous-mêmes, car nous sommes déterminés à l’absolu par autre chose que soi- c’est-à-dire que nous sommes inchangeables, des créations parfaites.

De plus, selon Descartes, l’Homme est défini par sa pensée: “cogito ergo sum”. puisque l’Homme connaît toutes ses pensées, il est donc sa propre personne. Mais même Descartes partage certaines idées avec Freud: il admet avec ses principes de vérité que les vérités de convention, ou de tradition, existent, et qu’elles influencent la pensée malgré soi.

C’est d’ailleurs Descartes qui, ayant retenu l'hypothèse d’un Dieu omnipotent, souleva l’idée du Dieu trompeur: un Dieu qui fausserait la raison de l’Homme. Sous cette hypothèse, l’Homme ne peut évidemment pas être lui-même: comment être soi-même lorsque nous sommes contrôlés par une force extérieure?

Souvent, l’individu peut ne pas se sentir lui-même, il perd sa place dans le monde: cela peut suivre une maladie mentale telle celle d’Alzheimer, ou encore une ivresse suite à l’ingestion de substances psychotropes. Dans ce dernier cas, on parle d’une “ego death”, décrite comme une mort complète (temporaire) de l'identité subjective. Les personnes ayant eu ces expériences en reviennent souvent changées, car forcées dans une vue non subjective du monde. Souvent, cette expérience de mort de l’ego

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