Quels sont ces pouvoirs politiques détenus par le juge américain et quelles conséquences ont ces derniers sur la vie juridique et politique américaine ?

  « Celui qui adhère à une loi ne craint pas le jugement qui le replace dans un ordre auquel il croit. Mais le plus haut des tourments humains est d'être jugé sans loi » La Chute (1956) d’Albert Camus.

Comme le montre cette citation d’Albert Camus, il est impératif que le juge statut des problèmes et litiges qui lui sont présentés en se référant à la loi, et non de manière arbitrale comme il a pu être possible dans le cadre de l’Ancien Régime. C’est pourquoi la majorité des Etats-Pays modernes à travers le monde sont à la recherche d’un système judiciaire le plus juste possible en se basant sur des normes et non plus sur la partialité du juge.

Ce texte est un extrait de la démocratie en Amérique paru en 1835, sous la plume d’Alexis de Tocqueville, un homme politique français et philosophe politique du XIXème siècle, né en 1805 et mort en 1859. Suite à un voyage aux Etats-Unis, il rapporte dans cette œuvre d’enseignement, les caractéristiques du système démocratique américain. Ce texte a une portée particulière du fait de sa parution en France à une époque fortement monarchiste. En effet des « 3 Glorieuses » des 27, 28 et 29 juillet 1830 à « la révolution de février » en 1848 s’étend en France, le régime politique de la monarchie de Juillet avec à sa tête Louis-Philippe Ier. Ce texte s’inscrit dans un mouvement de progrès des idées républicaines transportaient en France par la presse, notamment à partir des années 1835.

Ce texte a un intérêt d’étude important par le fait qu’il montre un aspect de la justice différent en s’appuyant sur l’exemple des pouvoirs dont peut faire usage le juge américain.

• Ainsi, quels sont ces pouvoirs politiques détenus par le juge américain et quelles conséquences ont ces derniers sur la vie juridique et politique américaine ?

Pour répondre à cette problématique, il est préférable de voir en quoi le juge américain est plus puissant que ses pairs étrangers (I), en s’attachant d’abord aux points de concordances qu’il entretient avec les juges des autres pays (I.A), puis en s’attardant sur la vocation politique qu’il possède en plus de rendre la justice (I.B). Dans un second temps nous allons établir les conséquences de la vocation politique du juge américain (II), en émettant la possibilité d’une partialité dans les décisions du juge (II.A), puis enfin des conflits entre le pouvoir judiciaire et législatif que cette vocation compose (II.B).

1. Le juge américain, plus puissant que dans les autres pays

  Le juge américain, selon Tocqueville possède des caractéristiques similaires à ses pairs étrangers (A) mais en même temps, il possède une face totalement inconnue dans les autres pays, une vocation politique du juge en plus de sa vocation à rendre la justice (B).

1. Un juge aux mêmes caractéristiques que ses pairs étrangers

Selon Tocqueville, il existe des caractéristiques au pouvoir judiciaire qui peuvent être comparable d’un pays à l’autre. Notamment « Le juge américain ne peut prononcer que lorsqu’il y a litige. Il ne s’occupe jamais que d’un cas particulier ; et, pour agir, il doit toujours attendre qu’on l’ait saisi » (l. 16-18).

Ainsi le juge a la vocation d’être comme une sorte d’arbitre qui se doit de régler les conflits lorsqu’un litige se produit entre différentes parties. Si une loi n’est pas enfreinte et ne donne pas lieu à une contestation d’une entité, comme une personne, une entreprise, une association, etc., envers une autre, la justice n’a pas à se prononcer. Ainsi découle de cette caractéristique deux conséquences, le juge doit attendre qu’on l’ait saisi et il ne peut s’occuper que de cas particulier.

Tout d’abord le juge ne peut se prononcer que sur les litiges qui lui sont présentés, par sur des cas généraux qui auraient pour conséquence de déterminer ce qui est juste ou non. Le juge s’il statut sur des principes généraux sans se référer à des cas particuliers, ne rendrait plus justice, mais la déterminerait. Ce qui dans un système où les pouvoirs sont mis en balance les uns entre les autres, pour empêcher l’établissement d’un régime totalitaire comme était le cas des monarchies absolues, est inconcevable. Le juge aurait le rôle du législateur.

En outre, le pouvoir judiciaire ne peut agir que quand on l’appelle à le faire. En effet si personne n’assigne quelqu’un devant les juridictions, le juge n’a pas à régler des problèmes par lui-même. Il ne peut pas rendre justice en dehors de ses fonctions, lorsqu’il revêtit sa robe, comme un policier qui n’est pas en service n’a pas les permissions pour arrêter, contrôler ou verbaliser une personne, même si cette personne enfreint la loi devant lui, il ne pourra que reporter l’infraction et non pas agir.

Tocqueville constate que le juge américain ne déroge à aucun de ces principes du pouvoir judiciaire. Il remarque qu’un juge aux Etats-Unis se sert et possède des mêmes moyens que les autres juges dans des pays différents, mais que pour autant il possède tout de même une puissance dont ses confrères étrangers n’ont pas accès. Une véritable vocation politique conjoint à sa capacité à rendre la justice.

1. Un juge qui a une vocation politique en plus de rendre la justice

La principale différence entre le juge américain et ses pairs étrangers, est le fait que le juge américain base la justice qu’il rend sur la constitution plutôt que sur les lois. En effet Tocqueville dit que les juges américains ont le droit « de fonder leurs arrêts sur la constitution plutôt que sur les lois. En d’autres termes, ils leur ont permis de ne point appliquer les lois qui leur paraitraient inconstitutionnelles » (l.23-25). Le juge peut se permettre de ne pas appliquer une loi si elle lui semble contraire à la constitution.

En effet, la constitution américaine « oblige les législateurs comme les simples citoyens, mais peut être changée par la volonté du peuple » (l.32-33). Ainsi, dû au fait que la constitution américaine est la volonté de tout le peuple, et que par conséquent elle peut être modifiée par cette même volonté, le juge peut donc se permettre de baser ses décisions sur la constitution en primauté face aux lois vu que tous les citoyens américains lui doivent obéissance. En outre, le juge possède donc une sorte de pouvoir de boycott envers les lois qui lui semble contraire à la constitution, sans pour autant la censurer.

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