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Commentaire de l'arrêt du 5 juillet 2018

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Par   •  28 Février 2022  •  Commentaire d'arrêt  •  2 035 Mots (9 Pages)  •  1 189 Vues

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Commentaire de l’arrêt de la 2ème chambre civile de la Cour de cassation du 5 juillet 2018

« Tout ce qui augmente la liberté augmente la responsabilité » disait Victor Hugo. Ce lien entre liberté et responsabilité doit vraiment être pris en compte par les associations sportives notamment car elles ont à leur charge des individus dont elles sont responsables. Ceux-ci restent libres de leurs actions mais toute faute de leur part peut entrainer la responsabilité de leur association.

La Cour de cassation rend un arrêt par sa 2ème chambre civile le 5 juillet 2018 concernant la responsabilité générale d’autrui.

Dans les faits, à l’issue d’une rencontre sportive, un joueur exclu du jeu rentre sur le terrain et agresse l’arbitre. Ayant saisi une commission d’indemnisation des victimes d’infractions, la victime est indemnisée après une instance pénale par le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions (FGTI). Celui-ci assigne l’association du joueur et son assureur pour obtenir le remboursement des sommes allouées à la victime.

La cour d’appel de Paris rend un arrêt le 23 février 2017 dans lequel elle déboute le fonds de sa demande. Elle considère que le manquement aux règles du jeu commis par le joueur a conduit à son exclusion du jeu mais n’est pas la cause directe du préjudice subi par la victime. Selon elle la responsabilité de l’association sportive ne peut pas être engagée car le préjudice a été commis par un joueur s’étant rhabillé, en dehors de toute activité sportive et à la fin d’une rencontre. En dehors du déroulé du match l’association ne serait donc pas responsable des fautes commises par ses joueurs.

Le FGTI forme un pourvoi en cassation. La Cour de cassation devait se poser la question suivante : une association sportive est-elle responsable d’une faute d’un de ses joueurs même si elle a été commise en dehors de toute activité sportive ?

La Cour de cassation casse et annule l’arrêt rendu par la cour d’appel le 5 juillet 2018.

Elle considère qu’une association sportive reste responsable de tout dommage causé par un de ses membres s’il est commis au sein de l’enceinte sportive et en lien avec une activité sportive. Elle indique donc que l’agression d’un arbitre commis par un joueur même à l’issue d’une rencontre constitue une infraction aux règles du jeu.

La Cour de cassation rend son jugement en reconnaissant l’existence d’une faute commise par le joueur (I) et renforce la responsabilité de l’association sportive (II).

  1. L’existence d’une faute commise par le joueur

Dans cet arrêt assez particulier, la Cour de cassation ne reconnait pas de lien direct entre la faute commise par le joueur et le dommage mais plutôt que l’infraction commise est la cause du dommage par ricochet.

  1. L’absence d’une violation directe des règles du jeu ?

En responsabilité générale du fait d’autrui, la faute commise par une personne dans le domaine sportif, doit être reconnue comme une violation caractéristique des règles du jeu imputable à une personne. Il s’agit ensuite de distinguer cette faute de la simple faute technique. Ainsi dans un arrêt du 20 novembre 2003, la Cour de cassation avait considéré que l’effondrement d’une mêlée durant un match de rugby entrainant la tétraplégie d’un des joueurs était un accident et ne pouvait être défini que comme une faute technique et non pas comme une faute caractérisée. Par opposition, dans un arrêt du 8 juillet 2010, avait été considéré comme une faute caractérisée, le fait pour un joueur d’utiliser sa chaussure pour frapper un joueur de l’équipe adverse. L’avis de la Cour de cassation semble donc varier en fonction de la violence de la faute qui doit dépasser la simple tactique de jeu.

En l’espèce, l’agression d’un arbitre présente un caractère violent et ne saurait donc pas être considéré comme une simple faute technique. Dans cet arrêt la question était plutôt de savoir si cette faute pouvait être concrètement caractérisée comme une violation des règles du jeu. L’action d’agresser un arbitre après une rencontre sportive ne sert pas l’esprit du jeu mais ne semble pas en apparence non plus être une violation aux règles du jeu. La cour d’appel dans sa décision avait reconnu la présence d’une violation des règles du jeu à l’origine de l’exclusion du joueur durant le match, mais n’avait pas relevé le lien entre ce manquement aux règles du jeu et l’agression de l’arbitre. Considérant que la rencontre était terminée et que l’on ne se trouvait plus dans le cadre d’une activité sportive, elle avait considéré que la violation des règles du jeu n’était pas caractérisée et ne pouvait pas être définie comme la cause du dommage. Cette décision de la cour d’appel semble assez logique car l’action d’un joueur d’agresser un arbitre à l’issu d’un match ne semble pas être du ressort direct de l’activité sportive car ne représente pas effectivement une violation directe d’une règle du jeu liée au match. En effet cette action caractérise une infraction pénale mais non un manquement concret au règles du jeu en elles-mêmes.

La Cour de cassation a cassé cet arrêt de la cour d’appel en estimant que la faute ayant été commise dans une enceinte sportive et par un joueur, constitue forcément une infraction aux règles du jeu.

  1. Une infraction pénale indissociable de l’activité sportive

La Cour de cassation en donnant sa décision, insiste bien sur le fait que l’agression d’un arbitre même produite à l’issue d’une rencontre et par un joueur préalablement exclu du match constitue une infraction aux règles du jeu.

L’action d’agresser une personne caractérise une infraction pénale que la Cour de cassation rend indissociable de l’activité sportive à l’issue de laquelle elle s’est déroulée. En effet, le joueur a été exclu du jeu pour une violation des règles du jeu et c’est à l’issue du match qu’il est venu agresser l’arbitre. Mais la Cour de cassation déclare que l’exclusion du joueur par l’arbitre au cours du match pour une violation des règles du jeu est bien la cause par ricochet du dommage car c’est ce qui a entrainé le joueur à venir agresser l’arbitre à la fin du match. La Cour de cassation précise sa décision en observant que le lieu de l’agression est bien le lieu de la rencontre : l’enceinte sportive. Le fait que l’agression ait eu lieu à la fin du match n’empêche pas de qualifier la faute comme une violation caractérisée des règles du jeu. C’est donc bien dans la cadre de l’activité sportive que l’agression a eu lieu et la faute contrevient aux règles du jeu.

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