Les vrilles de la vigne, Colette
Dissertation : Les vrilles de la vigne, Colette. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Slatch Sénior • 21 Janvier 2024 • Dissertation • 2 493 Mots (10 Pages) • 222 Vues
Les Vrilles de la vigne, publié en 1908 par Colette, regroupe vingt nouvelles d’inspiration autobiographiques.
L’auteur y a réuni des souvenirs d’enfance, des méditations sur le temps, l’amour, la solitude, et y montre à nouveau sa passion de la nature. (Voir la fiche de lecture pour le bac sur Sido suivi des Vrilles de la vigne).
Dans la première de ces nouvelles, qui donne son titre au recueil, Colette invente un conte pour expliquer pourquoi le rossignol ne chante que la nuit.
Mais c’est aussi un moyen métaphorique d’expliquer, en tant qu’artiste, son propre besoin de liberté, de solitude et d’authenticité.
Problématique
Comment Colette se saisit-elle de la figure du rossignol, emblème traditionnel de la poésie lyrique, pour en faire un symbole d’authenticité et de liberté artistiques ?
Annonce du plan linéaire
Dans un premier temps, nous verrons qu’un récit en forme de conte révèle tout d’abord comment le rossignol est devenu nocturne, jusqu’à «de le voir chanter».
La narratrice prend ensuite la parole pour faire part de son témoignage sur le chant du rossignol, spectacle de pure passion, jusqu’à «Tant que la vigne pousse, pousse, pousse…».
Enfin, une seconde lecture du conte, métaphorique, est proposée, où la narratrice s’identifie au rossignol.
I – Le conte du rossignol : comment l’oiseau devint nocturne
De « Autrefois, le rossignol ne chantait pas la nuit » à «de le voir chanter» .
A- L’ouverture du conte : un chanteur diurne
L’atmosphère du conte est donnée par l’adverbe initial «autrefois» et les imparfaits qui suivent : «chantait», «avait», «s’en servait», «se levait», «se couchait».
On est projeté dans un passé légendaire où «le rossignol ne chantait pas la nuit».
L’emploi de l’article défini «le» montre qu’on parle non d’un rossignol parmi d’autres, mais du premier rossignol du monde.
Le conte se propose d’expliquer comment l’oiseau en est venu à ne chanter que la nuit.
La situation initiale le présente comme un bon chanteur : «il avait un gentil filet de voix».
L’expression personnifie l’oiseau, mais signale aussi que sa «voix» reste assez faible («filet»).
L’adjectif «gentil» et l’expression «s’en servait avec adresse» montrent cependant un certain talent.
C’est un chanteur acharné, comme l’indique les deux compléments circonstanciels de temps, puisqu’il chante«du matin au soir, le printemps venu».
Comme tous les oiseaux, il est matinal («il se levait avec les camarades, dans l’aube grise et bleue») – comme Colette elle-même (voir Sido).
Il mêle sa voix à celles de ses «camarades» – nouvelle personnification des oiseaux – pour un «éveil effarouché» de toute la nature.
En évoquant les «hannetons endormis à l’envers des feuilles de lilas», Colette montre son sens de l’observation et sa tendresse pour les petites bêtes qui peuplent la nature.
Le rossignol se couche avec le soleil («sur le coup de sept heures, sept heures et demie»), pour une nuit très courte : «ne faisait qu’un somme jusqu’au lendemain».
B – L’élément perturbateur : le piège de la vigne
Cependant, il ne fait pas attention à l’endroit où il s’endort: «n’importe où, souvent dans les vignes en fleur qui sentent le réséda».
Or, c’est dans ces buissons odorants que se situe le piège, élément perturbateur du récit.
La posture de l’oiseau endormi sur un «jeune sarment» de vigne est décrite avec réalisme: «le jabot en boule et la tête inclinée».
Mais l’oxymore du «gracieux torticolis», délicat mais douloureux, préfigure déjà les torsades de la plante étrangleuse.
Car la vigne pousse si vite et si tortueuse qu’elle emprisonne l’oiseau.
L’image des «cornes», puis des «vrilles» et des «liens fourchus» lui donne un aspect démoniaque, sinueux, fourbe.
Elle est néanmoins dotée d’une certaine fraîcheur: le goût de ces sarments, leur «acidité d’oseille fraîche» qui «irrite et désaltère», à la fois bénéfique et mauvaise, signale l’ambivalence de cette plante.
Le piège semble inextricable: les vrilles, «cassantes et tenaces», «poussèrent si dru». On relève le champ lexical de l’entrave: «ligoté», «les pattes empêtrées», «les liens»; «les ailes impuissantes».
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