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Crise, repli ou reconfiguration de l’Etat social

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Par   •  21 Février 2018  •  Cours  •  5 074 Mots (21 Pages)  •  825 Vues

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Chapitre 5 : Crise, repli ou reconfiguration de l’Etat social

La mise en crise de l’Etat social

Certaines politiques développées par l’Etat social ont fini par produire l’inverse des effets escomptés durant leur mise en œuvre. Par exemple, à force de chercher l’égalité des revenus, on a estimé que tout le monde finissait par s’appauvrir. Concernant les allocations chômages où les minimas sociaux, certains considèrent qu’elles entretiennent une mentalité d’assisté.

Ce ne sont pas seulement des contraintes économiques qui vont pousser à certains choix, mais également des idéologies d’ordre philosophique. Très souvent, en analysant l’action publique, la solution proposée figure déjà dans la façon de problématiser la situation qui nécessite l’intervention publique.

La critique philosophique de la société civile, la monté de l’individualisme et la fin du compromis keynésien

Dans « Etat social », la notion d’Etat est centrale. Cela renvoi notamment à la bureaucratie. Dans ce questionnement et cette mise en crise, il y a une interrogation sur la place de l’Etat et sur la construction de la bureaucratie comme un problème. L’idée ici, c’est de comprendre la phrase de Reagan prononcée en 1981 : « L’Etat n’est pas la solution. Il est le problème ». Selon cette phrase, on change de paradigme. En 1945, on voyait l’Etat comme une solution. Il était l’arbitre incarnant l’intérêt général.

Dans les années 1980, l’Etat est alors perçu comme un prédateur et comme un obstacle au fonctionnement libre du marché qui serait garant, par la pureté de son fonctionnement, du bien commun. Il y a un basculement et une inversion qui s’opère. Il faudrait relier cela à des transformations sociologiques, surtout dans la haute fonction publique. Une sécularité et un consensus sur la légitimité de l’Etat va se briser.

Pendant la grande époque keynésienne, la capacité à agir dans la société via des positions de pouvoir va être concentrée dans les administrations centralisées de l’Etat. Cette évidence va profondément se transformer. On peut le mesurer en France lorsque l’on regarde la stratégie des élites via la reproduction sociale par les grandes écoles. Les écoles de commerce font une percée énorme à partir des années 1970, qui se conjugue à une perte de vitesse des grandes écoles d’ingénieur.

On va alors aborder les différents types de critiques, d’origines intellectuelles différentes mais qui auront un effet pour éroder la croyance de l’Etat comme défenseur de l’intérêt général. L’essentiel de la critique se manifestera alors autour des effets néfastes de la bureaucratie.

Des hauts-fonctionnaires vont eux même théoriser et chercher à limiter le rôle de l’Etat dans la société. On retrouve plusieurs courants.

Les marxistes orthodoxes

Les marxistes orthodoxes ne font pas de critique nouvelle. Pour eux, l’Etat agit comme une superstructure défendant les intérêts de la bourgeoisie. Ils critiquent l’Etat social comme un instrument de maintien du capitalisme. Avec l’essoufflement de l’URSS et des partis communistes dans les années 1970, cette critique va perdre en puissance. L’immobilisme des années Brejnev discrédite l’économie planifiée et l’idée même d’une bureaucratie associée à la sclérose.

Les mouvements trotskystes

Les mouvements trotskystes qui, par la violence de leur anticommuniste et anti stalinisme vont voir l’appareil bureaucratique comme le dévoiement d’un idéal. Ils concentrent leurs attaques sur cette bureaucratisation qui va porter aussi bien sur l’URSS que sur la bureaucratie étouffante à potentiel totalitaire. Irving Kristol réinvesti ainsi une sorte de libido au mouvement révolutionnaire, perçu comme seul moyen de résister à la bureaucratie tentaculaire. On parlera alors de révolution néo-conservatrice. Ce mouvement sera central à travers son positionnement dans les think-tank.

La société civile

La société civile, dans les années 1980, va constituer un levier puissant de critique contre l’emprise de l’Etat. Les migrations de la conceptualisation et de la portée de la critique dans le temps et dans l’espace sont intéressantes. Le concept de société civile nait en Ecosse au XVIIIème siècle dans un contexte de monarchie absolutiste. Des économistes comme Adam Smith théorisent la société civile comme un espace doté d’une autonomie et d’une propre légitimité vis-à-vis des prétentions d’un monarque absolu. Dans cette conception, on voit une superposition initiale avec l’activité économique.

On constitue ainsi l’individu comme porteur de droits et de libertés propres. Or, ce concept va mettre en avant la citoyenneté dans un sens plus politique et finir par mettre en retrait ses liens avec l’économie. En fait, durant la guerre froide, les dissidents de l’Europe centrale redécouvrent la notion de société civile. La Charte 77 en Tchécoslovaquie remet notamment en avant cette notion. L’enjeu est d’affirmer une autonomie de la société vis-à-vis de l’emprise du parti communiste. On affirme plusieurs libertés politiques, mais le substrat économique est laissé de côté car les dissidents restent des socialistes convaincus. La planification économique ne les dérange pas. Ils vont juste militer pour un socialisme à visage humain. Le concept revient alors ensuite vers l’Europe Occidentale. On dresse une sorte de cordon sanitaire pour remettre l’Etat à sa place. Ce discours plait notamment une partie de la gauche européenne menée par Rocard et la CFDT. Rosanvallon met aussi en avant ces idées dans ses écrits.

L’école de Francfort

L’école de Francfort va également avancer une critique avec le livre d’Herbert Marcuse. Il craint que l’Homme ne se retrouve enfermé dans une bureaucratie impersonnelle. Il s’oppose à la transformation de l’individu en simple consommateur à la merci du capitalisme. Le mouvement écologiste va se développer à partir de cette critique sociale.

La critique des économistes

La critique économique offre un sujet très vaste de contestation. On estime souvent que la crise pétrolière a mis à l’épreuve la régulation keynésienne. Milton Friedman va alors proposer un nouveau paradigme pour dépasser les

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