Le Canal De Suez, Enjeux Actuels
Rapports de Stage : Le Canal De Suez, Enjeux Actuels. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar dissertation • 1 Août 2014 • 3 722 Mots (15 Pages) • 2 035 Vues
Le canal de Suez, une zone stratégique en déclin
"La pauvreté n'est pas une honte, mais c'est l'exploitation des peuples qui l'est. Nous reprendrons tous nos droits, car ces fonds sont les nôtres, et ce canal est la propriété de l'Egypte.” Cette déclaration de Nasser à l’aube de la nationalisation du canal de Suez en 1956 montre bien que le contrôle de ce dernier ne laisse pas indifférent les puissances en présence au Moyen-Orient.
Le canal de Suez a été construit par Ferdinand de Lesseps en 1858. Il avait pour but de relier l’Europe et l’Asie en évitant d’avoir à contourner le continent africain. Ce canal avait donc au départ une raison purement économique puisqu’il réduisait de moitié la distance à parcourir par les navires. Bien qu’une ligne de chemin de fer ait été mise en place auparavant entre Suez et Alexandrie pour gagner du temps, les coûts restaient trop élevés et le canal a permis de les réduire fortement.
Mais très vite, plusieurs puissances en ont revendiqué l’exploitation et ainsi donné au canal une dimension géopolitique. La France et l’Angleterre, les deux puissances commerciales de l’époque, possédaient à part égale l’exploitation du canal. Cela leur permettait de conserver un ancrage économique dans la région tout en protégeant ce passage essentiel à leur commerce. Cette présence militaire franco-britannique fut contestée par l’Empire Ottoman, à l’époque puissance dominante de la région. Ainsi, dès sa construction, le canal revêt une dimension géopolitique très forte car il se place au cœur des intérêts des puissances de la région.
En quoi le canal de Suez revêt-il à travers l’Histoire tous les aspects d’un lieu particulièrement géostratégique ?
Le canal de Suez est avant tout une construction ambitieuse aux enjeux économiques. Mais il revêt très vite une dimension géopolitique en devenant un enjeu majeur des deux guerres mondiales et de la guerre froide. Cependant, on peut observer un déclin relatif actuel du canal qui laisse supposer que son importance géostratégique était temporellement limitée.
I. Le Canal de Suez, l’ambitieuse construction d’un pont entre l’Orient et l’Occident
1. Une construction qui répond à des enjeux économiques
L’idée de creuser une voie d’eau au niveau de l’isthme de Suez est bien antérieure à 1858 : dès l’époque des pharaons, un petit canal avait été créé afin de relier le Nil aux lacs Amers, et de donner ainsi un accès à la Méditerranée. Par la suite, les différents projets qui seront élaborés ne verront jamais le jour, et notamment le projet de percement lancé par Napoléon Bonaparte lors de sa campagne d’Egypte en 1798 qui sera abandonné suite au départ des français en 1801. En 1846, rêvant d’un canal qui relierait l’Orient à l’Occident dans des perspectives d’harmonie et de commerce, des saint-simoniens créent à Paris la Société d’étude sur le canal de Suez, visant à lancer une série d’études techniques mais aussi à obtenir des appuis dans les milieux financiers et politiques.
L’enjeu de la création d’un canal ressurgit réellement quand le besoin s’en fait sentir. Au début du XIXème siècle, la révolution industrielle provoque une explosion des échanges commerciaux internationaux, et une forte baisse des temps de transports terrestres grâce au développement effréné du chemin de fer. En cette époque de colonisation, français et anglais règnent sur la région et essaient d’y défendre leurs intérêts. Ces facteurs poussent les pays Occidentaux à essayer de trouver un moyen de réduire le temps de transport pour son commerce avec l’Orient. La réduction des délais passe surtout par la fin du contournement du continent africain au cours des expéditions commerciales ; français et anglais ré-évoquent l’idée de la création d’un canal à Suez, mais le roi Mohamed Ali s’y oppose fermement. Ainsi, dans les années 1830, se met en place un système alternatif de traversée terrestre (routier puis ferré) au niveau de Suez. Français et Anglais cherchent tous deux à étendre leur pouvoir économique à la région, et se font donc concurrence dans la défense de leur intérêt. Les Britanniques souhaitent s’assurer le contrôle de la route de Indes, et les Français veulent un canal leur permettant de rejoindre la mer Rouge.
C’est finalement grâce à l’action du diplomate Ferdinand de Lesseps que le canal verra le jour. Il obtient en effet très rapidement l’accord du vice-roi, ainsi qu’une concession de 99 ans, accordée le 19 mai 1855 afin de lancer les travaux. Le projet est fortement multiculturel : il implique des ingénieurs et spécialistes des travaux hydrauliques de toutes les nationalités, et ce afin de rassurer les anglais sur les ambitions françaises en Egypte. Cependant le pays, toujours rattaché à l’Empire ottoman, se voit dans l’obligation d’obtenir l’autorisation de la Sublime Porte avant de lancer cet ambitieux projet. Se dessinent alors les premières tensions diplomatiques autour de la zone. La construction est finalement lancée, et sera gérée par la Compagnie universelle du canal maritime de Suez, codétenue par les gouvernements français et anglais. Commencée en 1859, elle prendra fin dix ans plus tard, avec l’inauguration du 17 novembre 1869. A partir de là, le canal ne laisse pas indifférent, et de nouveaux enjeux économiques et géopolitiques se dessinent, tant au niveau régional qu’à l’international.
2. Et qui en soulève de nouveaux
Dès l’ouverture du canal en 1869, celui-ci modifie profondément le fonctionnement du commerce maritime international : Londres n’est plus qu’à un mois de Bombay, Marseille à quelques semaines d’Aden. Il devient la route principale entre l’Europe et l’Asie, et les échanges entre ces deux continents se multiplient. A partir de cette période, les enjeux flottant autour du canal de Suez évoluent avec ceux du commerce mondial et des transports maritimes. L’intérêt économique que présente le canal ne laisse pas indifférent en Occident, et notamment en France où le projet suscite l’enthousiasme des milieux scientifiques, économiques, ou même commerciaux, avec un milieu du textile soucieux de l’augmentation du prix de la soie chinoise.
Si le canal accélère l'ouverture du marché asiatique à l'Europe, il favorise également les conquêtes politiques. Notamment dès le début, car comme route des empires, il attise la rivalité franco-britannique au XIXe siècle. Des
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