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Le juge administratif et les sources internationales

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Par   •  13 Novembre 2024  •  Dissertation  •  2 655 Mots (11 Pages)  •  66 Vues

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Introduction

En 2016, lors d’une séance de l'Académie des sciences morales et politiques, M. Bernard Stirn, ancien Président de la section du contentieux du Conseil d’État, a déclaré : « Dans ce contexte, le juge français s’est trouvé de plus en plus fréquemment confronté au droit international. Il aurait pu en être déconcerté. » Par ces mots, Stirn souligne la difficulté auquel le Conseil d’État est confronté face à l’évolution de l’intégration des sources internationales dans l’ordre juridique français. Cette intégration bouleverse la hiérarchie des normes et oblige le CE à s’adapter dans l’application des règles. Les sources internationales désignent l’ensemble des règles issues du droit international. Elles s’appliquent au sein d’un État en raison de ses engagements sur la scène internationale. Le droit international regroupe ainsi les normes qui régissent les relations entre États et autres acteurs de la communauté internationale, en s’appuyant sur un ordre juridique distinct de celui des États eux-mêmes. Dans ce contexte, le rôle du juge administratif, et plus particulièrement du Conseil d’État, est de s’assurer que ces normes internationales sont appliquées en conformité avec le droit interne. Il veille notamment au respect des libertés fondamentales et règle les litiges entre citoyens et administration. Le juge administratif veille à l’application du droit international dans l’ordre interne. La Constitution française elle-même consacre l’importance de cette ouverture au droit international. En effet, le préambule de 1946, dans son alinéa 14, proclame que « la République française, fidèle à ses traditions, se conforme aux règles du droit public international ». Cette idée est renforcée par l’article 55 de la Constitution de 1958, qui accorde aux traités une autorité supérieure à celle des lois nationales.

Dès lors, comment le juge administratif s’assure-t-il de l'application des sources internationales en droit interne ?

Pour cela, il vérifie d’abord les conditions d’application des traités internationaux et convention (I), puis examine la place qu’il accorde au droit international dans la hiérarchie des normes (II).

Rôle du juge administratif dans le contrôle des conditions d'application des traités

Le JA vérifie et veille aux modalités d’introduction des traité et convention dans l’ordre juridique interne (IA.) et dispose également d’un pouvoir d’interprétation en la matière °IB.)

I.A Le contrôle du juge sur les modalités d’introduction des traités et convention dans l’ordre juridique interne

Pour qu'un traité ou une convention produise des effets dans l’ordre interne, il est nécessaire qu’il soit régulièrement ratifié. En vertu de l’article 53 de la Constitution, ces engagements internationaux ne peuvent être ratifiés qu’en vertu d’une loi. Dans l’arrêt Parc d’activité Blothzein du 18 décembre 1998, le Conseil d’État a affirmé son rôle de garant de cette disposition en vérifiant que l’article 53 avait bien été respecté. En cas de non-respect de cette exigence, par exemple si la ratification était faite par décret au lieu de loi, le traité ne pourrait produire aucun effet en France. Cependant, le Conseil d’État refuse de juger de la constitutionnalité de la loi autorisant une ratification, comme l’illustre l’arrêt Commune de Porta du 8 juillet 2002. En droit international, un État peut ratifier un traité tout en émettant des réserves. Ces réserves limitent ainsi l’applicabilité de certaines de ses dispositions. Le Conseil d’État prend en compte ces réserves dans sa jurisprudence, comme l’illustre l’arrêt Super Coiffeur du 12 octobre 2018. De plus, le Conseil d’État est compétent pour évaluer la régularité des conditions de publication des traités. En effet, il l’a affirmé dans l’arrêt Cartel d’action morale et sociale du 16 mars 1966. S’applique également le principe du pacta sunt servanda, selon lequel chaque partie est tenue de respecter les accords conclus de bonne foi, sur la base de la réciprocité. Longtemps, le Conseil d’État posait une question préjudicielle au ministre des Affaires étrangères pour vérifier la condition de réciprocité, comme en témoigne l’arrêt Rekhou du 29 mai 1981. Toutefois, cette pratique a été remise en cause par la Cour européenne des droits de l’homme. Celle-ci a jugé cette procédure contraire au droit à un procès équitable. Le Conseil d’État a donc changé sa jurisprudence dans l’arrêt Mme Cheriet-Benseghir du 9 juillet 2010, en décidant qu’il vérifierait lui-même la condition de réciprocité. Par ailleurs, pour être invocable par les citoyens, une convention internationale doit avoir un effet direct, c’est-à-dire un contenu suffisamment précis. Le Conseil d’État a fait preuve de prudence quant à la portée de certaines conventions, comme le pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC), jugé trop imprécis pour produire des effets, selon l’arrêt Gisti du 23 avril 1997. En revanche, la Cour de cassation a estimé dans un arrêt du 16 décembre 2008 que certaines dispositions de ce pacte pouvaient produire des effets en droit français. Le Conseil d’État a affiné les critères de l’effet direct dans son arrêt d’assemblée du 11 avril 2012, Gisti, relatif à une convention de l’Organisation internationale du travail, définissant les critères permettant de déterminer si une convention internationale est directement applicable.

IB. le pouvoir d’interprétation du juge administratif

Depuis l’arrêt Veuve Murat de 1823, le Conseil d’État estimait qu’il n’était pas de sa compétence d’interpréter les traités internationaux dans le cadre de ses fonctions contentieuses. Il renvoyait cette interprétation au ministre des Affaires étrangères par le biais d’une question préjudicielle. Ainsi, le JA refusait d’intervenir directement sur le contenu des conventions internationales. Il renvoyait cette tâche au pouvoir exécutif qui était seul habilité à donner un avis sur les intentions des États parties aux traités. Toutefois, le gouvernement pouvait adopter une interprétation qui était favorable à lui et non aux autres intéressés. Une telle jurisprudence pouvait aller à l'encontre du droit à un procès équitable reconnu par l’article 6 de la CEDH.Cette position a perduré jusqu’au 29 juin 1990 décision gisti d’assemblée plénière. CCE a décidé de mettre fin à cette

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