Le conflit de lois dans le temps
Cours : Le conflit de lois dans le temps. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar mianoun • 10 Décembre 2019 • Cours • 4 803 Mots (20 Pages) • 1 101 Vues
SECTION 3 – LE CONFLIT DE LOIS DANS LE TEMPS
- Position de la question
Un conflit de loi se présente lorsque deux ou plusieurs lois différentes paraissent avoir une vocation concurrente à régir une situation donnée. Il faut choisir alors laquelle devra être appliquée. Ce conflit de lois peut se produire dans l’espace ou dans le temps :
- Conflit d’ordre spatial : tel est le cas quand la situation est en lien avec deux ou plusieurs états. De quel état faut-il appliquer la loi? Par ex. un citoyen français qui épouse une citoyenne allemande : le régime matrimonial de ces deux époux sera-t-il de loi allemande ou de loi française? Ce type de conflit de loi dans l’espace fait l’objet de la matière du droit international privé.
- Conflit de loi d’ordre temporel : dans un seul état (la France), un conflit de loi se rencontre lorsque plusieurs lois se succèdent dans le temps sur un même sujet. Quelle loi faut-il alors appliquer sur une situation donnée? Cette question est souvent récurrente pendant les réformes : quel est le domaine d’application respectif dans le temps de la loi ancienne et de la loi nouvelles? Plus la législation est changeante et plus la question se pose avec acuité.
Exemple de conflit de la loi dans le temps ☝
Une loi de 1816 a supprimé le divorce qui été prévu auparavant par le C.c. de 1804. Cette nouvelle loi a eu pour vocation de s’appliquer aux personnes se mariant après 1816; en revanche, qu’en est-il des personnes s’étant mariées auparavant? Leur mariage est-il dissoluble ou est-il devenu indissoluble?
Une loi du 3 décembre 2001 (E.V le 01 juillet 2002 - réforme des droits du conjoint) a modernisé diverses dispositions du droit successoral. Cette loi a notamment accru les droits de succession du conjoint [a]survivant. À quelle succession ces nouvelles dispositions s’appliquent-elles? À quelles successions faudra-t-il appliquer la loi ancienne et à quelles successions faudra-t-il appliquer la loi de 2001?
La loi du 6 juillet 1989 a augmenté les droits des locataires de logements, tendant à améliorer les rapports locatifs. La loi leur a donné un droit de reconduction de leur contrat en fin de période triennale ainsi qu’un droit de préemption [b](en cas de vente). Ces nouveaux ont vocation à s’appliquer à tous les contrats de bail conclu après l’entrée en vigueur de la loi; mais qu’en est-il des contrats déjà en cours au moment de l’entrée en vigueur?
La question ne présente pas toujours de difficulté. Voici deux cas ne présentant en réalité aucun problème :
- Lorsqu’une situation juridique s’est créée, a produit tous ses effets, et s'est éteinte avant l'entrée en vigueur de la loi nouvelle (=sous l’empire de l’ancienne législation). Ici on appliquera la loi ancienne, sauf exception.
Dans le cas tu premier exemple cité ci-dessous, la nouvelle loi supprimant le divorce n’a pas cherché à prétendre que les personnes ayant divorcé avant la loi de 1816 étaient toujours mariées de fait. Le divorce avait déjà été prononcé. Même chose pour les successions réglées avant la loi du 3 décembre 2001 et le droit de préemption qui n’aurait pas été offert aux locataires avant 1989.
- Cas inverse : la situation juridique que règle la loi nouvelle se crée et développe ses effets après l’entrée en vigueur de la loi nouvelle. De fait, elle a pour vocation de s’appliquer. Suivant les exemples mentionnés ci-dessous, il en va ainsi pour les baux contractés après 1989, les successions d’après 2001 et les époux s’étant mariés après 1816.
Problématique : tout change et devient délicat lorsqu’une situation se crée et commence à produire ses effets sous l’empire de la loi ancienne mais continue de produire des effets après que la loi nouvelle a été publiée et qu’elle est entrée en vigueur. La situation prend racine dans le passé, sous l’empire de la loi ancienne mais elle continue à vivre dans une époque où la loi nouvelle est obligatoire.
Dans le contexte des exemples pris ci-dessous : les époux qui mariés avant 2016 et le sont toujours après; une personne décédée le 20 juin 2002 (la veille de l’entrée en vigueur de la loi successorale de 2001); le contrat de bail conclu avant 1989 et que le locataire est toujours dans les lieux après l’entrée en vigueur de la nouvelle loi.
🡺 Existe-t-il des bénéfices des droits nouveaux octroyés par ces lois?
- Enjeux
Plusieurs aspects du droit objectif sont en jeu. D’un côté, il y a le besoin de sécurité juridique : c’est la possibilité de se fier à la législation en vigueur pour les individus qui accomplissent des actes de la vie juridique destinés à produire des effets. La sécurité passe par la prévisibilité. Cette dernière suppose que la loi en vigueur reste le plus longtemps possible applicable aux situations créées sous son empire (même si une loi nouvelle viendrait succéder).
Par opposition, si un changement de législation est décidé, c’est parce que la la loi nouvelle est supposée apporter une amélioration par rapport à la loi ancienne. Les dispositions nouvelles sont censées être plus justes. Le besoin de justice n’impose-t-il pas de chercher à donner à ces nouvelles dispositions un domaine d’application dans le temps le plus vaste possible? Ceci éviterait la création d’un système juridique à stratification décalée, complexe et cloisonné où chacun vivrait avec le droit de sa génération. On éprouverait un sentiment d’inégalités devant la loi.
🡺 Deux intérêts importants : sécurité juridique et prévisibilité d’un côté, et idéal de justice et d’égalité devant la loi de l’autre côté.
Il faut examiner les solutions qui sont apportées concrètement au conflit de lois dans le temps. Après un changement de législation, quel est le domaine respectif de la loi nouvelle et de la loi ancienne? Si le sujet est approché sous un angle pragmatique, on peut avoir de bonnes certitudes sur celui-ci. Il faut souvent observer la présence ou l’absence de dispositions transitoires dans la loi nouvelle.
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