La Constitution et les normes européennes
Dissertation : La Constitution et les normes européennes. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar juliette bianeis • 23 Décembre 2022 • Dissertation • 1 764 Mots (8 Pages) • 497 Vues
« La Cour Européenne a clairement affirmé la primauté de la Convention sur tous les actes internes », par ces mots, Frédéric SUDRE dans Droit européen et international des droits de l’homme (2015) mets une exergue la nature des relations généralement conflictuelles entre la norme constitutionnelle et droit de l’Union Européenne (UE). Si il s’agit dans les textes de rapports harmonieux, la réalité en semble parfois tout autre.
Datée du 15 octobre 2021, cette décision (n°2021-940) a été rendue par le Conseil Constitutionnel, c’est-à-dire l’institution française créée par la Constitution de la 5ème République qui se prononce sur la conformité à la Constitution des lois et de certains règlements dont il est saisi. Les extraits proposés concernent les alinéa 9 à 19 de cette décision. Le Conseil Constitutionnel a été saisi, par le Conseil d’État, d’une Question Prioritaire de Constitutionnalité (procédure de contrôle sur les lois déjà promulguée) posée par la Société Air France et portant sur la conformité de l’article L.213-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA).
Dans sa décision le Conseil Constitutionnel a déclaré conforme l’article de loi et plus particulièrement l’obligation pour un transporteur « de ramener une personne étrangère non ressortissante d’un État membre de l’Union Européenne en cas de refus d’entrée sur le territoire national ».
Les dispositions contestées ici ont été induites dans le droit interne français suite à la loi du 26 février 1992 qui vise à tirer les conséquences de la convention d’implication des accords de Schengen ( relatifs à la suppression des contrôles aux frontières communes) ratifiés par l’Allemagne, le BENELUX et la France. Cette convention, rattachée directement à l’Union Européenne par le traité d’Amsterdam du 2 octobre 1997, prévoit donc un renforcement des contrôles aux frontières extérieures. Son effet sur le droit interne français est direct puisque son article 26 prévoit notamment une application dans le droit national des états signataires des directives pour les transporteurs concernant le ré-acheminement dans un pays tiers des personnes refusées à l’entrée du territoire. Les entreprises de transports manquant à cette obligation s’exposent donc à une amende administrative, contestée ici par la société Air France et cause directe de la pose de la QPC et donc de la saisine du Conseil Constitutionnel par le Conseil d’État.
L’intérêt premier de ce texte semble néanmoins d’avantage reposer sur les rapports entre les directives européennes et le normes constitutionnelles françaises que sur le bien fondé ou le respect des droits civils accordé par cette décision. En effet, il semble particulièrement important de souligner que dans sa décision, le Conseil Constitutionnel ne méconnaît pas, au contraire, les principes qu’elle nomme inhérents à l’identité constitutionnelle de la France, bien qu’elle doive se conformer aux directives européennes. De plus, aujourd’hui, la politique française actuelle demeure très tournée vers l’Europe et donc vers l’Union Européenne, contrairement à son homologue britannique qui a, elle, décidé de la quitter. Le dévouement du pays aux normes européennes peut être pourtant nuancé. Il est nécessaire de rappeler qu’historiquement la France demeure très attachée à la suprématie de sa Constitution. Ce rejet de la primauté européenne s’est notamment traduit le 29 mai 2005 en France par le rejet par le peuple, via un référendum, du projet de Constitution pour l’Europe. Cela pose la question de la réelle place du droit européen dans le droit interne français. Si les français semblent le rejeter en partie, ou du moins ne pas y être totalement favorables, qu’en-est il réellement des institutions ? Que dit le droit sur cette législation qui a défaut de faire partie de la hiérarchie normative du pays, arrive à y posséder une influence non négligeable.
L’ensemble de cette réflexion amène à poser la problématique suivante :
Selon le Conseil Constitutionnel, quelle influence possède le droit de l’Union Européenne sur le droit interne français ?
Si le Conseil Constitutionnel affirme dans sa décision la suprématie de la Constitution sur le droit Européen (I). Néanmoins, il reconnait également son incompétence face à l’impossible contrôle de constitutionnalité du droit européen en vigueur (II).
I-L’affirmation de la suprématie de la Constitution sur le Droit européen
L’affirmation par le Conseil s’exprime par la protection qu’il cherche à apporter aux principes constitutionnels, qui constituent son essence (A). Néanmoins pour permettre un équilibre et éviter de nombreuses tensions juridiques entre le droit interne et le droit externe, une concordance des décisions européennes avec la Constitution est nécessaire (B).
La protection recherchée des principes constitutionnels
Le Conseil Constitutionnel a affirmé dans cette décision son rôle de protecteur de la Constitution. En effet, celui-ci par les mots : « Ne sauraient aller à l'encontre d'une règle ou d'un principe inhérent à l'identité constitutionnelle de la France » témoigne du rôle qui lui est donné, c’est-à-dire de déterminer ou non l’aspect constitutionnel d’une loi. En plus de son rôle d’arbitre, qui veille au respect de l’équilibre fondamental du système, le Conseil Constitutionnel se fait gardien de la Constitution. Selon Michel DEBRE « la création du Conseil constitutionnel manifeste la volonté de subordonner la loi (…) à la règle supérieure édictée par la Constitution ». Ici, c’est ce principe de subordination des lois que le Conseil applique. Ainsi, chaque loi interne et externe, doit, selon cette théorie être en adéquation avec les principes constitutionnels, qui demeurent la norme suprême en France. Il a semblé primordiale dans l’annonce de la décision de mettre en avant ce respect de la Constitution, elle ne peut être oubliée
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