À quelles conditions un dialogue est-il véritable ?
Dissertation : À quelles conditions un dialogue est-il véritable ?. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar anonym75206357 • 23 Mars 2022 • Dissertation • 1 767 Mots (8 Pages) • 605 Vues
Dissertation N° 1 : À quelles conditions un dialogue est-il véritable ?
Plan détaillé
Introduction :
[Amorce] Rien de plus comique qu’un dialogue de sourds : deux interlocuteurs se parlent et s’écoutent sans comprendre le sens de ce qu’ils se disent ; ils semblent dialoguer mais ils ne s’entendent pas ni ne se répondent l’un à l’autre. En y réfléchissant un peu, ces faux dialogues ne sont pas accidentels, ils sont nombreux : ils sont peut-être la règle et non l’exception. En effet, dans un débat, les interlocuteurs ne s’écoutent pas vraiment, ils recherchent dans les paroles de l’autre les failles qui pourront être exploitées pour le mettre en difficulté. Par ailleurs, lorsque l’on parle pour le plaisir de parler, lorsque l’on bavarde, l’autre n’est pas non plus écouté, il est le déversoir de notre besoin pathologique de nous exprimer. Il ne suffit donc pas d’échanger des propos et des opinions pour dialoguer. [Formulation du sujet] À quelles conditions un dialogue est-il véritable ? [Élaboration de la problématique ] La particularité du dialogue consiste en ce que le discours (logos) circule librement entre deux interlocuteurs sans être la propriété de l’un d’entre eux (dia-logos) : il les relient, malgré tout ce qui les distingue. Pour que ce lien s’établisse, pour que la circulation du logos ait lieu, il ne suffit pas de faire part à l’autre de son opinion. Encore faut-il écouter ce que l’autre dit et lui tenir des propos qui appellent de sa part une réponse. [Formulation de la problématique] Il faut donc se demander ce qui distingue le dialogue du simple échange d’opinion : que faut-il pour que les interlocuteurs se parlent l’un à l’autre, c’est-à-dire écoutent ce qu’ils se disent et se répondent l’un à l’autre de telle façon que chaque réponse appelle à son tour une réponse de la part de l’autre ? [Annonce de plan] Il faut donc examiner dans un premier temps ce qui distingue le dialogue de la simple communication, c’est-à-dire en quoi le dialogue exige de considérer l’autre comme un sujet pensant et libre et de devenir soi-même un sujet pensant et libre ; cette condition semble elle-même exiger, et c’est la deuxième étape de notre investigation, que le dialogue soit la recherche en commun d’une vérité, d’un savoir ; cependant, et c’est notre dernier point, si cette vérité visée transcende les interlocuteurs, à la manière d’une vérité scientifique, elle semble à son tour remettre en question la possibilité du dialogue : le dialogue n’exige-t-il pas que la vérité recherchée s’établisse par le dialogue lui-même, c’est-à-dire par l’accord des interlocuteurs eux-mêmes ?
I. Communiquer est la condition nécessaire mais non suffisante du dialogue ; encore faut-il que les interlocuteurs se considèrent l’un l’autre comme de libres sujets pensants.
A. La communication est une condition nécessaire du dialogue.
Communication : échange de messages à l’aide d’un code commun (la langue). Nécessité de s’assurer qu’on utilise bien le même code : sinon, possibilité de malentendus (l’un prend un mot dans un sens, l’autre dans un autre). NB : ce malentendu est fréquent dans les langues naturelles dont les termes sont polysémiques et dont la signification des énoncés dépend du contexte d’énonciation (à la différence des langues univoques, mathématiques), d’où la nécessité de se mettre sans cesse d’accord, au cours d’un dialogue comme dans tout acte de communication, sur le sens des mots employés.
B. Se considérer comme des sujets pensants et libres.
Il peut y avoir communication sans dialogue : un cours, l’annonce d’une décision politique, une entreprise de séduction, un ordre...ce sont des communications sans dialogue. Pour dialoguer, il faut s’écouter et se répondre, ou comme le dit Platon, donner et recevoir le logos.
a. [Écouter non pas l’autre mais ce que l’autre dit ] Si j’écoute les propos de l’autre comme les expressions de ses états d’âme, de ses particularités psychologiques, de sa position sociale, de ses appartenances culturelles, je n’écoute pas le sens de ce qu’il dit, je transforme son discours en symptôme de ce qu’il est. Dialoguer, c’est écouter ce que dit l’autre indépendamment des particularités psychiques, sociales et culturelles qui le caractérisent, c’est viser son discours comme porteur d’un sens universellement partageable et non comme expression de son être.
[Référence : si l’on considère, à l’instar de Gorgias, le logos comme un pharmakos qui exprime les états d’âme et les modifie, il n’y a pas de dialogue possible].
b. [S’exposer à la critique] Pour que mes propos appellent une réponse de la part de l’autre, je dois accepter de rendre raison de mes opinions (d’en donner le logos). Le dialogue réclame certes la franchise (dire ce qu’on pense), mais il exige surtout que l’autre expose des arguments et, par conséquent, expose son avis à l’examen critique (logos = argument). Le dialogue n’a donc rien à voir avec un besoin d’expression (qui peut être assouvi au mieux par la poésie, au pire par le bavardage). Pour dialoguer, je dois donc devenir un sujet pensant, m’élever au-dessus des caractéristiques psychologiques et sociales qui me définissent, pour accéder à une sphère de significations universellement partageables.
C. Pour dialoguer il faut donc s’élever au-dessus du domaine de nos affects et de nos intérêts.
a. Le dialogue ne répond pas à un besoin affectif d’expression, ne flatte pas le plaisir de parler.
b. Le dialogue ne vise pas à promouvoir nos intérêts. [En ce sens le dialogue diplomatique n’est un dialogue que de nom : il s’agit d’obtenir sur le mode du compromis ce que la force brutale n’obtient pas ].
Le dialogue exige ainsi une dépersonnalisation des interlocuteurs, leur accession à un sens universellement partageable.
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