Le crapaud de Tristan Corbière
Fiche de lecture : Le crapaud de Tristan Corbière. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Nolann Hssn • 13 Mars 2022 • Fiche de lecture • 1 452 Mots (6 Pages) • 470 Vues
EL_Crapaud LD
E.L, Corbière, « le Crapaud »
Projet de lecture : Montrer que ce poème est un portrait du poète maudit et incompris
Mouvements du texte :
1er mouvement : les deux tercets : recherche de l’origine d’un chant mystérieux, ambiance fantastique
2ème mouvement : les deux quatrains : beauté et laideur du crapaud maudit
chute : dernier vers, explication du poème
1er mouvement : v.1 à 6, un chant mystérieux dans un cadre fantastique | ||
« Un chant dans une nuit sans air » | Mise en valeur par sa place en début de poème + dans une phrase non verbale | Importance du chant, comme s’il remplissait l’espace à lui seul. Bruit décalé dans un décor sombre, étrangeté de la scène |
« nuit sans air » | négation | sensation d’étouffement, de pesanteur |
points de suspension v.1 | Suspense, mystère | |
| tiret du v.2 | opère une coupure pour décrire le cadre, afin d’insister sur l’aspect incongru du chant ici |
« nuit » / « lune » | Éléments du fantastique | ambiance fantastique, peur, mystère |
« plaque », « métal », « découpure » | isotopie du tranchant ou de la dureté | Froideur, peur |
« clair » / « sombre » | Antithèse | Étrangeté du décor |
« découpures du vert sombre » | Cadre spatial | Forêt ? Renforce la peur (forêt, lieu du mal) |
« … un chant » | Points de suspension pré-posés Anaphore | Comme si les v.2 et 3 n’avaient été qu’une parenthèse et que le poète revenait à l’essentiel : le chant, intrigant |
« un chant ; comme un écho, tout vif » | Phrase non verbale | Mise en valeur du chant qui crée une phrase à lui tout seul → il remplit l’espace, comme au v.1 |
« un chant » | article indéfini + absence de qualificatif ou de complément du nom | on ignore quel est ce chant (un chant d’oiseau ? De femme ?) → renforce le mystère |
« Comme un écho » | comparaison | À mettre en relation avec l’anaphore de « un chant » : il se répète, il remplit la nuit |
« Tout vif » | polysémie | - vivant, intense, donc sonore ? - net et tranchant, comme la lune, donc effrayant ? - à vif, comme une plaie douloureuse ? = en tout cas, intrigant, semble trancher le silence de la nuit → le chant devient l’unique préoccupation du poète. |
« enterré », « sous le massif... » | Lexique de l’enfouissement | Le mystère qui entoure le chant est souligné par sa localisation comme s’il se cachait. |
« là » | déictique | Que désigne cet adverbe ? Où sommes-nous ? L'adverbe suggère que le poète se trouve à proximité du lieu où se trouve le crapaud, et donc qu’il aurait une proximité psychologique avec ce chant. Il fait d’ailleurs écho au « là » de « ce crapaud-là » dans le dernier vers. |
v.5 | points de suspension | Laissent à penser que le poète s’est approché de l’endroit et qu’il se tait pour écouter → silence |
« ça », et « c' » | pronoms neutres | Cultivent le mystère. |
« viens » | l'impératif | Le poète s’adresse à quelqu’un : on ignore de qui il s’agit : adresse au lecteur ? |
Tiret du v. 6 (et les suivants) | Semblent désormais être les marqueurs d’un dialogue, mais on ignore toujours qui accompagne le poète. | |
« ombre » /« sombre », | rime | Contribue au mystère ou à l’inquiétude qui émane du chant. |
2ème mouvement : v. 7 à 14, beauté et laideur d’un crapaud maudit | ||
Multiplication des tirets | Comme une curieuse saynète montrant deux réactions différentes devant le crapaud découvert | |
« Un crapaud ! » « pourquoi cette peur » | Exclamation | Prononcé sur un ton apeuré, comme le suggère la didascalie interne « pourquoi cette peur ». |
« Crapaud » | Symbole | Animal maudit (prince charmant transformé en crapaud par les sorcières, bave de crapaud… ) → poète maudit ? |
« Pourquoi », « moi », « vois », froid », etc. | Assonance en [oi] | Maintenant que le mot « crapaud » a été dit, le son [oi] se multiplie jusqu’à la fin du poème, mimant le coassement. |
« ton soldat fidèle « près de moi » | Métaphore ironique Injonction | Connotation courtoise, semble montrer que le poète est accompagné de la femme aimée, ce que confirme le tutoiement (« viens », « vois-le »). Le poète se pose en homme protecteur et en maître : l’injonction « près de moi » et la métaphore du « soldat fidèle » montrent un aspect protecteur → protéger une femme d’un crapaud = prête à sourire. |
« vois-le » | Impératif | Vise à ouvrir les yeux de la femme pour lui faire une leçon sur le crapaud. |
v.9 | 9 syllabes | Vers monstrueux, « boiteux », à l’image de Corbière ou du crapaud… il comporte une syllabe de trop. |
« poète tondu, sans aile » « rossignol de la boue » | Métaphores Oxymore | Il est décrit par des images étonnantes : il apparaît comme un animal caractérisé par des manques (tondu / sans ailes) et un animal méprisable, bas (de la boue) Les sentiments du poète à son endroit sont ambigus : mépris (« tondu », « sans aile », « de la boue ») ou admiration (« poète », « rossignol ») ? La désignation « poète tondu » assimile le crapaud à un poète → rapprochement de Corbière avec le crapaud. Le poète « sans aile », empêché de voler est une allusion à Baudelaire : chez ce dernier, l’idéal prend souvent la figure d’un oiseau, d’un envol (dans « Elévation » ou « L'Albatros » par exemple). Ici, le poète ne peut atteindre l’idéal, il est plaqué au sol, enfoncé dans le sol (« enterré », « sous sa pierre »). Il a la faculté de chanter de chanter mais pas celle de s’envoler. L’oxymore « rossignol de la boue » suggère un embourbement dans ce que Baudelaire appelle « la fange » ou « les miasmes sordides » de l’existence. Le poète (rossignol) est voué au malheur, à la honte (il reste dans la boue). Cependant, la boue évoque le pouvoir du poète, lorsque l'on pense au vers de Baudelaire « Tu m'as donné ta boue et j'en ai fait de l'or ». |
« Horreur ! » | Interjection à la rime avec « peur » | Marque de dégoût. « horreur » marque une gradation par rapport à « peur », ce qui accentue le dégoût ressenti par la femme |
« Il chante » | Métaphore méliorative | Le coassement est désigné par un chant → le crapaud ressemble à l’aède, ou au poète. |
« Horreur !! » | 2ème occurrence de « horreur » + deux pts d’exclamation | Comme si l’horreur allait croissant. |
« Horreur pourquoi » en écho à « pourquoi cette peur » v.7 | Questions rhétoriques | Le poète défend le crapaud auprès de la femme, comme s’il se sentait personnellement blessé par le dégoût de sa compagne. |
« Vois-tu pas » en écho à « vois-le » v.9 | Négation | Marque l’échec du poète à convaincre sa compagne : d’abord il tentait de lui faire voir la beauté bizarre du crapaud, désormais il comprend que la dame ne voit pas la même chose que lui. |
« œil de lumière » | Métaphore | Référence au poète voyant, au poète déchiffreur de mystères (représentation propre au Symbolisme). Le crapaud = voyant puisqu’il éclaire l’obscurité. |
« il s’en va, froid, sous sa pierre » | Métaphore ? | Il adopte un comportement bizarre : aucune explication de cette fuite : est-il vexé par la réaction de la femme ? A-t-il été dérangé dans son chant ? Suggère une image de mort : « froid, sous la pierre » : méprisé, inadapté au monde dans lequel il vit, le crapaud-poète s’exclut du monde, semble se condamner à mort. |
« nuit », « sombre », « ombre », « enterré », « sous sa pierre »/ « lune », « métal clair », « lumière » | Antithèses ombre / lumière | Le crapaud est caractérisé par des antithèses : il est à la fois dans l’ombre et porteur de lumière → se cache car maudit, détesté, comme le prouve la réaction de la femme ; et pourtant engendre la beauté, chante, illumine la nuit. |
Ligne de points | Le poète ne semble pas avoir convaincu sa compagne : dialogue pas terminé. Interprétations possibles : la ligne de points suggère que la femme est partie, plantant là le poète. Ou le poète se transforme en crapaud sous les yeux de la femme… ? Dans tous les cas, la communication est rompue. | |
Dernier vers : explication du poème | ||
« Bonsoir – ce crapaud-là, c'est moi. » | La chute du poème assimile explicitement le crapaud au poète. Pointe à la fois ironique (l’image du crapaud poli est plutôt humoristique) et amère : « Bonsoir »= réponse amère à la femme qu’il dégoûte. | |
« Ce crapaud-là » | Déterminant démonstratif « ce » + adverbe « -là » | Prouvent que le poète s'identifie au crapaud horrible et effrayant du poème. |
Remarques globales : | ||
Sonnet inversé | Les deux tercets précèdent les quatrains, donnant un sonnet-monstre, à l’image du poète qui se trouve monstrueux. | |
Rythme chaotique du poème | Toute la ponctuation possible est utilisée | Reflète l’esprit torturé du poète ? |
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