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Juste la fin du monde de LAgarce , partie 1, scène 8

Cours : Juste la fin du monde de LAgarce , partie 1, scène 8. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  6 Février 2022  •  Cours  •  3 084 Mots (13 Pages)  •  10 663 Vues

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Explication linéaire n°7

Juste la fin du monde, partie 1, scène 8

Introduction

Jean-Luc Lagarce était à la fois comédien, metteur en scène, directeur de troupe et dramaturge.

En 1988, il apprend qu’il est atteint du sida et se sait condamné. Malgré sa mort prématurée en 1995, à l’âge de 38 ans, Jean-Luc Lagarce laisse derrière lui plusieurs pièces qui rencontreront un succès posthume. Juste la fin du monde est écrite en 1990 et jouée pour la 1ère fois en 1999. L’intrigue est ténue : atteint d’une maladie incurable, Louis rend visite à sa famille après une très longue absence pour annoncer qu’il va bientôt mourir. Mais au lieu de pouvoir se confier, il doit écouter les reproches de chacun.

Dans la scène 8 de la 1ère partie, dont voici la fin, la Mère dialogue seule avec Louis et souligne combien son absence a pesé à Antoine et Suzanne, son frère et sa sœur.

En suivant le mouvement de cette longue tirade de la Mère, qui s’apparent à un quasi soliloque, nous verrons en quoi cette scène de retrouvailles se fait de plus en plus dérangeante. En effet, au lieu d’accueillir son fils avec joie, et sous couvert de susciter l’intérêt de l’aîné pour sa fratrie, la Mère tente de manipuler Louis en l’accablant de reproches en vue de maintenir Antoine et Suzanne auprès d’elle.

Mouvement du texte :

I /l.1 à 6 

II/ l.7 à 22 

III/ l. 23 à 47

IV/ l.48 à 58

V/ l. 59 à 62

I Tout semble indiquer que La Mère est une manipulatrice qui cherche à manœuvrer affectivement Louis pour l’amener à agir selon ses volontés. Sa première stratégie consiste à déguiser son désir et ses doléances derrière ceux de ses enfants. De « ce qu’ils veulent, ce qu’ils voudraient » à « que tu leur dises » (1 à 6)

- La Mère n’exprime pas directement ses propres doléances. Elle parle à la place d’Antoine et de Suzanne, évoqués à travers le pronom personnel « ils » l. 1.

- Parallèlement, elle met en œuvre une stratégie qui vise à atténuer la portée de son discours placé sous le signe de l’incertitude et de l’hésitation, progressant selon la figure de l’épanorthose, mais aussi du modalisateur « peut-être », de la question rhétorique entre les deux tirets : « – Est-ce qu’ils ne manquèrent pas toujours de ça, qu’on les encourage ? » et du conditionnel qui nuance ce que l’indicatif pourrait avoir de trop directif : « Ce qu'ils veulent, ce qu'ils voudraient » l. 1.

- Ce passage est syntaxiquement structuré par un enchaînement de propositions subordonnées conjonctives dépendant de la même principale et de ses deux verbes de volonté (« Ce qu’ils veulent, ce qu’ils voudraient, c’est que .... que… que… etc.»). Cette construction emphatique répétitive, presque lancinante, qui voudrait passer pour un souhait, cache en fait une injonction adressée à Louis. Ces propositions conjonctives ressemblent d’ailleurs aux fils que la Mère tisse autour de ses enfants pour mieux les ligoter et les contrôler. La majuscule à « Mère », seul personnage à ne pas avoir de prénom, fait d’elle la figure dominante de cette famille matriarcale.

- La « Mère » tente d’aiguiller Louis et de l’amener à adopter le comportement d’un père de substitution, comme on le voit à travers le champ lexical du droit (« que tu leur interdises », « que tu les autorises », « que tu leur dises » l. 4-5). Notons au passage que ce n’est pas au frère aîné de poser ces interdits (normalement dévolus au père), dont le rôle consiste plutôt dans l’initiation des premières transgressions. Implicitement, ces propositions sous-entendent la position d’autorité que Louis n’a pas voulu endosser lors de la disparition du père et sonnent immédiatement comme un grief. Ainsi, derrière la question rhétorique l. 3 à 4 perce un reproche formulé contre Louis, visant à le culpabiliser, comme on le voit avec le jeu des pronoms « ils / on / tu » : « - est-ce qu'ils ne manquèrent pas toujours de ça, qu'on les encourage ? - que tu les encourages » l. 3 à 4. Le passé simple, renforcé par l’adverbe « toujours » et l’ambiguïté du pronom indéfini « ça », met en valeur une sorte de tare définitive qui aurait entaché l’éducation d’Antoine et Suzanne, et dont la mère voudrait rendre Louis responsable.

- Grâce à la double énonciation, le spectateur commence à comprendre l’emprise que cette femme a pu avoir sur ses enfants, emprise qu’elle souhaite prolonger. Rangé du côté de Louis, le spectateur goûte ainsi aux remontrances d’une mère qui paradoxalement veut que Louis «  dises » (l. 6) un certains nombres de choses à sa place (probablement pour maintenir Antoine et Suzanne auprès d’elle), alors que le principal intéressé est réduit au silence tout au long de cette tirade.

II. (l. 7 à 22) La deuxième stratégie de la Mère concerne Suzanne et consiste à se placer sur le même terrain que Louis, qu’elle suppose, en tant qu’écrivain, versé dans l’art du mensonge et de l’illusion.

- Reposant sur la même construction syntaxique que précédemment (c’est que + subordonnées conjonctives), l’injonction suivante a de quoi déstabiliser Louis, puisque La Mère souhaite qu’il fasse croire à Suzanne qu’il apprécierait de plus fréquentes visites de sa sœur chez lui : « que tu dises à Suzanne de venir…  » l. 11.

- Paradoxalement, elle l’autorise non seulement à se montrer hypocrite dans cette simulation avec sa sœur, mais encore à lui mentir sans vergogne, comme le souligne la périphrase du mensonge l. 9 assortie de l’adverbe « juste » qui vise à adoucir la portée de ses paroles : « Juste une promesse qu’on fait en sachant qu’on ne la tiendra pas ». Cette phrase peut aussi être comprise comme un commentaire métathéâtral - car elle donne la définition d’une pièce de théâtre, qui n’est qu’une représentation par des acteurs - et comme une proposition d’entente entre deux maîtres du mensonge. La position de la Mère est dominante ici : elle agit comme un metteur en scène qui indique à Louis quoi dire et comment jouer.

- La parole de la Mère a un caractère à la fois fallacieux et oppressant, comme le suggèrent les deux chiasmes l. 11 à 15 « que tu dises à Suzanne de venir (A), parfois (B), / deux ou trois fois l’an (B), / te

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