Dissertation sur Incendies de Wajdi Mouawad : l'Histoire et l'histoire

Les auteurs de toutes époques confondues ont toujours eu un lien avec l'Histoire, qu'il soit flou ou au contraire, très précis.

Il est donc légitime de se demander si en perdant ces références historiques dans une œuvre où se joue un drame, on tombe dans la tragédie, rendant ainsi le sujet à la portée de tous. Incendies est une œuvre à la limite de l'histoire et de l'Histoire.

Nous verrons d'abord pourquoi, en première surface, Incendies paraît comme un drame familial. Ensuite, nous observerons comment, en profondeur, Incendies devient une tragédie contemporaine. Enfin, nous analyserons la visée et l'optique universelle de l’œuvre.

D'autre part, Incendies apparaît en premier lieu comme un drame familial.

En effet, la pièce comporte toutes les caractéristiques d'un drame. Il y a un mélange de registre comique et tragique (dans la scène 31, Nihad a une attitude enfantine et tue pourtant un homme de sang froid). Ensuite, le temps, l'action et le lieu changent régulièrement, se superposant et se recroisant. La règle des trois unités est donc inexistante dans un Incendies.

De plus, le drame familial est intime et se concentre autour de ses membres (Nawal, Nihad, Jeanne et Simon). L'histoire familiale est fictive, optant ainsi pour une certaine distance entre le public et les personnages. Contrairement à des héros populaires, le public ne les connaît pas à moins d'avoir déjà vu la pièce. En outre, l'histoire est intimement liée au passé de l'auteur, Wajdi Mouawad et de sa famille qui ont fui le Liban pendant la guerre.

Mais pourtant, cette fiction est détachée de la réalité. En effet, le drame se veut réaliste et pourtant, le cadre spatio-temporel est vague et flou, perdant parfois le public. Aucun lieux réels, ni événements historiques ne sont vraiment nommés mais seulement implicitement décris. Ensuite, dans le théâtre de la guerre où se joue des événements graves, aucune référence précise n'est faite par rapport à l'Histoire. C'est en se plongeant complètement dans Incendies que l'on peut voir que Wajdi Mouawad a volontairement délié de lui-même le lien entre la guerre dans Incendies et la guerre du Liban. En effet, on retrouve dans la pièce des baïonnettes, armes n'existant pas pendant la guerre du Liban, et une scène particulièrement cruelle rapportée de la seconde guerre mondiale où un soldat nazi aurait obligé une mère à choisir entre ses trois fils.

D'autre part, lorsqu'on se plonge totalement dans Incendies, la pièce apparaît comme une tragédie contemporaine. En effet, Wajdi Mouawad noue et dénoue les fils d'une tragédie aux résonances œdipiennes, universelle et très contemporaine.

On y retrouve les caractéristiques de la tragédie avec le système de la fatalité qui plane sur la famille. Seul le fruit du destin semble avoir une réelle incidence sur la pièce, faisant de Nihad le père de Jeanne et de Simon en violant sa propre mère et en devenant son bourreau. Ensuite, la catharsis s’opère de manière très naturelle. En effet les événements joués sont des catastrophes sanglantes (scène du bus où ce dernier contenant une dizaine de résistants est incendié), et par la fatalité, le public s'apitoie

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