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Testament de Nawal, Incendies, Wajdi Mouawad

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Par   •  31 Janvier 2017  •  Fiche de lecture  •  2 173 Mots (9 Pages)  •  10 408 Vues

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Testament de Nawal, LA 14

Incendies, Wajdi Mouawad

Introduction :

Incendies est une pièce de théâtre contemporaine écrite en 2003 par Wajdi Mouawad, un romancier, dramaturge, metteur en scène. Elle est jouée pour la première fois en 2008, sous la direction du grand metteur en scène français Stanislas Norde.

WM est le directeur du théâtre national de la colline spécialisé dans le théâtre contemporain.

La pièce forme avec les oeuvres Littoral, Forêts et Ciels une tétralogie sous le nom «  Le Sang des Promesses ». D’après WM, cette tragédie est une pièce sur les promesses non tenues, sur les tentatives désespérées de consolation et sur la façon de rester humain dans un contexte inhumain.

D’origine libanaise, il s’inspire de son vécu : l’oeuvre reprend ainsi des éléments autobiographiques. L’histoire se déroule au Québec puis au Liban (on devine à l’aide d’indices)

Les textes sont centrés autour de la recherche d’identité et la quête des origines.

Au début de la pièce, Nawal Marwan meurt après s’être tue des années pour une cause inconnue de ces enfants.  Après ces années de silence, elle s’exprime enfin dans son testament. Elle leur demande de quitter le Canada et d’aller à la recherche de leur père qu’ils croyaient mort, et de leur frère insoupçonné afin de remettre à chacun une lettre. Ainsi, débute alors une quête identitaire, à laquelle s’ajoute des flash-backs permettant de connaitre la vie tourmentée de Nawal.

L’extrait proposé est intitulé  « Dernières volontés ». Elle correspond à la scène d’exposition. Suite au décès de leur mère, J et S se rende chez Hermine Lebel, le notaire qui procède à la lecture du testament de Nawal.

Rappel : rituel funéraire a deux fonctions :

-régler le devenir du mort

-prendre en charge les survivants en rendant sa cohésion au groupe social et en règlementant le deuil, rassurer les vivants on enterre les morts non pas pour eux mais pour les survivants. Ici testament règle les procédures d’héritage et d’enterrement

  • Structure en  3 parties :

1er § règle l’héritage et s’occupe des biens matériels

  • champs lexical biens matériels : les avoirs  « mes avoirs », l’argent, mes meubles
  • lexiques du testament : exécuteur testamentaire, litige

Le ton est très procédurier, impersonnel, froid elle + est directive et ordonne avec des impératifs «  déposez-moi, vous lancerez, vous jeterez… »

  • Nawal utilise des formules choquantes pour qualifier ces enfants : « enfants jumeaux nés de mon ventre »  = grande distance et froideur
  • aucuns adjectifs possessifs associés aux enfants (mes enfants)
  • - Le testament de Nawal à pour fonction de partager les biens entre Jeanne et Simon de manière équitable
  • Nawal insiste fortement sur l’égalité entre ses deux enfants : « Équitablement » v2/4/9 répétition pour souligner l’importance, « À Jeanne et Simon, Simon et Jeanne » v49 cette asymétrie a pour unique but de ne léser aucun des jumeaux en plaçant un nom en particulier devant l’autre
  • Par soucis d’équité, les vêtements de Nawal sont donné à une association étant donné le sexe différents des jumeaux les vêtements ne peuvent leurs servir : « Mes vêtements seront donnés à une œuvre de charité choisie par l’exécuteur testamentaire » v10/11, « enfants jumeaux nés de mon ventre » = égalité parfaite

2ème § : 3objets qui se détachent et qui font l’objet d’une distribution particulière et précise :

« A mon ami … stylo noir »

« A Jeanne M… la veste en toile verte avec l’inscription 72 à l’endos »

« A Simon M… cahier rouge »

  • fonction symbolique puisqu’ils sont mis à part du reste de biens et qu’ils sont attribués de façon très précise à une personne.
  • Le ton est + personnel, elle est + intime puisqu’elle empreinte pour la 1ère fois la 1ère pers du singulier  «  je lègue » alors qu’avant « l’argent sera légué » cad tournure passive où elle n’apparaissait pas. Là elle prend la parole et elle nomme ces enfants pour la première fois
  • indication affective «  à  mon ami, le notaire HL »  ceux qu’elle désignait avant par la périphrase « enfants jumeaux nés de mon ventre » prennent tout à coup un visage et un nom

3ème § (en vers libre) v.16 à la fin: règle l’enterrement lui-même. Ce rituel a pour fonction de 1) régler le devenir du mort et 2) prendre en charge les survivants

  • les modalités de l’enterrement : elles sont détaillées avec beaucoup de précision et ne correspondent pas à un rituel d’une société traditionnelle.
  • fonction + symbolique : EXEMPLE : « le visage tourné vers le sol, face première contre le monde » (26) comme l’idée de la réintégration d’un corps dans un grand tout (la nature, cycle de la vie)
  • modalités très détaillées : les titres : ENTERREMENT », « PIERRE ET EPITAPHE », « A JEANNE ET SIMON, SIMON ET JEANNE »
  • modalités sous le signe de la négation, du retrait : toutes les formules de négations (souvent sous formes d’anaphore) renvoient au souhait d’une grande simplicité : EXEMPLE « sans habits, sans écorce, sans prière », « pas d’épitaphe, pas d’épitaphe, pas de pierre, pas de nom, pas d’épitaphe pas de nom »
  • précision souhait enterrement : sur la façon dont elle souhaite être enterrée : EXEMPLE « Sans cercueil »v23, « Le visage tourné vers le sol »v26, « Vous lancerez sur moi chacun un seau d’eau fraîche» v30/32

  • Le testament prend en charge les survivants en les lançant dans une quête initiatique, en leur attribuant des tâches censées briser le « silence » (qui est un thème récurrent dans l’extrait) cette quête (si elle est accomplie) permettra à la défunte de retrouver sa dignité puisque « Lorsque ces enveloppes auront été remises à leur destinataire [...] Une pierre pourra alors être posée sur ma tombe »v64 à 68
  • Nawal supprime le nom de famille, ce qui est + familier «  à J » et « à S », on ressent la mère qui s’adresse à ses enfants avec le lien maternel beaucoup + intime, style volontairement poétique : changement prose en vers libre
  1. UN TESTAMENT LYRIQUE

Principalement écrit en vers libre ce qui lui confère un caractère grave et solennel. Pour Mouawad, le lyrisme est une forme de résistance contre le cynisme du monde. C’est aussi une façon de sublimer la mort.

  • le lyrisme, aspect poétique apparait dans un certain nombre de refrain :

• sous formes d’anaphore :

« Enterrez-moi » (5-6) repris 2x de suite et avec négations « pas d’épitaphe » x3 37-40-43

« Sans habits, sans écorce, sans prière », « pas d’épitaphe, pas d’épitaphe, pas de pierre, pas de nom, pas d’épitaphe pas de nom »

  • la symétrie : «  A Jeanne et Simon, S et J » comme s’ils étaient les facettes d’une même identité

•sous formes de métaphores :

« L’enfance est un couteau planté dans la gorge » : Ici, le couteau, comme chez Freud, est un symbole sexuel, le silence de Nawal est illustré par ce couteau planté dans sa gorge.

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