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Analyse linéaire ''Juste la fin du monde'', Lagarce, ''Le prologue''

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Par   •  3 Janvier 2023  •  Analyse sectorielle  •  1 569 Mots (7 Pages)  •  637 Vues

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Le prologue 

Juste la fin du monde, le prologue, INTRODUCTION

Jean-Luc Lagarce est à la fois comédien, metteur en scène, directeur de trompe et dramaturge.

En 1988, il apprend qu’il est atteint du sida et se sait condamné. En 1990, il écrit Juste la fin du monde.

Malgré sa mort prématurée en 1995, à l’âge de 38ans, Jean-Luc Lagarce laisse derrière lui plusieurs dizaines de pièces qui rencontreront un succès posthume.

L’intrigue de Juste la fin du monde repose sur l’annonce de Louis à sa famille de sa maladie qui va l’entrainer à une mort certaine.

Les personnages annoncés dans la liste initial Louis, 34ans, Suzanne sa sœur, 23ans, Catherine la femme d’Antoine 32ans, La mère, 61ans.

La scène se passe dans la maison de la mère, un dimanche ‘’évidemment’’ indique l’auteur comme pour marquer le symbole de cette temporalité.

La pièce se compose de deux parties et s’ouvre comme les tragédies grecques de Sophocle sur un prologue que nous allons étudier ici.

Problématique

Ce prologue Juste à la fin du monde est-il traditionnel, et si ce n’est pas le cas, quel est son véritable objectif ?

Plan de lecteur linéaire

Dans un premier temps, du début du prologue à ‘’vous détruirait aussitôt’’, Louis annonce qu’il va mourir.

Dans un deuxième temps, de ‘’Malgré tout, la peur’’ à la fin du prologue, Louis prend la décision de retourner vers sa famille pour annoncer sa mort prochaine.

I- Louis annonce qu’il va mourir

Du début du prologue à ‘’vous détruirait aussitôt’’

Louis est le seul à parler dans ce Prologue, il fait une prolepse, comme une prophétie, en annonçant des faits qui se produiront plus tard ‘’Plus tard, l’année d’après/J’allais mourir à mon tour’’

Cette tonalité prophétique rappelle la tragédie grecque ou le chœur tragique annonçait souvent de manière énigmatique ce qui allait se passer plus tard.

Ici, c’est sa propre mort qu’annonce le personnage.

Louis revient à l’ancrage temporel du ‘’maintenant’’ (‘’J’ai près de 34ans maintenant et c’est à cet âge que je mourrais’’), et rappelle la présence dramatique de la mort avec la répétition du verbe mourir.

L’emploie dans la même phrase de l’adverbe temporel ‘’maintenant’’ et du futur de l’indicatif donne l’impression d’une distorsion temporelle, d’une énigmatique prescience.

Le vers de quatre syllabes ‘’l’année d’après’’ revient de manière anaphorique dans la tirade et vient rappeler l’action du destin. On comprend en effet que la fatalité dans cette pièce a le visage de la maladie  

Jean-Luc Lagarce prend soin de préciser l’âge des personnages : si la liste des personnes informe que Louis à 34ans, Louis précise dans le prologue qu’il a ‘’près de 34ans’’.

Or cet âge n’est pas anodin. Louis va bientôt dépasser l’âge de 33ans, celui de la mort du Christ. La répétition de ‘’l’année d’après’’ peut ainsi signifier que Louis ne mourra pas à l’âge du Christ, mais l’année d’après, à 34ans.

La référence à cette âge symbolique peut être vue comme une marque d’ironie tragique. En effet, la mort du Christ est suivie de la Résurrection : mais dans cette pièce, pas de résurrection possible pour Louis. Seul l’attend un face-à-face inéluctable avec un destin destructeur

Le temps est la véritable force tragique de cette pièce. Ainsi, le champ lexical du temps (‘’Plus tard/année/ans/nombreux mois/fini’’) montre l’implacabilité d’un temps dévorateur qui accule Louis à la mort.

Le temps se dérobe à la connaissance et à la maitrise comment l’indiquent les didascalies initial (‘’ cela se passe … un dimanche, évidemment, ou bien encore durant près d’une année entière’’).  

Face à cette mort, Louis confie avoir gagné par l’immobilité :’’J’attendais’’, ‘’ne rien faire’’, ‘’ à peine’’, ‘’ imperceptiblement’’. Le personnage, dans l’antichambre de la mort, est déjà gagné par une immobilité funeste.

Il est habité par la négativité comme le suggère le champ lexical de la négation ‘’ ne rien faire, à tricher, à ne plus savoir, sans espoir jamais’’, la négation ‘’ne plus’’ et ‘’sans jamais’’ indiquant un temps fermé, un monde clos

Le temps évoqué comme un ennemi dangereux : ‘’danger’’, ‘’ extrême’’, ‘’violent’’, ‘’ réveillerait l’ennemi’’, ‘’ détruirait’’.

L’anaphore ‘’l’année d’après’’ vient perturber la syntaxe de la tirade et transforme toutes les phrases de Louis en anacoluthe. La maladie et la mort sont comme un parasite qui vient s’incruster dans la phrase et empêcher tout sens, toute parole.

II- Louis décide de revenir dans sa famille

De ‘’Malgré tout, la peur’’ à la fin du prologue

La répétition de ‘’Malgré tout ‘’ suggère un retournement de situation : Louis décide finalement de mener un combat contre la maladie et la mort en revenant sa famille.

Le terme épique ‘’risque’’ fait signe vers l’épopée, mais Louis n’oublie pas la fatalité (‘’sans jamais d’espoir de pouvoir survivre’’). Comme tout héros tragique, il se sait condamné.

Il évoque se décision de revenir dans sa famille. (‘’retourner les voir, revenir sur mes pas, aller sur mes traces et faire le voyage’’) : la répétition de préfixe ‘’re’’ suggère un retour aux sources qui est un combat contre le temps qui passe

Lagarce utilise la polysémie de l’expression ‘’faire le voyage’’ qui peut désigner à la fois le déplacement physique mais aussi le passage symbolique de la vie à la mort.

Ici, Louis conjure momentanément la mort par un voyage inversé, qui est une remontée dans le temps, un retour dans le giron familial.

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