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Texte 15 : La Bruyère, Les Caractères, VIII, 1-10 : définition de la Cour

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Par   •  28 Juin 2022  •  Analyse sectorielle  •  2 008 Mots (9 Pages)  •  2 457 Vues

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Texte 15 : La Bruyère, Les Caractères, VIII, 1-10 : définition de la Cour

Introduction :

- Les livres V à X des Caractères constituent des cercles concentriques qui rapprochent du Roi : les

personnages les plus nombreux sont traités en premier (le peuple), puis les Bourgeois, les courtisans, les Grands

et enfin le protagonistes central, le Roi.

- Après le détour par la ville de Paris, le chapitre VIII, « De la Cour » pénètre au cœur de la cible du moraliste :

les mœurs de la Cour et ses innombrables travers. Le livre poursuit la quête de vérité que se fixe l’auteur dès les

premiers caractères. Il s’agit de lever le voile et de découvrir tous les stratagèmes de dissimulation.

- Étude des dix remarques, soit des dix premières phrases qui ouvrent le livre VIII des Caractères intitulé « De

la cour ». Au seuil de cette section, La Bruyère propose une définition de son objet, c’est-à-dire de la Cour. Ce

travail liminaire le conduit à railler dès les premières lignes les vices de la Cour et à user d’ironie pour orienter

la lecture de la centaine de remarques qui suivent.

- À la fin du livre VII, De la Ville, dont l’objet était lui-même cible de moqueries et de caricatures, on pouvait

s’attendre à un rééquilibrage des vertus, une entrée en un monde antagoniste de la Ville, en tout point

admirable. C’est l’illusion que crée d’abord l’auteur pour très vite déconstruire l’attente et signifier la parenté

de fourberie entre la Ville et la Cour.

Problématique : Quelle vision de la Cour La Bruyère propose-t-il en ouverture du livre VIII qui lui est

consacré ?

Mouvements :

- 1er mouvement : remarques 1 à 3 : Définir la cour, une tâche impossible ?

- 2° mouvement : remarques 4 à 8 : Le cadre d’une comédie sociale : entrer dans la Cour des grands et

des petits

- 3° mouvement : remarques 9 et 10 : Un nouveau monde pour l’honnête homme

Explication linéaire

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er mouvement : remarques 1, 2, 3 : Définir la Cour, une tâche impossible ?

L’enjeu de ces remarques est d’annoncer l’ambiguïté autour d’une définition claire de la Cour.

- Reproche honorable : ne pas connaître la Cour (cf. le superlatif de supériorité « le plus honorable »). Cela

signifie-t-il ne pas savoir en donner une définition ou ne pas la fréquenter ? Ouverture sur une ambiguïté :

ce reproche est-il véritable ou est-ce de l’ironie ? Est-ce une provocation du moraliste, qui justifie par là son

entreprise d’étude des mœurs courtisanes ? Ou bien encore est-ce un reproche que formulent les courtisans à

ceux qui ne le sont pas ?

- La suite de l’ambiguïté se poursuite avec le mot « vertus ». Le terme « Cour » induirait toutes les vertus. Il

semble ici que l’on poursuive l’ironie du début de la phrase. Le pronom impersonnel « on » confirme cette

interprétation : le référent est flou, il peut s’agir du courtisan, de l’intrigant, du Parisien…

- Cette première remarque soulève l’enjeu du chapitre : le mot « cour » constitue en lui-même une énigme.

- La remarque 2 poursuit la réflexion : le saut induit par la fragmentation (remarque 1 à 2) suspend la réflexion

du lecteur et permet une mise en relief : celui qui « sait » la Cour est digne d’intérêt. On a ici un quasi-portrait

initial du courtisan. Les adjectifs qualificatifs « profond, impénétrable » amorcent un portrait élogieux . Mais ce

portrait dissone ensuite par l’emploi des verbes au présent de l’indicatif, à valeur de caractérisation et de vérité

générale : « il dissimule » ; « sourit » ; « il contraint » ; « il déguise ses passions » ; « il dément son cœur » ;

« parle » ; « agit contre »). La description faite de ce courtisan est péjorative : l’homme qui vit à la Cour et la

connaît ne peut être sincère et doit masquer toute la franchise qui pourrait le perdre. Cette seconde remarque

dresse, ironiquement, l’inventaire des « vertus » honorées à la Cour, consistant principalement à dissimuler.

- La dernière phrase, avec sa négation exceptive (ou restrictive) - « tout ce grand raffinement n’est qu’un vice »

- vient condamner ce faux éloge du courtisan. Le nom « vice » opposé au nom « vertu » du premier paragraphe

(et qui vient fermer cette seconde remarque) détrône l’homme de Cour. Le raffinement d’apparence n’est que

fausseté, et vices et vertus sont confondus.

- NB : cette longue phrase est ponctuée non selon les unités de sens mais selon les unités de souffle. C’est un

procédé courant au XVII° siècle. La Bruyère mène ici un travail écrit qui prend des accents d’oralité, et fait de

cette ouverture une démonstration d’éloquence.

- Remarque 3 : le lecteur entre alors dans la complexité du système de la Cour. Cette 3° remarque tire la

conséquence de cette première approche : la définition est impossible car le monde de la Cour est flou,

changeant, insaisissable. La question rhétorique

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